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la jeune fille à la perle. Vermeer. 1565.1566. Mauristhuis. La Haye.  

  

«  Pour ma part, je dis que cette chose est libre qui existe et agit par la seule nécessité de sa nature, et contrainte cette chose qui est déterminée par une autre à exister et à agir selon une modalité précise et déterminée. [...]

     Vous voyez donc que je ne situe pas la liberté dans un libre décret mais dans une libre nécessité.

 

   Concevez maintenant, si vous voulez bien, que la pierre, tandis qu'elle continue de se mouvoir, sache et pense qu'elle fait tout l'effort possible pour continuer de se mouvoir, Cette pierre, assurément, puisqu'elle n'est consciente que de son effort, et qu'elle n'est pas indifférente, croira être libre et ne persévérer dans son mouvement que par la seule raison qu'elle le désire. Telle est cette liberté humaine que tous les hommes se vantent d'avoir et qui consiste en cela seul que les hommes sont conscients de leurs désirs et ignorants des causes qui les déterminent. C'est ainsi qu'un enfant croit désirer librement le lait, et un jeune garçon irrité vouloir se venger s'il est irrité, mais fuir s'il est craintif. Un ivrogne croit dire par une décision libre ce qu'ensuite il aurait voulu taire. De même un dément, un bavard et de nombreux cas de ce genre croient agir par une libre décision de leur esprit, et non pas portés par une impulsion. Et comme ce préjugé est inné en tous les hommes, ils ne s'en libèrent pas facilement. L'expérience nous apprend assez qu'il n'est rien dont les hommes soient moins capables que de modérer leurs passions, et que souvent, aux prises avec des passions contraires, ils voient le meilleur et font le pire : ils se croient libres cependant, et cela parce qu'ils n'ont pour un objet qu'une faible passion, à laquelle ils peuvent facilement s'opposer par le fréquent rappel du souvenir d'un autre objet. »

                                          Spinoza, Lettre à Schuller, 1674.
 
 
     Métaphysiquement, la liberté, définie comme libre arbitre, s'oppose à l'idée de nécessité et de déterminisme. De fait, si tout ce qui se produit dans l'univers se produit selon l'enchaînement nécessaire des causes et des effets, il n'y a aucun sens à parler de libre arbitre. Celui-ci suppose d'admettre qu'il y a de la contingence. Ce qui a son principe dans le libre arbitre n'est pas déterminé à être ou à être ce qu'il est. Un acte procède du libre arbitre s'il met en jeu une initiative du sujet ne devant pas être conçue comme l'effet nécessaire de causes antécédentes, elles-mêmes effets nécessaires d'autres causes et ainsi à l'infini. Le libre arbitre suppose que l'auteur de l'acte s'institue cause première de celui-ci. Il commence avec lui une série de conséquences ayant son origine dans une faculté qu'on suppose être une possibilité humaine et qu'on définit comme le pouvoir de se déterminer à agir sans autre cause que la mise en oeuvre de ce pouvoir ou de cette faculté.
   D'où la définition kantienne : « J'entends par liberté, au sens cosmologique la faculté de commencer de soi-même, un état dont la causalité n'est pas subordonnée à son tour, suivant la loi de la nature à une autre cause qui la détermine quant au temps.» Kant, Critique de la raison pure, PUF, Traduction : Tremesaygues et Pacaud, p. 394.
    Cette idée de libre arbitre ne va pas du tout de soi. Spinoza, par exemple, la dénonce comme une illusion et une croyance irrationnelle.
  C'est une croyance irrationnelle car elle consiste à faire de l'homme « un empire dans un empire », un individu échappant aux lois naturelles. Or l'homme n'échappe pas aux lois du réel et comme tout ce qui existe, il est soumis à la nécessité naturelle. Il n'y a pas de contingence dans le règne de la nécessité.
   C'est une illusion car « Les hommes se croient libres parce qu'ils sont conscients de leurs désirs mais ignorants des causes qui les déterminent ». Si l'homme a l'impression qu'il agit « sans qu'aucune force extérieure »  l'y contraigne, comme le prétend Descartes, cela tient au fait qu'il n'a pas la connaissance des déterminismes pesant sur lui et les ignorant, ils croient qu'ils sont inexistants. En réalité, il est le jouet des mouvements du corps, eux-mêmes déterminés par les corps environnants. Ce qu'il croit être le décret de son âme est l'effet des passions. Dans la Lettre à Schuller ou dans Ethique, III, prop.II, scolie, Spinoza prend l'exemple de l'enfant, du colérique, du poltron, du bavard ou du dément. Les uns et les autres croient choisir librement ce qu'ils font. En réalité, ils agissent sous l'empire des passions. S'ils ont le sentiment qu'ils peuvent se déterminer dans un sens ou dans un autre, par exemple choisir le pire alors qu'ils voient le meilleur, c'est qu'ils sont le jouet de passions contraires dont aucune n'est assez forte pour l'emporter. Ils balancent donc entre l'une et l'autre au gré des situations, étant poussés dans une direction ou dans une autre « par le plus léger motif » Ethique, ibid.  
 
   Alors faut-il renoncer à l'idée de liberté ? Certes il faut faire le deuil de l'idée de la liberté conçue comme libre arbitre. Mais n'est-il pas possible de concevoir autrement la liberté ?
   L'intérêt de toutes les philosophies de la nécessité (stoïcisme, spinozisme, marxisme, freudisme) est d'établir qu'il est possible d'articuler l'idée de liberté et celle de nécessité. Toutes proposent donc une définition paradoxale de la liberté. Celle-ci ne s'oppose pas à la nécessité, elle est la nécessité comprise et agie en connaissance de cause. La connaissance de ce qui nous détermine nous permet de moins subir, de ruser avec ces déterminismes et d'accomplir notre nécessité propre.
   Spinoza, par exemple, affirme que la liberté ne s'oppose pas à la nécessité, elle s'oppose à la contrainte. Libre, l'être agissant selon la nécessité de sa propre nature, contraint celui qui est déterminé à agir par une nécessité extérieure à la sienne.    Or tel est le cas de la nécessité passionnelle. Une passion, un affect, comme les mots l'indiquent, procèdent de l'action sur nous de quelque chose d'extérieur à nous. Agir sous l'empire des affects revient donc à subir, à agir sous la contrainte d'une nécessité extérieure à sa nécessité propre. Voilà pourquoi « l'impuissance de l'homme à gouverner et à contenir ses sentiments, je l'appelle servitude. En effet, l'homme soumis aux sentiments ne dépend pas de lui-même mais de la fortune, dont le pouvoir sur lui est tel qu'il est souvent contraint de faire le pire même s'il voit le meilleur » Ethique, IV, préface.
   Cependant la nécessité passionnelle n'est pas une fatalité. Certes il est impossible de lui échapper totalement, l'homme étant un élément du réel condamné à subir l'action des éléments avec lesquels il est en rapport. Mais « chacun a le pouvoir de se comprendre lui-même et de comprendre ses affects de façon claire et distincte, sinon totalement, du moins en partie, et il a par conséquent le pouvoir de faire en sorte d'avoir moins à les subir » Ethique, V, Prop. IV, scolie.
   Spinoza ne prétend pas ici que l'homme peut prendre une conscience claire de tout ce qu'il subit. Il annonce ainsi Freud et le thème de l'inconscient. Reste que même si ce n'est pas « totalement », il le peut « en partie ». Il y a là l'expression d'une autre nécessité, une nécessité intérieure à l'être de raison. En comprenant rationnellement, celui-ci n'agit plus selon une nécessité extérieure à son être. Il agit selon sa nécessité propre et par la compréhension rationnelle il se libère de la servitude passionnelle. Il se fait une idée adéquate de l'ordre nécessaire des choses, idée le déterminant à agir en accord avec lui.   Descartes donne un bon exemple de ce qu'explique ici Spinoza avec son témoignage relatif à l'affect suscité pendant son enfance par une petite fille qui louchait, affect dont il surprend la répétition au cours de sa vie à l'égard de personnes atteintes de la même caractéristique visuelle. En prenant conscience du mécanisme dont il semble être le jouet, (réactivation dans la vie actuelle de l'état psychosomatique lié à un événement enfantin, par la rencontre de femmes suscitant le souvenir de la petite fille aimée de l'enfance) il s'en libère.
 
 « Lorsque j'étais enfant, j'aimais une fille de mon âge, qui était un peu louche au moyen de quoi, l'impression qui se faisait par la vue en mon cerveau, quand je regardais ses yeux égarés, se joignait tellement à celle qui s'y faisait aussi pour émouvoir la passion de l'amour, que longtemps après, en voyant des personnes louches, je me sentais plus enclin à les aimer qu'à en aimer d'autres, pour cela seul qu'elles avaient ce défaut; et je ne savais pas néanmoins que ce fût pour cela. Au contraire, depuis que j'y ai fait réflexion, et que j'ai reconnu que c'était un défaut, je n'en ai plus été ému. Ainsi, lorsque nous sommes portés à aimer quelqu'un, sans que nous en sachions la cause, nous pouvons croire que cela vient de ce qu'il y a quelque chose en lui de semblable à ce qui a été dans un autre objet que nous avons aimé auparavant, encore que nous ne sachions pas ce que c'est. Et bien que ce soit plus ordinairement une perfection qu'un défaut, qui nous attire ainsi à l'amour, toutefois, à cause que ce peut être quelquefois un défaut, comme en l'exemple que j'en ai apporté, un homme sage ne se doit pas laisser entièrement aller à cette passion, avant que d'avoir considéré le mérite de la personne pour laquelle nous nous sentons émus ».
                                                     René Descartes, Lettre à Chanut (6 juin 1647)
 
 
   Freud rétorquerait sans doute à Descartes qu'on ne se libère pas d'un affect ou d'un pathos par la seule prise de conscience intellectuelle, reste que lui aussi propose par la cure analytique de rendre conscient un déterminisme inconscient, et par la prise de conscience de reconquérir un pouvoir sur sa vie.
 
 
 

 

 

 

 

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90 Réponses à “Liberté et nécessité. Spinoza.”

  1. Migone patrick dit :

    Encore une fois , je touche du doigt la citation de Maimonide, : » Et, c’est dans ce sens que celui qui a enseigné quelque chose à quelqu’un peut-être considéré comme ayant fait naître cette personne […] » naître à une compréhension plus claire… Merci pour ce partage.

  2. Simone MANON dit :

    Emouvante formule de Maimonide. Je vous remercie de me la faire connaître.
    Bien à vous.

  3. blandine dit :

    Bonjour, j’ai plusieurs questions autour de Spinoza et je ne sais pas bien, ni où, ni comment les formuler, je tente quelques chose ici:

    Je trouve assez intrigant que Spinoza ne s’intéresse pas plus à notre origine… en y pensant, la thèse qu’une « force transcendante » doit être au commencement de tout, est assez attrayante. De fait, si tout dépends d’une autre cause il est nécessaire qu’il en ait une première ; car si chaque cause est indéfiniment reportée sur une seconde cela signifie qu’il n’y en a aucune et par conséquent que rien ne pourrait advenir. Cette cause première doit avoir son principe en elle-même ; elle est donc d’une autre nature (que la logique terrestre, puisque que sa cause efficiente n’est pas distincte de ce qui est produit), ce qui nous amène à penser quelle est de nature surnaturelle. Donc il y aurait deux réalités: naturelle et surnaturelle ou transcendante.

    Pour savoir si l’on peu réellement parler de Dieu, dans le sens d’une puissance surnaturelle dotée d’attributs et de fonctions spécifiques qui peuvent influencer la vie des hommes, et d’où découlerai le culte.

    Il faudrait étudier les rapports entre la cause première, la nature et les Hommes.

    D’abord il s’agit de déterminer si cette force possède une morale. Si elle agit intentionnellement cela indiquerai une finalité: la finalité permettant de discerner le bien (ce qui s’y rapproche) et le mal (ce qui s’en éloigne), c’est-à-dire une morale. Comment faire pour savoir il y a intention dans l’acte premier de la cause?

    Poser un acte créateur, fondamentalement cela nécessite un choix…. oui mais pour qu’il est un choix il est nécessaire d’avoir un certain degré de conscience… une conscience du monde. L’action se fait tjrs par rapport au monde, et à tjrs un sens par rapport à lui, ce qui peut faire penser qu’il y a bien une finalité: nous tendons tous vers un certain bien. Quand à la nature, elle cherche à se perfectionner, à s’adapter aux besoins -Darwin- donc d’avancer aussi vers un certain bien. À moins que ce soit nous qui déterminons cela comme un bien? Mais qu’est ce que c’est le bien, le bon… persévérer dans son être, ça me parait très égoïste.

    Je ne sais pas si l’on peut parler de morale, mais il y a un sens, une finalité.

    Ensuite, il faut savoir si cette force a un impact sur nous. Est ce qu’une providence existe? Du point de vue de la nature des choses, le système de Spinoza me parait très probable; chaque chose ayant une place dans l’ordre du monde. Je suis d’accord pour penser que le hasard n’existe pas vraiment. Le hasard vient du fait qu’une chose est en puissance à différents états. Un stylo peu rouler, tomber, se briser, fuir etc. très grossièrement, il suffit d’avoir un cause A pour obtenir une conséquence 1, 2 ou 3. Le hasard c’est la probabilité que tel chose arrive: s’il y a du vent mon stylo roulera probablement, tombera peut être ou même se brisera. On ne sait pas parce que nous ne possédons pas toutes les données qui permettent de prévoir les conséquences d’une cause sur une chose.
    Mais nous, sommes nous construit exactement de la même façon? Nous avons tout de même un certain contrôle, une volonté, ce n’est pas qu’illusion.

    Là se pose la question du déterminisme. Est-ce que nous possédons une « vrai » liberté de choix? C’est à dire que nous ne sommes pas uniquement le fruit d’un système de causes et effets incontrôlables. Comment puis-je être sure que mes décisions ne résultent pas inconsciemment de faits antérieurs? D’abord il semble que l’expérience du choix elle-même, le fait d’hésiter entre plusieurs choses montre que nous ne sommes pas prédéterminés. mais il est vrai que choisir ne veut pas dire que notre volonté s’exerce de façon purement arbitraire, il y a des motifs et des mobiles et nous pouvons ne pas toujours être conscient de ces dispositions. Mais même avec des motivations plus ou moins conscientes, nous avons l’expérience d’avoir à choisir! Ce n’est pas tout fait!

    Plus fondamentalement, nous pouvons voir aussi qu’il ya deux sortes d’inclinations en l’homme: sensible, portée vers le plaisir et liée à des déterminations concrètes, non libres et une inclination à une réalité absolue, sans limite… Qu’on pourrait appeler « volonté » et qui de sa nature même ne porte pas sur un objet particulier et n’est donc pas déterminée dans son passage à l’acte par sa nature. C’est à elle de se déterminer; aucun objet particulier ne la nécessite… pour cela il vaut prendre du recul vis-à-vis de ses désirs, faire preuve de tempérance et de prudence.

    Le problème de l’immanence soulève aussi la question du désir: j’ai toujours en tête l’idée platonicienne que le désir découle de notre imperfection lié au fait que nous somme le fruit d’une force transcendante et que donc nous avons (ou avons eu) une certaine connaissance de cette force puisque nous en sommes les descendants. Plus concrètement, comme le pense Freud, Lacan etc. que nous gardons en nous un souvenir de complétude lié à notre vécu de nourrisson qui une fois l’expérience de la réalité et de ses contraintes faite, nous laisse une certaine nostalgie, un manque qui nous pousse à désirer. Mais dans ce cas là, le désir vient de l’extérieur dans le sens ou il y est tjrs question de l’autre dans mon désir.

    Je ne comprends pas comment, si Dieu, la Nature est immanent, il peut y avoir du manque en l’homme. Qu’est ce que ça signifie immanent. Si l’homme est à l’origine de lui-même, il serait parfait comme un cercle platonicien. Mais l’homme dépend tjrs de l’autre pour naitre. Comment Spinoza explique cette imperfection? Est ce qu’il est juste de penser qu’il y a désir que parce qu’il y a manque?

    Toujours à propos d’immanence, je ne comprends pas bien pourquoi l’idée d’un « Dieu immanent » est elle si critiqué par l’Église? Bien sur le Dieu de Spinoza n’est pas un Dieu révélé, il est la Nature. Mais si Spinoza conçoit la substance (Dieu, la Nature) comme présent en chaque homme; cela ne veut pas dire que l’homme est Dieu. Spinoza a bien conscience que la connaissance de Dieu, la nature est difficile à atteindre; on le comprend particulièrement lorsqu’il traite des 3 niveaux de connaissance dans l’Ethique. Mais alors, qu’est ce qu’apporte la transcendance par rapport à l’immanence?

    En fait c’est parce que pour Spinoza il n’y a qu’une seule substance infinie, divine en ce sens, et ce que nous voyons sont les modes finis de cette unique substance. Sa pensée peut donc se caractérise comme un monisme? Tout ce que nous distinguons (il ne dirait pas en effet que l’homme est Dieu, mais une « manifestation ») n’est qu’une modalité de cette réalité unique. Ce n’est donc pas tant qu’il pense que Dieu est présent en l’homme, qui est critiquable, c’est que c’est la seule réalité; et de plus une réalité totalement impersonnelle (la nature) n’exprimant qu’un ordre de pure nécessité. Il n’y a pas de finalités pour lui… mais comment on peut concevoir ça… le perfectionnement de la nature, c’est une finalité!?

    Donc pour Spinoza, tout l’effort de l’homme, comme mode fini, c’est de rejoindre la compréhension de cette nécessité qui régit tout… ce qui l’appelle la sagesse? Mais est ce que ce n’est pas, un peu contradictoire avec ce caractère totalement impersonnel de la nature-divinité…?
    Alors que la transcendance signifie qu’il y a une consistance propre aux deux termes que sont la force première et l’homme. Chacun est autre que l’autre, radicalement différent, même. Certes l’homme dans son existence est créé par cette force première (qui à pour fruit la nature et les hommes) il en dépend sous ce rapport, mais comme différent de lui avec une réalité qui lui est propre. Ce qui n’est pas du tout le cas chez Spinoza. Ce rapport de transcendance peut commencer à être envisagé dès que l’on commence à reconnaître qu’il n’y a pas qu’une seule réalité. L’esprit humain sait via leurs propriétés que les choses que nous connaissons ont tous une nature propre. Elles peuvent sans doute exprimer une unité d’ordre dans leur coordination et dépendance mutuelle, mais elles sont radicalement différentes du point de vue formel. Sinon il serait impossible de rendre compte de toutes les différences substantielles que nous constatons. Ce qui semble être sur c’est qu’une pure causalité matérielle ne peut à elle seule rendre compte de cette diversité. La multiplicité des êtres nécessite une cause efficiente distincte de ce qui est produit…

    Merci pour toutes les réponses ou avis que vous m’apporterez,
    Sur ce sujet, avez-vous des lectures à me conseiller?
    Cordialement.

  4. Simone MANON dit :

    Je ne peux que vous conseiller de lire Spinoza en vous aidant d’un commentaire. Celui de Deleuze par exemple.
    Cela vous permettra de comprendre :
    qu’une philosophie de l’immanence exclut par principe l’idée de transcendance,
    que chez Spinoza le désir connote puissance d’être, non manque d’être
    que l’idée de finalité est pour lui une illusion anthropomorphique
    que l’idée de libre arbitre est une pure illusion, il n’y a que de la nécessité, les notions d’appétit, de désir, de volonté désignant le conatus rapporté soit au corps, soit à l’âme
    que Spinoza définit une éthique (avec les notions de bon et de mauvais ou d’utile) et non une morale (celle-ci implique les notions absolues de bien et de mal) etc.
    Vous pouvez exploiter sur ce blog l’article: ni rire, ni pleurer mais comprendre.

  5. blandine dit :

    vos remarques sont tres pertinantes et me permettent de mieux saisir les points que je ne maitrise pas encore. merci, je n’avais pas remarqué cet article, tres bien ecrit… je lirais le commentaire de deleuze.
    hum… un petit regret de ne pas vous avoir comme professeur!

  6. Mélissa dit :

    Bonjour Madame,

    Je tiens à vous féliciter quant au travail que vous effectuez à travers ce site, signe de votre générosité et de votre grand professionnalisme.
    Merci pour tout cela, et mes meilleurs voeux pour l’année 2011! Bonne continuation surtout.

  7. Simone MANON dit :

    Merci Mélissa et à mon tour de vous souhaiter une bonne année 2011. Réussite scolaire et épanouissement personnel.

  8. Mélissa dit :

    Merci.

  9. MAZTALERZ dit :

    Bravo pour l’ensemble de vos cours, exposés et réflexions.

    Par pitié, continuez à nous émerveiller.

    Cordialement. Jean Michel

  10. Simone MANON dit :

    Merci pour ce sympathique message.
    Bien à vous.

  11. Mathieu dit :

    Merci pour ce très bon article !

    Une question cependant : si j’ai bien compris, on est libre au sens de Spinoza lorsqu’on agit selon la nécessité de sa nature, et on « subit » moins si on parvient à trouver les causes qui nous déterminent nécessairement.
    Mais alors, s’il n’y a aucune contingence, Spinoza est-il fataliste ? Celui qui, séduit par les idées lumineuses de Spinoza, cherche les causes de ses passions et affects le fait également par nécessité. De même que celui qui n’y parvient pas, n’a pas le choix d’y parvenir ou non. Le fait d’adhérer à cette philosophie, ou d’y travailler du moins, n’est pas non plus une décision libre (au sens courant).

  12. Simone MANON dit :

    Non, le nécessitarisme spinoziste n’est pas un fatalisme, c’est paradoxalement une philosophie de la liberté. Pourquoi? Parce que nous avons le pouvoir, en déployant la puissance de la raison, de comprendre la nécessité des choses. Par cette aptitude, nous nous affranchissons en partie de l’aliénation passionnnelle, des idées et des désirs insensés, mais cette capacité ne se déploie pas en nous sans nous. Il s’agit d’une action, non d’une passion et nous ne la mettons pas en oeuvre parce que, selon votre expression « nous sommes séduits » par des idées ou des êtres (plan du passionnel), mais parce que nous actualisons notre nature d’être de raison.
    Par là nous agissons selon notre nécessité propre et cela change tout. Puissance libératrice de la connaissance: elle nous permet d’échapper à la contrainte de certaines causes extérieures dont l’ignorant est le jouet, elle rend possible l’intelligence de notre utile propre et donc l’expression de notre désir sous une forme heureuse. En termes spinozistes, elle nous dispose à rechercher ce qui nous augmente et à fuir ce qui nous diminue.
    Voyez le cours sur le désir.https://www.philolog.fr/le-desir-comme-puissance-detre-spinoza/

  13. Mathieu dit :

    Merci pour votre réponse.

    Mais je n’arrive toujours pas à saisir un chose : ce « pouvoir », cette « aptitude », cette « puissance de la raison », cette « capacité » de comprendre la nécessité des choses, de s’affranchir des passions n’échappe elle-même pas la nécessité. Nous, individus, l’avons ou ne l’avons pas. Non ?
    Nous actualisons notre nature d’être de raison en développant cette aptitude. Mais l’individu qui ne l’actualise pas ne le fait pas par un libre décret, de même que celui qui l’actualise. Cette « action » dont nous avons besoin pour nous affranchir de l’aliénation passionnelle semble, tel que je le comprends, échapper à la nécessité. Dit autrement, y a-t-il un moyen d’aider l' »ignorant » à ne plus l’être ? Ou sa nature est-elle d’être ignorant et de ne pas en avoir même conscience de l’être, quoi que nous lui enjoignons de faire ?

    Je lirai en tout cas avec plaisir le post que vous me suggérez.

  14. Simone MANON dit :

    Au fond, votre question revient à comprendre comment l’homme passe de la passivité ou de la servitude passionnelle à l’action ou à la liberté. Je ne peux que répondre : par une nécessité intérieure à sa nature et aussi par l’effet de causes extérieures.
    -Par une nécessité intérieure à sa nature car la raison est présente de façon structurelle dans tous les hommes. Elle est une modalité du conatus ou de l’effort pour persévérer dans son être mais il est vrai que sous ce rapport il y a une grande différence entre le sage et l’ignorant. La compréhension rationnelle est difficile et seul celui qui comprend vraiment éprouve du plaisir (=est auto-affecté positivement). Peut-être est-ce à ce niveau que la différence entre les uns et les autres se creuse, ce qui est déterminant, car il ne s’agit pas de croire que Spinoza conçoive la libération des passions comme l’effet d’un pouvoir de l’entendement (ou des représentations) sur les affects. Seul un affect peut vaincre un autre affect. Autrement dit, il faut un affect plus puissant que celui que l’on veut réduire pour avoir barre sur lui. Or c’est le cas des affects « nés de la raison ». Ils sont plus puissants que les affects passifs et c’est par leur médiation que s’opère la sortie de l’affectivité passionnelle.
    Manière de dire que lorsqu’on comprend rationnellement, on s’auto-affecte de joie, et cela est le signe qu’on exerce la puissance de notre nature. Mais les hommes n’exercent pas ordinairement cette puissance car ils vivent sous l’emprise des passions. Spinoza ne rate jamais une occasion de souligner ce fait (cette nécessité) et fustige ceux qui font profession de déplorer l’impuissance des hommes. Cf. l’article: https://www.philolog.fr/ni-rire-ni-pleurer-mais-comprendre-spinoza/

    – Par des causes extérieures : certains événements déterminent ceux qui les subissent à faire l’effort de comprendre mais aussi l’immersion dans un contexte éducatif, culturel amène certains à développer une aptitude que d’autres, dans d’autres contextes n’actualisent pas. Reste que lorsqu’on a fait l’expérience de la joie de comprendre, on ne revient plus en arrière.

    C’est l’expérience que je vous souhaite. Ainsi découvrirez-vous que la liberté va de pair avec la puissance de l’entendement et que celle-ci est la condition de la vie heureuse.

  15. Mathieu dit :

    Vraiment merci beaucoup pour prendre le temps de développer ainsi vos réponses !

    J’ai beau essayé de comprendre, je tombe toujours sur le problème suivant (qui vient peut-être d’une mauvaise définition de ma part de la nécessité (une possibilité dont la non-actualisation est impossible)) : si tout arrive par nécessité, alors le fait (ou l’action) même de comprendre l’est aussi. Autrement dit, j’étais déterminé par nécessité à parvenir à cette compréhension (puisque c’était ma nécessité intérieure).
    Dans la philosophie spiniziste, j’ai l’impression que celui qui arrive à la « liberté » s’est en quelque sorte « arraché » à un certain déterminisme, qu’il l’a surmonté. Alors qu’il n’a fait que suivre sa nécessité intérieure aidée par des causes extérieures, elles-mêmes parfaitement nécessaires. A moins que celles-ci soient contingentes. Auquel cas, je comprendrais.

  16. Simone MANON dit :

    Lorsqu’on a un problème de compréhension, la meilleure chose à faire est de lire et relire l’auteur et aussi des commentateurs autorisés.
    Ainsi comprendrez-vous que dans le système de Spinoza il n’y a pas de contingence. Tous les phénomènes sont régis par les lois naturelles. L’homme ne fait pas exception à la règle mais avec lui les choses sont plus complexes car il a la capacité de comprendre la nécessité passionnelle grâce à son entendement. Il n’est donc pas condamné à la subir. Mais ne pas subir la nécessité passionnelle ne signifie pas échapper à la nécessité car si une conduite ne relève pas de la nécessité passionnelle, elle relève de la nécessité rationnelle comme j’ai essayé de vous l’expliquer dans le dernier post.
    Il me semble que votre incompréhension tient au fait que vous confondez nécessitarisme et fatalisme.
    Bien à vous.

  17. Mathieu dit :

    Vous avez raison de me remettre à ma place.
    Effectivement, je ne parviens pas à concevoir un nécessitarisme qui ne soit pas un fatalisme. Que la nécessité soit passionnelle ou rationnelle, je ne vois pas de différence, elle reste nécessité, même si l’une semble plus « subie » que l’autre.
    Je retourne donc aux bouquins pour démêler l’écheveau.
    merci encore pour votre disponibilité et encore bravo pour ce site !

    Mathieu

  18. Aether dit :

    Chère Madame,

    Je vous réitère mes félicitations pour vos articles qui sont d’admirables synthèses pour aborder les philosophes ou des concepts particuliers d’un philosophe. Sans vouloir abuser de votre temps, je me permets de vous écrire car j’ai une question concernant Spinoza: Je n’arrive pas tout à fait réaliser comment celui-ci arrive à concilier son refus de toute contingence avec son antifinalisme? En effet, pourquoi diantre la Nature- ou Dieu- structure l’Univers de telle ou telle façon si ce n’est sans aucune intention préalable d’une part (pas de finalité), mais selon une stricte nécessité d’autre part (pas de hasard)? A la lumière de la philosophie Spinoziste, on a bel et bien l’impression de vivre dans un monde où tout est organisé, tout à une cause, mais qu’il est paradoxalement absurde puisque Dieu- Nature naturante- le fait sans aucun dessein particulier. Peut-on alors, à l’aune de notre raison, comprendre cette énigme qu’est le monde?

    Bien à vous!

    P.S : Merci encore pour le texte de Gouhier que vous m’avez indiqué, il s’est avéré particulièrement lumineux pour ma compréhension de la bonté naturelle chez Rousseau.

  19. Simone MANON dit :

    Bonjour Monsieur
    Il n’y a aucune antinomie entre le refus de l’idée de contingence et le refus du finalisme. Le propre des sciences n’est-il pas d’expliciter le déterminisme des phénomènes tout en s’interdisant de recourir au principe de finalité?
    Votre difficulté (et conséquemment votre question) procède de l’illusion anthropomorphique dénoncée par Spinoza. Seul peut s’enquérir d’un pourquoi (en vue de quelle fin?) celui qui renverse l’ordre de la nature parce qu’il nourrit des illusions sur sa propre action. Les hommes se croient libres, libres de s’autodéterminer par des fins qu’ils ont le pouvoir de se représenter et en croyant qu’il en est de même pour la nature, et donc que:  » la Nature ne fait rien en vain […], ils semblent avoir uniquement montré que la Nature et les Dieux délirent aussi bien que les hommes » (Ethique, I, Appendice)
    Pour Spinoza, la Nature est une puissance qui se déploie selon sa nécessité propre et c’est là sa perfection. Relisez l’appendice de la première partie de l’Ethique pour bien comprendre cette idée.
    Bien à vous.

  20. Raphaël A. dit :

    Bonjour Madame,

    Après de nombreux passages sur philolog, je me décide enfin à vous écrire pour vous remercier pour tout le temps et le travail que vous consacrez à la transmission de vos connaissances. Votre site est un outil de compréhension et de réflexion précieux et enthousiasmant. Je le parcours toujours avec le même plaisir tant il est rare de trouver sur internet des espaces de pensée nourris avec autant de profondeur, de rigueur dans la restitution des propos, et aussi propres à me montrer l’immense quantité de savoirs que j’ai encore à m’approprier pour parvenir à rendre mes idées ne serait-ce qu’un petit peu plus adéquates …

    Vous m’avez notamment incité à plonger dans le monde passionnant de L’éthique, dont j’ai entrepris la lecture, souvent difficile et parfois décourageante, mais de laquelle je ressors à chaque reprise avec l’impression d’une puissance d’affecter un petit peu augmentée… Illusoire ou pas, l’impression est quoiqu’il en soit toujours agréable !

    Je ne sais pas si cela a un sens de poser une telle question, mais que pensez-vous de Spinoza, quelle place a-t-il pour vous ? Je me trompe peut-être mais j’ai eu l’impression d’une influence kantienne considérable dans la plupart de vos analyses et je me demandais quel pouvait être votre point de vue sur la philosophie de l’immanence de Spinoza.

    Je trouve que la découverte d’un tel système de pensée m’est finalement presque trop révolutionnaire (je parle personnellement, par rapport à la différence entre ma façon de penser avant et après sa lecture) pour que je parvienne à me l’approprier réellement. Ou, plus exactement, n’ayant découvert le monde de la philosophie que trop récemment, l’exercice le plus difficile pour moi est d’arriver à me forger une opinion claire, distincte qui synthétiserait mes lectures. Comment peut-on par exemple arriver à une synthèse (je ne sais pas si le mot convient..) entre Kant et Spinoza dont les lectures font toutes deux naître en moi la même intuition de me trouver en présence d’une forme supérieure de vérité, et qui pourtant diffèrent en des points fondamentaux ? Face à la critique kantienne implacable de la relativité, comment peut-on appréhender une phrase comme « nous ne désirons pas une chose car elle est bonne mais nous la jugeons bonne car nous la désirons » ?

    Au final, cela revient peut-être un peu à demander comment l’on peut passer d’une connaissance du second genre à une connaissance troisième genre… (d’une connaissance technique à une réelle appropriation intuitive) Je suppose que la réponse se trouve d’une manière ou d’une autre dans le travail (patience et courage..), et si c’est le cas, votre site est en tout cas un formidable outil pour tenter d’y parvenir.

    Je vous souhaite une excellente continuation et merci encore, si j’avais eu la chance d’avoir un professeur tel que vous lors de ma scolarité en secondaire, peut-être aurais-je pris une autre voie, mais notre philosophe hollandais ne regarderait sûrement pas d’un bon œil cette tonalité empreinte de regret, alors je m’arrête là… et me remets au travail !

    Bien cordialement,
    Raphaël.

  21. Simone MANON dit :

    Bonjour Raphaël
    Votre message m’émeut et je vous en remercie.
    Mon travail est le travail modeste d’un professeur s’efforçant de mettre à la portée d’élèves débutants certains monuments de la pensée. J’ai fait des choix en fonction de la nature de mon public et aussi de ma familiarité avec les auteurs. Par exemple, j’ai remarqué qu’il est très difficile en classe terminale d’adopter une perspective rigoureusement spinoziste. Cela tient, me semble-t-il, à la nature systématique de la philosophie de l’auteur. Il faut être à l’intérieur ou alors on passe à côté de la puissance de cette pensée. Il faudrait imposer les premières pages de l’Ethique comme des vérités premières, ce qui ne va pas de soi dans un enseignement où l’on apprend que la conscience de son ignorance (ironie socratique, doute cartésien, critique kantienne) est la première vertu de l’esprit philosophique.
    J’ai éprouvé cette difficulté avec toutes les philosophies systématiques, par exemple avec Hegel aussi.
    Pourtant j’avais fait mon travail de fin d’études supérieures sur Spinoza. Je m’étonne donc moi-même de ne pas lui avoir accordé une place proportionnée à la fréquentation que j’ai de son oeuvre.
    Je constate que vous avez une idée pertinente de l’importance conférée à Kant dans philolog. C’est que le kantisme donne, à mes yeux, autant que le spinozisme, la mesure de ce que peut la puissance de réflexion d’un génie.
    Dans les deux cas, nous avons rendez-vous avec une certaine manière d’affronter les grandes questions qui travaillent l’esprit humain. Chacun, à sa façon, nous éclaire. Mais avec la philosophie, nous nous heurtons à du problématique qui résiste. C’est dire que chaque penseur enrichit notre conscience des apories. Aucun ne les fait disparaître. Et il ne faut pas dire que les grands auteurs se contredisent car la contradiction suppose qu’on envisage les choses sous le même rapport. Or la force des grands auteurs est de nous présenter chacun une perspective originale de telle sorte que la vérité se trouve davantage, à mes yeux, dans l’intégrale de toutes les petites différences que chacun incarne que dans une vérité partielle exclusive des autres. Bref, j’ai tendance à penser qu’avec les vrais philosophes, on circule dans le champ du possible, celui qu’ouvre dans sa réalité énigmatique, le fait de penser. Le voyage proposé est exaltant, chaque chemin ayant son intérêt. La seule différence que je reconnaisse est la même qu’en matière de chefs- d’oeuvre artistiques. Tous n’ont pas la même puissance d’ouverture de l’horizon. Il y a du plus et du moins dans la force de l’intuition directrice.
    Je ne comprends pas pourquoi vous faîtes de Kant « un critique implacable de la relativité ». N’est-ce pas l’auteur qui a ruiné la prétention aux vérités absolues de la métaphysique et établi la dépendance de nos savoirs à la structure de notre esprit?
    Bien à vous.

  22. Raphaël A. dit :

    Bonjour Madame,

    Merci beaucoup ! Je vous suis reconnaissant pour votre message qui répond très clairement à mon interrogation (qui n’était pourtant pas très claire, elle…). Par ailleurs, ayant été élève, je comprends la difficulté que représente pour un professeur de parvenir à capter l’attention avec des systèmes tels que celui de Spinoza. Effectivement, je sens moi-même que l’âge, le temps, et les lectures me permettent progressivement d’appréhender des œuvres et univers de pensée que j’aurais vraisemblablement rejetés auparavant et/ou dont je n’aurais pas su tirer profit.

    J’ai trouvé votre troisième paragraphe saisissant, je n’avais jamais pensé à mettre parallèle les différences entre les systèmes philosophiques avec la variété des émotions provoquées par des œuvre artistiques sous le prisme de « la puissance d’ouverture d’horizon ». Ni peut-être suffisamment compris que la philosophie doit être vue comme un ensemble de points de vue qui coexistent et s’enrichissent mutuellement plus qu’ils visent à se détruire.

    En ce qui concerne votre question, j’ai sûrement écrit un peu vite.. J’avoue avoir abordé Kant sans suffisamment bien le connaître. Mes lectures se limitent à La préface de la critique de la raison pure, quelques cours, et au livre de Georges Pascal sur La pensée de Kant. En réalité, j’ai été troublé par la lecture de la proposition de Spinoza sur le fait que le jugement bon/mauvais était une conséquence de notre désir, et non l’inverse. Je me suis dit que si l’on élargissait la portée de cette phrase à un plan moral (ce qui n’est peut-être pas pertinent …) cela signifiait quelque part qu’il n’y aurait pas de sens à prétendre imposer une morale universelle. Pour moi, cela venait contredire la concrétisation d’un impératif catégorique kantien qui impose de ne pas se contredire et permettait d’établir des principes moraux précisément universels à partir de là, comme le tu ne tueras point … J’avais l’impression qu’après Kant, il était difficile de prononcer des phrases comme « tout est relatif » puisqu’il existe des critères de jugement absolus du point de vue moral. En revanche du point de vue des objets de la croyance (ce qu’il ne m’est pas permis de connaître) c’est bien le relatif qui prime puisqu’il ne m’est pas permis de savoir si oui ou non Dieu existe et que je suis donc libre d’avoir mon opinion sur son existence.
    Mais en faisant ce parallèle, j’ai peut-être effectivement mélangé des théories qui partaient de perspectives différentes et dénaturé les deux propos…

    Bien à vous,

    Raphaël

  23. Simone MANON dit :

    Bonjour Raphaël
    Il ne faut pas vous sous-estimer, votre expression et votre pensée sont très claires. Fuir tout ce qui diminue dirait notre philosophe… L’humilité n’est pas une vertu.
    Pour ce qui est de Kant et de Spinoza envisagés sous l’angle de la morale, vous avez raison. Pour l’un il y a bien une morale universalisable, pour l’autre il n’est pas question de morale mais d’éthique. Même si pour Kant il est impossible de définir un bien moral, il y a un impératif catégorique. Alors que pour Spinoza il faut substituer aux notions absolues de bien et de mal, celles de bon et de mauvais puisqu’il n’y a que des essences singulières.
    Pour ce qui est de la philosophie, il ne faut pas considérer mon jugement comme parole d’évangile. De nombreux philosophes ne seraient pas d’accord avec moi. Mais c’est ainsi que je me projette vers les auteurs. Chaque grande philosophie est une architectonique, avec sa cohérence interne, sa puissance d’intelligibilité. Notre finitude doit nous rendre modestes. Nous ne pouvons accéder au point de vue de Sirius permettant d’éliminer certaines constructions intellectuelles au profit d’autres. Alors, dans les limites qui sont celles de chacune, chaque philosophie nous rend plus intelligents. Cela n’exclut pas que nous nous sentions plus en consonance avec certaines qu’avec d’autres.
    Bien à vous.

  24. Gauthier dit :

    Bonjour Madame,
    Je trouve vos articles très intéressants et vous remercie pour la publication sur internet de votre travail. Je suis professeur de philosophie et je cherche à approfondir la question de la maîtrise de soi dans le spinozisme. Votre article s’arrête juste au moment qui m’intéresse malheureusement ! Le problème est le suivant : Spinoza dit à la fois que la prise de conscience est libératrice, mais aussi qu’un affect ne peut être combattu que par un autre affect. Or une prise de conscience n’est pas un affect. On peut reprendre presque tous les affects de la 3ème partie de l’Ethique, aucun ne peut se maîtriser, comme vous le dites, par une « prise de conscience intellectuelle ». C’est évident par exemple pour le désir sexuel, mais ce serait la même chose pour les autres. Par exemple, nous connaissons tous des gens qui savent qu’ils ont tendance à se mettre en colère tout en ne parvenant pas à changer, à se calmer quand ils le souhaitent ; de même pour ce qu’on appelle la « susceptibilité », l’amour-propre, l’envie, la jalousie etc. Ainsi, ma question est la suivante, je serais très heureux que vous ayez le temps d’y répondre (en restant dans le spinozisme ou en sortant de cette philosophie) : en quoi, concrètement, la prise de conscience ou la connaissance peuvent-elles nous donner un plus grand pouvoir sur les affects ? N’y a-t-il pas contradiction dans le spinozisme entre le pouvoir de la connaissance et l’idée que seul un affect peut réduire un autre affect ?

    Bien cordialement

  25. Simone MANON dit :

    Bonjour cher collègue
    Non, il n’y a pas de contradiction car la raison a la capacité de s’auto-affecter. Voyez ma réponse à Mathieu du 5 août 2011.
    Voyez la définition III de Ethique III.
     » Par sentiments, j’entends les affections du corps, par lesquelles la puissance d’agir de ce corps est augmentée ou diminuée, aidée ou contenue, et en même temps les idées de ces affections » et surtout la suite: « Si donc nous pouvons être cause adéquate de quelqu’une de ces affections, j’entends alors par sentiment une action; dans tous les autres cas, une passion ».
    Je me permets de vous conseiller pour clarifier les choses l’excellent petit livre coordonné par Christian Lazzari: Spinoza, puissance et impuissance de la raison, PUF, débats philosophiques.
    Bien à vous.

  26. christophe dit :

    Bonjour Madame,
    vos cours sont très clairs et on sent chez vous le souci permanent de la méthode pédagogique. C’est un vrai bonheur que de voir le cheminement de la pensée en acte, c’est probablement ce que Spinoza aurait qualifié d’affect qui augmente notre puissance d’agir et de joie.
    S’il est vrai que de vous suivre est en lui même un plaisir , il n’en reste pas moins que c’est votre raisonnement et que ce n’est pas le mien en propre. J’ai décidé de reprendre à mon compte et faire mon miel de toutes ces réflexions. Aussi , je me permets de vous solliciter pour garantir ou invalider ce que je vous soumets comme étant une synthèse des rapports entre liberté, nécessité et joie chez Spinoza.
    le premier point concerne l’articulation entre la liberté et la nécessité. Spinoza s’oppose à la liberté conçue comme libre arbitre , c’est à dire la faculté qu’aurait chacun d’entre nous de pouvoir se déterminer dans un choix tout à fait librement ( même si des causes peuvent être déterminées , elles ne sont en aucun cas déterminantes) . Chaque choix est un choix absolu. A cette liberté refusée, Spinoza oppose un déterminisme .En ce sens , chaque choix que je décide est considéré comme un effet d’une ou pluralité de causes qui le déterminent , elles mêmes effets de causes antérieurs les ayant produites , etc etc…
    Autrement dit , à partir du moment ou mon choix s’actualise , il ne pouvait être que nécessaire. Il était impossible que ma décision fût autre et si j’invoque mon libre arbitre en soulignant que le choix était contingent , Spinoza rétorquerait que c’est une illusion et qu’en fait j’ignore les causes l’ont déterminé.
    Pour autant , Spinoza evacue t’il la liberté de choix dans un système entièrement déterminé? Qui peut imaginer combien cette question a pu me travailler?
    Aussi ,ai -je du reprendre la question de la liberté. On peut résumer la notion de liberté à trois occurrences . La liberté d’action , celle qui dit  » je fais ce que je veux ». Suis-je libre de faire ce que je veux ? oui dans la limite ou ma volonté ne se confronte pas à des contraintes qui la réduirait .Brièvement, c’est la liberté politique qui pourrait être differemment formulée : ma libérté s’arrête là ou commence celle des autres.
    La liberté, dans un autre sens, est celle qui pose la question de savoir si je suis libre de vouloir ce que je veux? Celle qui nous fait dire « je veux ce que je veux » ne me semble pas problématique .Spinoza ne s’oppose pas à ces deux formulations de liberté ( Les 2 traités , d’ailleurs sont là pour faire advenir cette liberté au sens politique). Ce que récuse Spinoza , c’est la liberté , au sens du libre arbitre . Pour reprendre l’analogie , c’est celle qui nous permettrait d’être libre de ne pas vouloir ce que nous voulons? Cette liberté métaphysique ferait de l’homme ‘un empire dans un empire ‘ ce qui est contraire à l’anthropologie spinoziste.
    Ma liberté de vouloir et d’agir restent intactes. Reste , que je ne suis pas libre de ne pas vouloir ce que je veux car c’est s’opposer à la nécessité de ma nature qui veut que chaque choix soit déterminé par des causes et non pas par mon absoluité.
    Là , ou cela devient génial , c’est quand Spinoza nous dit que la raison humaine suit la même nécessité que l’ordre naturel. Autrement dit , si j’exerce mon propre entendement ( et je suis libre de le faire puisque je suis libre de faire et de vouloir ce que je veux) je peux comprendre la nécessite en oeuvre et passer d’un état passif ( celui ou je subissais les passion extérieures) à un état actif (état dans lequel je me trouve plus libre car je comprend la nécessité et je peux vouloir que ces passions m’affectent moins). J’évite ce que jusque là j’avais ressenti , c’est à dire la contradiction performative qui consiste ici à dire que si d’un coté je ne suis pas libre mais déterminé , comment puis -je affirmer de l’autre côté retrouver ma liberté pour décider de faire le choix de comprendre ) . Ma liberté c’est de comprendre la nécessité , elle ne me rend moins libre qu’elle ne me libère.
    Le deuxième point est l’articulation entre la compréhension de la nécessité et la joie.
    Spinoza ne nous dit pas que comprendre la nécessité en nous nous permet d’augmenter notre puissance d’être mais que la connaissance des causes génère un affect

  27. christophe dit :

    désolé , une erreur de manipulation sur mon clavier a envoyé trop tôt mon message.
    je reprends en voulant souligner que l’affect ainsi généré est un affecte de joie et qu’il est plus fort qu’un affect de passion qui vient diminuer notre puissance.
    Je termine simplement en voulant simplement dire ceci : si nous voulons vivre mieux et nous libérer de nos névroses , actualisons comme vous savez si bien le faire notre pouvoir de raisonnement.

  28. Simone MANON dit :

    Bonjour
    Merci de votre sympathique appréciation de mon site.
    Pour ce qui est de votre raisonnement, les points suivants me semblent problématiques:
    -La volonté ne rencontre pas que des contraintes extérieures. Le déterminisme intérieur existe aussi. Votre première définition de la liberté n’est donc guère recevable.
    -Ce que vous voyez dans la proposition suivante. Il me semble qu’une analyse de la volonté, en terme spinoziste s’imposerait ici. Elle est l’effort pour persévérer dans son être en tant qu’il est rapporté à l’esprit seul. Soit ce qui la détermine est l’affect et dans ce cas le sujet agit sous l’empire des passions et révèle sa servitude, soit elle est déterminée par la raison et alors, elle est libre au sens spinoziste: non pas libre-arbitre mais libre nécessité (Cf. J’appelle libre l’être qui agit selon la nécessité de sa nature).
    -Y a-t-il sens à dire dans une philosophie de la nécessité que l’exercice de l’entendement s’origine dans un choix ou que « je suis libre de vouloir ce que je veux »? Voyez ma réponse à Mathieu du 5 août 2011.
    En exerçant mon entendement, c’est-à-dire en comprenant adéquatement l’ordre des choses, je m’auto-affecte de joie et je vis en accord avec les autres et le monde.
    Bien à vous.

  29. hugoboxel dit :

    bonjour Madame
    pourriez vous m’éclairer sur une contradiction que je n’arrive pas à lever? Comment se fait il que Spinoza puisse à la fois nier le libre arbitre et affirmer dans l’incipit du Traité de la réforme de l’entendement  » je décidai enfin de chercher le bien véritable…. » , comme s’il s’agissait d’une décision libre et volontaire . Je n’arrive pas à voir ici autre chose qu’une contradiction performative.
    merci pour votre éclairage

  30. Simone MANON dit :

    Bonjour
    Pourquoi voulez-vous que l’idée de décision connote celle d’une volonté libre au sens du libre arbitre ? Il me semble que c’est ce présupposé qui vous égare.
    La volonté et l’entendement sont une seule et même chose pour notre auteur. Voyez Ethique II, proposition 49. La volonté n’est rien d’autre qu’une volonté singulière et « Dans l’esprit, il n’y a aucune volition, autrement dit aucune affirmation ou négation à part celle qui enveloppe l’idée, en tant qu’elle est idée ». La décision spinoziste de rechercher s’il n’existe pas un bien véritable ne fait qu’affirmer ce qu’enveloppe (nécessairement) l’acte d’ avoir compris que « tous les événements de la vie sont vains et futiles et que tout ce qui était pour moi cause ou objet de crainte ne contenait rien de bon ou de mauvais en soi, mais dans la seule mesure où l’âme en était émue ».
    Souvenez-vous que pour Spinoza « L’effort (conatus) par lequel chaque chose s’efforce de persévérer dans son être n’est rien en dehors de l’essence actuelle de cette chose » Ethique, III, proposition 7.
    « Cet effort, quand il se rapporte à l’esprit seul, est appelé Volonté » scolie, proposition 9. Tout être s’efforce de persévérer dans son être, aussi bien celui qui a des idées claires et distinctes que celui qui a des idées confuses. Dans un cas, la volonté est l’expression de la nécessité rationnelle, dans l’autre, de la nécessité passionnelle.
    Voyez comme au début du traité, Spinoza confesse les hésitations ayant précédé sa détermination. C’est qu’il n’avait pas encore compris clairement en quoi consiste le bien suprême et ne l’ayant pas encore compris, il imaginait pouvoir accomplir son projet sans une transformation radicale de sa vie. D’où ses échecs : « Je l’ai souvent tenté en vain » avoue-t-il. Mais dès lors qu’il comprend rationnellement qu’on ne peut faire son salut sans une conversion de l’existence, cette compréhension enveloppe nécessairement le choix de la solitude, le renoncement à la vie mondaine et aux intérêts constituant l’horizon de ceux qui sont privés de la claire intelligence du vrai bien.
    J’attire votre attention sur l’insistance avec laquelle il pointe le rapport de sa décision et de son intellection. Ex : « Voyant que tout cela était un grand obstacle à ma nouvelle entreprise »…. « Mais avec un peu plus d’attention, je trouvai »…. « En réfléchissant plus longtemps, je fus convaincu »…. « A la réflexion, ces maux me semblèrent »… « Après que le vrai bien me fut de plus en plus connu »….
    Bien à vous.

  31. fugier annie dit :

    Chère Madame, je vous avais déjà écrit sur le stoïcisme et vous avez eu la gentillesse d’orienter mes lectures, j’ai donc lu Sénèque en « live » et d’autres de même…
    Puis je me suis intéressée à Spinoza qui m’a édifiée, moi qui suis assez débutante en philo.
    J’ai lu que cette « science » aide à mieux vivre…
    J’ai notamment appris que cet homme sage et frugal, qui mettait en pratique ses écrits en vivant sobrement et simplement, disait que si on se croit « déterminé » par la nécessité, tout devient plus facile en somme : cela m’a déculpabilisée et ça a fait tilt en moi : Si, en effet, on n’a pas eu de choix réel dans nos actions passées, qu’on s’est trompés, cela est dû au fait
    qu’on avait parfaitement le droit de ne pas savoir, et qu’on pourra faire mieux dans une expérience future. On aura pas plus de choix mais on aura l’expérience en somme.
    Il n’est pas contre le libre arbitre, mais il est limité par la nécessité naturelle, la nécessité divine si j’ai bien compris sa pensée.
    Sa nécessité fait loi de vie. Donc on n’a plus à se culpabiliser, on atteint la liberté quand on comprend qu’il n’y a pas de réelle liberté dans l’univers : on se sent léger quand on sait combien on peut être lourd et assujetti aux règles naturelles auxquelles on ne peut déroger.
    Fini l’homme libre tout puissant qui se croit tout permis et au-dessus de la création, bonjour
    à l’homme sage qui accepte le destin et trouve sa liberté dans cette même soumission intelligente et subtile.
    Ai-je bien compris la pensée spinoziste mécréante ?
    Si oui, c’est un sacré poids de malheur en moins, on peut s’améliorer sans cogiter sur nos erreurs passées à l’infini, on peut devenir plus heureux dans notre absence de liberté qui nous libère de nos chaînes, o paradoxe infini !
    Merci d’une éventuelle réponse à ce mail un peu fou, je cherche la sagesse, folle que je suis !
    Du moins, à mieux vivre pour qu’autour de moi, on vive mieux.
    Bravo pour vos textes : quelle bonne idée que ce cours de philo ouvert et passionnant !
    Merci encore d’être là.
    Bien à vous, annie.

  32. Simone MANON dit :

    Bonjour Annie
    Je ne suis pas sûre que la pensée spinoziste soit bien comprise.
    Spinoza théorise la possibilité d’un salut par la connaissance. Celui qui comprend par le déploiement de sa raison l’ordre des choses se libère:
    – des passions tristes. Par exemple, il voit, comme vous le soulignez, la vanité du repentir.
    -de la servitude passionnelle. C’est ce point qui me semble un peu confus dans votre propos. Parce que nous sommes un élément d’une totalité, nous sommes exposés à subir l’action sur nous de causes extérieures. Ce qui s’appelle une passion. Mais nous ne sommes pas condamnés pour autant à en être le jouet (servitude) car « une passion cesse d’être une passion sitôt que nous en formons une idée claire et distincte ». Autrement dit nous pouvons nous affranchir de la nécessité passionnelle en la comprenant afin de penser et d’agir non plus selon une nécessité extérieure à notre nature mais selon la raison. Pour Spinoza le libre-arbitre est une illusion (votre propos sur ce point est erroné) mais cela ne signifie pas que nous sommes privés de liberté. Comme je l’explique dans ce cours, la liberté s’oppose à la contrainte. Libre celui qui agit selon la causalité de sa raison (nécessité intérieure à sa nature) et non plus selon la nécessité passionnelle. Il ne faut donc pas parler « d’absence de liberté » dans le spinozisme.
    -cette éthique suppose tout sauf la soumission et la complaisance à l’égard de ses faiblesses car le déploiement des ressources rationnelles est action pure.
    Tous mes vœux d’accomplissement dans votre recherche de la sagesse.
    Bien à vous.

  33. fugier annie dit :

    Chère professeur,
    Je vois que j’ai encore du travail pour saisir le fond de la pensée spinoziste ! Il fait de la « psychanalyse », celui-là ! Il me faut donc le décortiquer mieux pour saisir sa substantifique
    moëlle… Je crois qu’il faut que j’étudie ses écrits surtout face aux passions, cela m’aidera
    à comprendre ses discours sur la liberté humaine et le libre arbitre, débat qui fait rage aussi chez d’autres philosophes et chez l’être humain en général !
    Quoiqu’il en soit, je peux dire qu’il me donne des pistes pour me sentir mieux face à mes responsabilités, être trop consciencieux n’est pas une solution non plus dans la vie, il faut aussi savoir s’abandonner aux forces nécessitées par la nature universelle, tout en raisonnant, ouh la la … Travailler sur la notion de « raison » et de « passion » : j’ai du pain sur la planche pour « ressentir » et « lire » Mr Spinoza !
    Merci encore ! Au boulot !

  34. Simone MANON dit :

    Bonjour Annie
    L’appropriation de la pensée de Spinoza est une œuvre de longue haleine et très difficile comme c’est le cas en général les philosophies développant un système.
    Pour clarifier la notion de liberté voyez https://www.philolog.fr/liberte-le-probleme-metaphysique/
    Bien à vous

  35. Fugier annie dit :

    Ah, Madame, j’en viens et je l’ai imprimé pour mieux étudier. Quand je pense qu’en terminale, la philo m’a complètement échappé et que, vers les 60 ans, je suis en train de la redécouvrir avec une soif pas possible… En fouinant sur votre site que j’adore mais qui demande un travail de réflexion intense, j’ai lu qu’il va falloir aussi que je me penche sur Kant ! J’ai un énorme travail à faire sur la notion de culpabilité, qui a pourri ma vie. Et là, pouf, voilà que de grands hommes pensent la liberté et l’absence de libre arbitre, (une sorte de libération intérieure: je me sens aidée !), mais pourquoi parle-t’on si peu de philosophie et de grands penseurs afin de nous épanouir ? Pourquoi a-t’on relégué cela pour une « élite » alors que cela fait travailler l’esprit dans l’ouverture et le respect ?
    Les religions, le développement personnel à la mode, la médecine psychologique : on nous en rabat les oreilles, mais de philo, point ou si peu ! Mais quel dommage !!!!
    Pardonnez cette diversion, mais là, il fallait que je vous le dise en un grand merci.
    Bien à vous, sincèrement.
    Annie, libre penseuse étudiante de nouveau.

  36. C An dit :

    Bonjour,
    Madame vous citez le freudisme en courant philosophique. Or mon professeur nous a conseillé de ne pas citer Freud comme une autorité. Je me demandais pourquoi.
    Merci pour ses cours à la disposition de tous !

  37. Simone MANON dit :

    Bonjour
    Freud n’est pas un philosophe. C’est un savant. Dans le cadre d’une pratique, il a étudié les mécanismes du psychisme humain, donnant naissance à la psychanalyse. https://www.philolog.fr/freud-ou-lhypothese-dun-inconscient-psychique/
    Il n’est donc pas une « autorité » philosophique, mais dans sa réflexion, le philosophe ne doit pas ignorer les travaux des hommes de science. En ce sens, Freud a conduit la philosophie à renouveler son discours sur l’homme, au besoin en montrant les faiblesses du freudisme.
    Votre professeur a sans doute dû vous mettre en garde contre la tentation de faire fonctionner Freud comme une autorité intellectuelle c’est-à-dire comme un savant dont les résultats des recherches seraient indiscutables. Ce qui n’est évidemment pas le cas. La question de savoir si la psychanalyse est ou non une science est en grande partie élucidée. Ce n’est pas une science mais l’hypothèse freudienne, pour autant qu’elle reste une hypothèse (le contraire d’un dogme) garde sa fécondité pour la réflexion philosophique.https://www.philolog.fr/la-critique-de-lanalyse-freudienne/
    Bien à vous.

  38. Aneketan dit :

    Merci, madame de me permettre ce rêve interdit dans ma jeunesse : un cours de philo avec un prof bondissant et des camarades vivant. J’ai soixante douze ans et suis bien déterminée a ne pas en perdre une miette. Oh ! Et c’est le déterminisme et mon cher Spinoza qui m’ont amenée a vous et mes sympathiques compagnons de blog.
    Je retourne a mes lectures avec une dimension nouvelle.
    Merci à tous.

  39. Simone MANON dit :

    Bonjour Madame
    Il n’est jamais trop tard pour philosopher, disait Epicure, car il n’est jamais trop tard pour être heureux.
    C’est ce que je vous souhaite de tout cœur.
    Bien à vous.

  40. hugoboxel dit :

    bonsoir Madame,
    il y a une chose que je n’arrive toujours pas à saisir ; Spinoza nous dit que seul un affect peut agir sur un affect ; en l ‘occurence un affect nait de la raison l ’emporte sur un affect issue des passions. Je prends un exemple : je suis fumeur et je voudrais m’arrêter; j’ ai une connaissance adéquate de l ‘origine de mon addiction et de ce que provoque la fumée et la nicotine sur mon corps , cela génère un affect de stopper la cigarette , soit ! Mais comment se fait il que je n y arrive pas ;
    Je vois le meilleur et pourtant je continue à faire le pire ,disait Saint augustin reprenant Saint Paul. Comment se fait il ici qu une connaissance adéquate des causes et le désir que j’éprouve d’arrêter se révèle infructueux ?
    Merci pour votre réponse

  41. Simone MANON dit :

    Bonjour
    Il est périlleux de s’appeler Hugo Boxel quand on veut comprendre Spinoza!
    Peut-être ne voyez-vous pas que votre compréhension reste purement théorique comme c’est le cas avec de nombreuses connaissances. Un affect est tout autre chose. Comprendre vraiment, chez Spinoza, consiste à développer une puissance (celle de la raison) par laquelle on s’auto-affecte de joie. Affect lui-même puissant et donc capable d’agir sur l’affect dont on cherche à se libérer. Seule l’expérience vécue permet de faire la différence.
    « Je vois le meilleur mais je fais le pire » disait Ovide. Spinoza soulignerait que dans ce cas le sujet n’a pas une connaissance adéquate du bien, seulement une vague idée sans impact sur son être parce qu’elle ne procède pas du déploiement de la puissance de sa raison.
    Si vous vous placez sur le plan des affects, il faut dire que votre désir de fumer est plus fort que votre désir d’arrêter et il en est ainsi parce que vous n’avez pas encore compris vraiment quel est votre utile propre.
    Bien à vous.

  42. Hugoboxel dit :

    Madame, je vous remercie pour votre réponse . Je savais que le clin d oeil à mon pseudonyme ne vous echapperait pas . Vous avez raison de me corriger , la référence venait bien d ‘Ovide et non de de Saint Augustin. Comment comprendre ce que pourrait être mon utile propre defini comme ce qui serait mon bien une fois pour toute en partant de l idee que chez SPinoza , il n y a pas de « je » – comme unité stable-qui pense mais plutot l affirmation superieure en chaque instant d une idee ou d une volition ( puisque c ‘est la meme chose pour lui) résultant d’ un conflit d’affects dans lequel celle -ci se serait imposée. Bien à vous

  43. Simone MANON dit :

    Bonjour
    Mais pourquoi voulez-vous que la compréhension de son utile propre soit étrangère au hic et nunc? On n’actualise pas la puissance de sa raison une fois pour toute comme si l’existence se déployait hors du temps. C’est à chaque instant qu’il est possible de vivre sous la catégorie de l’éternité, autrement dit dans la joie de la vérité et de la liberté.
    « Chacun a le pouvoir de se comprendre lui-même et de comprendre ses affects d’une façon claire et distincte sinon totalement, du moins en partie, et il a par conséquent le pouvoir de faire en sorte qu’il ait moins à les subir » Ethique V Prop.4, scolie, affirme Spinoza.
    Chacun a le pouvoir de comprendre ce qui l’augmente, à tel moment de sa vie, ou ce qui le diminue afin de chercher l’un et de fuir l’autre. Il est possible, en ne vous en tenant pas seulement à une connaissance du premier genre, de prendre conscience que la nicotine altère votre teint, produit l’essoufflement que vous ressentez dans l’effort et compromet à terme votre bonne santé. Si donc vous persévérez dans une conduite qui vous diminue, cela tient au fait que votre compréhension ne procède pas de la puissance de votre raison. Elle est seulement un écho de ce que vous entendez dire.
    Bien à vous.

  44. Allan dit :

    Bonjour Madame Manon,

    Je m’apprête à vous faire part d’une nouvelle interrogation. J’ai, il faut bien l’avouer, besoin d’aide pour éclairer ma pensée. Socrate en conviendrait, le dialogue est la solution.

    Si l’on admet l

  45. Allan dit :

    Veuillez m’excuser, une erreur de manipulation a causé l’envoi de mon message.

    Je reprends :

    Si l’on admet la liberté telle qu’elle est décrite par Spinoza, on rejette l’idée de morale absolue et universelle telle qu’elle est décrite par Kant au travers de l’impératif catégorique. Leur position respective semblent opposées. Je dis « semblent » car la place que nos deux auteurs accordent à la raison, qui elle est universalisable, me pousse à penser que d’une manière ou d’une autre, leur position se rejoignent. Pourriez-vous me dire si je suis dans l’erreur ? Si non, pourriez-vous alors m’aider à établir la liaison entre nos deux auteurs ?
    Sartre semble résoudre le problème de la liberté et de la morale. En proclamant l’homme libre et sans essence, il le pousse à s’autodéterminer. Par là même, Sartre met l’homme face à sa responsabilité dans les choix qu’il fait et les actes qu’il engage. Le bonheur est alors l’affaire de chacun et de tous à la fois, car, précise-t-il, en agissant l’homme s’engage mais engage aussi l’humanité toute entière. Profondément humaniste, cette position semble concilier liberté et morale. Qu’en pensez-vous ?
    Cependant, je dois reconnaitre que la morale kantienne, bien que rigoriste (j’ai lu votre article sur la citation de Péguy à propos du kantisme), est la seule qui semble avoir une valeur universelle. Suis-je dans l’erreur de penser que Spinoza et Sartre laisse place au relativisme moral ? Spinoza nous dit que la raison nous conduit vers ce qui nous augmente. Qu’en est-il, si, en toute rigueur, un individu parvient à nous prouver que la cruauté (qui semble pourtant tout sauf raisonnable) l’augmente ? Sartre nous dit que l’homme engage en permanence l’humanité toute entière. Certains combats sont menés au nom de l’humanité toute entière. Pourtant, il ne suffit pas de se réclamer de l’humanité pour être légitime. Ma réflexion peut alors se résumer en cette question : les philosophies de Spinoza et de Sartre ne sont-elles pas teintées de bonnes intentions ?

    Merci par avance.

  46. Simone MANON dit :

    Bonjour
    Il n’y a guère de sens à vouloir opposer des auteurs dont les analyses sont totalement hétérogènes. Vos propos témoignent d’une connaissance confuse des philosophes cités. Par exemple, je ne vois pas le rapport entre le thème sartrien de la liberté ou l’éthique spinoziste et le soupçon que les choix de la personne en restent au plan des bonnes intentions. Je ne peux donc répondre à des questions si peu pertinentes.

    Pour Kant la liberté est conçue comme libre arbitre, pour Spinoza, le libre arbitre est une illusion. L’homme libre est celui qui agit selon la nécessité de sa nature, autrement dit, la liberté est liée à la puissance de l’entendement permettant à chacun de comprendre son utile propre. L’utile définit le bon c’est-à-dire l’idée de « convenance en nature ». Par exemple, « à l’homme rien n’est plus utile que l’homme ».
    Ce n’est donc pas parce que l’éthique spinoziste disqualifie les notions absolues et universelles de bien et de mal au profit de celles de bon et de mauvais, d’utile et de nuisible, (« La musique est bonne pour le mélancolique, mauvaise pour qui éprouve de la peine, mais pour le sourd elle n’est ni bonne ni mauvaise » Ethique IV. Préface), qu’il faut en conclure qu’on a affaire à un relativisme moral. On parle d’éthique (de la liberté et de la joie) et non de morale en raison de l’absence de commandement inconditionnel et de l’attention portée à la singularité des êtres. Mais la recherche par chacun de « son utile propre » coïncide avec « l’utile commun » et fonde la moralité.
    Voyez bien que la compréhension adéquate de ses affects n’a rien à voir avec des déclarations imaginaires, comparables à celles que vous envisagez avec celui qui prétendrait être augmenté par la cruauté. La rationalité chez Spinoza renvoie non seulement aux démarches de l’entendement mais aussi au désir en tant qu’il peut avoir une idée adéquate de lui-même et conséquemment poursuivre son utile propre. En ce sens, il est un désir actif ayant cessé d’être passionnel. C’est par cette compréhension que l’homme affirme son être dans sa perfection et cesse d’être un loup pour l’homme. Le salut est, pour Spinoza, dans la compréhension rationnelle de l’ordre des choses et non dans un imaginaire pouvoir d’une faculté morale sur les passions.
    Quant à Sartre, il y a de nombreux articles sur ce blog sur le thème de la liberté.
    https://www.philolog.fr/la-liberte-de-letre-en-situation-dans-le-monde-sartre/
    https://www.philolog.fr/liberte-et-obstacles/
    https://www.philolog.fr/etre-en-situation-dans-le-monde-sartre/
    https://www.philolog.fr/lexistentialisme-et-la-liberte-merleau-ponty/
    Bien à vous.

  47. Evelyne Blanchard dit :

    Bonjour,
    Après avoir lu votre texte j’ai eu envie de prendre quelques notes pour moi-même, en complément de l’extrait de la lettre à Schuller et d’un passage de Gilles Deleuze. Au risque d’arriver comme un cheveux sur la soupe dans la discussion qui précède dont j’ai seulement lu quelques lignes, je fais un copié-collé en guise de commentaire.
    Bien cordialement,
    Evelyne

    Cf. Deleuze. Cours de Vincennes 25/11/1980
    http://www.webdeleuze.com/php/sommaire.html

  48. Simone MANON dit :

    Bonjour
    Je vous remercie pour la référence à Deleuze.
    J’ai supprimé le reste de votre copier-coller car vos notes manquaient trop de cohérence.
    Bien à vous.

  49. Evelyne Blanchard dit :

    c’est dommage que vous n’ayez pas gardé au moins l’extrait du cours de Deleuze.
    je le remets 🙂
    et pour répondre à Allan la »puissance d’agir » de Spinoza est un concept très proche de celui de « vertu » dans le Tao Te King.
    cordialement

    « Spinoza arrive. Il a été précédé sans doute par tous ceux qui avaient plus ou moins d’audace concernant la cause immanente, c’est-à-dire cette cause bizarre telle que, non seulement elle reste en soi pour produire, mais ce qu’elle produit reste en elle. Dieu est dans le monde, le monde est en Dieu. Dans l’Éthique, je crois que l’Éthique est construite sur une première grande proposition qu’on pourrait appeler la proposition spéculative ou théorique. La proposition spéculative de Spinoza, c’est: il n’y a qu’une seule substance absolument infinie, c’est-à-dire possédant tous les attributs, et ce qu’on appelle créatures, ce ne sont pas les créatures, mais ce sont les modes ou les manières d’être de cette substance. Donc, une seule substance ayant tous les attributs et dont les produits sont les modes, les manières d’être. Dès lors, si ce sont les manières d’être de la substance
    ayant tous les attributs, ces modes existent dans les attributs de la substance. Ils sont pris dans les attributs.
    Toutes les conséquences apparaissent immédiatement. Il n’y a aucune hiérarchie dans les attributs de Dieu, de la substance. Pourquoi? Si la substance possède également tous les attributs, il n’y a pas de hiérarchie entre les attributs, l’un ne vaut pas plus que l’autre. En d’autres termes, si la pensée est un attribut de Dieu et si l’étendue est un attribut de Dieu ou de la substance, entre la pensée ou l’étendue il n’y aura aucune hiérarchie. Tous les attributs auront même valeur dès le moment où ils sont attributs de la substance. On est encore dans l’abstrait. C’est la figure spéculative de l’immanence. C’est ça que Spinoza va appeler Dieu. Il appelle ça Dieu puisque c’est l’absolument infini. »
    Gilles Deleuze

  50. Simone MANON dit :

    Bonjour
    Puisque vous semblez y tenir…
    Bien à vous.

  51. Evelyne Blanchard dit :

    Merci !
    Bien à vous.

  52. imd dit :

    Très bon topo !
    Merci

  53. Kurosawa dit :

    Bonjour,

    Il semble que votre article ait servi de source à cette vidéo (https://youtu.be/5q3pRZSsHr8), je voulais donc vous prévenir si vous n’étiez pas au courant, et surtout vous demander de partager votre avis dessus, si vous le voulez bien. 🙂 Il se trouve que j’ai été assez surpris et même un peu énervé de voir qu’une vidéo destinée à faire de la vulgarisation se basait sur un texte qui se suffisait à lui même tant il me semble accessible (mais non moins profond, ce que cette vidéo ne partage pas avec lui, à mon humble avis). Donc, qu’en pensez vous ?

  54. Simone MANON dit :

    Bonjour
    Rien ne fonde votre affirmation.
    Le jeune homme de la vidéo explique l’idée de déterminisme chez Spinoza à partir du texte de l’auteur même si c’est sous une forme qui m’insupporte.
    Bien à vous.

  55. Kurosawa dit :

    En fait je fonde mon avis sur l’ensemble de ses vidéos plutôt que sur celle ci en particulier, que j’aurais d’ailleurs dû revoir avant d’en parler de cette façon. Une autre chose, c’est que l’auteur affirme chercher à faire une introduction à la philosophie, ce qui expliquerai pourquoi son travail me paraît si creux. Bref, je suis content que vous ayez prêté assez d’importance à mon commentaire pour y répondre, et je vous souhaite une bonne journée. 🙂

  56. Arnaud dit :

    Madame,

    Je tenais en premier lieu à vous féliciter et vous remercier pour la qualité de votre site, et le travail que cela représente. J’ai lu certains des textes que vous proposez au sujet de la liberté, dont celui-ci. Ils sont très éclairants, mais je me posais cette question, peut-être naïve: s’il faut renoncer à la liberté comme libre arbitre, et si la liberté est la nécessité comprise et agie en connaissance de cause, cette liberté a-t-elle une valeur moindre, sur le plan philosophique ou métaphysique? Ne remet-elle pas en cause un peu de la dignité de l’être humain, même si celle-ci est illusoire? Et s’il faut renoncer au libre arbitre, ce renoncement peut-il s’avérer dangereux, politiquement ou juridiquement? En vous remerciant, sincères salutations (un juriste de formation)

  57. Simone MANON dit :

    Bonjour
    Merci pour l’appréciation positive que vous faîtes de mon blog.
    Disons que la conception de la liberté comme nécessité comprise est une conception paradoxale mais rien n’interdit de fonder la dignité humaine sur la capacité, que l’homme ne partage avec aucun autre animal, de comprendre rationnellement l’ordre des choses. Les stoïciens faisaient de la raison humaine une parcelle de la raison divine.
    On peut, à la manière spinoziste, fonder la république démocratique et le droit pénal sur la recherche par chacun de son utile propre.
    https://www.philolog.fr/libertedeterminisme-la-question-epineuse/
    Bien à vous.

  58. Hypatie dit :

    Bonjour,

    Comme beaucoup de commentateurs , je suis attiré par la philosophie de Spinoza qui met le désir au centre de la nature humaine et j’ai aussi souvent feraillé avec cette définition paradoxale que Spinoza nous donne de la liberté. Il y a des conférences en ligne que Misrahi consacre à Spinoza et qui m’ont aidé à y voir plus clair, en tout cas je crois, et que j’aimerais faire partager si vous les jugez pertinentes. Je cite à partir de mes notes :

    1) Misrahi rappelle « qu’on a fait trop souvent passé Spinoza pour un philosophe du déterminisme et on a oublié qu’au 17ème siècle le déterminisme est pour Spinoza est un instrument de LIBERATION contre la superstition ou la magie. » La connaissance rationnelle de nos déterminismes est donc déjà une forme de liberté par la prise de conscience que l’on peut en faire. « le but de la philosophie de Spinoza n’est donc pas d’écraser l’homme sous le poids du déterminisme, il veut au contraire l’exalter et le libérer. »

    2) « On lui prête souvent la naïveté de croire qu’en connaissant nos affects, on peut agir sur eux, or il sait très bien que non. » Mais si Spinoza récuse le principe du libre abitre il pense « qu’on peut combattre un désir par un désir plus grand, moteur d’action donc pour changer nos vies. »
    C’est donc par la connaissance de nos actions dont nous sommes les causes adéquates (= dont nous sommes la cause principale) qu’on manifeste sa liberté, et cette liberté nous conduit par la définition qu’en donne Spinoza vers la joie.

    3) « Pour Spinoza il n’y a pas de désir inconscient » un affect étant défini comme un sentiment accompagné de l’idée de sa cause.

    4)Enfin de manière Misrahi rappelle « qu’il faut lire Spinoza à partir des définitions que Spinoza nous donne de ses concepts, sans vouloir plaquer par avance nos propres définitions de la liberté, du désir ou de Dieu. » Ce qui parle à un professeur de Mathématiques!

    Encore merci de nous faire partager le travail de toute une vie.

  59. Simone MANON dit :

    Bonjour
    Merci pour votre contribution.
    J’ai effectivement dû batailler sur ces points dans la réponse à certains internautes dans les commentaires précédents que vous pouvez retrouver en cliquant sur commentaires plus anciens.
    Bien à vous.

  60. […] Qu'est-ce que cela vous inspire ? Jean-Claude Michéa : N'exagérons rien ! Le magazine de François Pinault a d'ailleurs bien pris soin – sans doute pour brouiller un peu plus les pistes – d'inclure également, dans sa liste noire des «néoconservateurs à la française», des personnalités telles que Régis Debray, Arnaud Montebourg, Natacha Polony, Benoît Hamon ou Yves Cochet. J. ENTRETIEN AVEC JEAN-CLAUDE MICHEA. Alain Badiou : la question du possible dans notre société sécuritaire. » Liberté et nécessité. Spinoza. […]

  61. Claire dit :

    Bonjour et merci pour votre site. J’ai un problème. Si le libre arbitre est une illusion, d’où vient la volonté de connaître nos déterminisme afin de nous en libérer? Certains sont-ils condamnés par leur nature à rester dans l’illusion ? Qu’est-ce qui permet la réflexion qui libère ? Alain Badiou parle de l’événement pouvez-vous m’expliquer ? Merci d’avance

  62. Claire dit :

    Une nouvelle question: la position de Spinoza ne consiste-t-elle pas au bout du compte à affirmer que le libre arbitre existe bien mais que sa réalisation effective suppose un long travail de désillusion et de libération? Merci

  63. Simone MANON dit :

    Bonjour
    Nous sommes ainsi faits que nous avons la capacité de réfléchir notre expérience et d’essayer de comprendre ce que vous vivons. Ex: Lorsque vous êtes triste, vous en avez conscience et vous pouvez vous demander ce qui est en cause dans cette expérience. Idem pour la totalité de nos vécus. Inutile, pour rendre raison de cette capacité de postuler un quelconque libre arbitre. Mais immédiatement votre compréhension est déterminée par vos affects. Vous avez donc une idée inadéquate de ce qui vous fait souffrir. Une autre expérience peut vous conduire à prendre conscience de votre erreur et à comprendre rationnellement les choses.
    Pour ce qui est du libre arbitre, il faut éviter de soupçonner les grands auteurs de contradiction. Spinoza ne supprime pas la liberté mais celle-ci est définie comme libre nécessité, non comme libre arbitre, deux conceptions qui sont inconciliables. https://www.philolog.fr/liberte-le-probleme-metaphysique/
    Bien à vous.

  64. Claire dit :

    Merci de votre réponse ! Cependant je reste perplexe. Qu’est-ce qui détermine certains à rester bloques dans dans une connaissance inadéquate tandis que d’autres parviennent à une connaissance adequate? Excusez mon insistance !

  65. Simone MANON dit :

    Bonjour
    Spinoza ne conçoit pas la connaissance rationnelle comme une connaissance abstraite. Chez lui rationalité et affectivité ne sont pas distinguées. C’est donc au cœur de notre vie affective que se joue la servitude ou la liberté, ou en termes spinozistes l’activité ou la passivité.
    Dans l’affect de tristesse, la puissance d’agir est diminuée, dans l’affect de joie, la puissance d’agir est augmentée et cette puissance est indistinctement celle du corps actif et de l’esprit dont l’activité consiste à comprendre adéquatement ce qui la réjouit.
    Or la compréhension rationnelle est elle-même cause d’une augmentation de son être, autrement dit de joie. En comprenant adéquatement nous nous auto-affectons de joie de telle sorte que plus nous comprenons plus nous aimons comprendre.
    Seul donc un affect plus fort qu’un autre peut nous libérer du premier, seule l’expérience de l’activité peut nous affranchir de la servitude liée à la passivité.
    Souhaitons que votre année de philosophie soit pour vous cette expérience indistinctement affective et rationnelle de liberté. Selon Spinoza, si vous comprenez vraiment, il ne pourra pas en être autrement.
    Bien à vous.

  66. Sacha dit :

    Bonsoir Madame,
    Dans son Traité politique Spinoza emploie l’expression « Droit de nature ». Je cite le paragraphe 4 : « Par droit de nature, j’entends les lois mêmes ou règles de la Nature suivant lesquelles tout arrive, c’est-à-dire la puissance même de la nature. Par suite le droit naturel de la Nature entière et de chaque individu s’étend jusqu’où va sa puissance (…) » etc.
    Pourquoi l’appeler un droit? Existe-t-il une autre traduction? cette expression rend la lecture du texte un peu plus difficile.
    Merci

  67. Simone MANON dit :

    Bonjour
    Il n’y a pas de faute de traduction. La conception spinoziste du droit naturel ne s’inscrit pas dans la tradition du jusnaturalisme dans la mesure où chez lui la Nature est prise dans son sens naturaliste et non pas comme chez les théoriciens du droit naturel comme ordre transcendant ou Raison. https://www.philolog.fr/droit-naturel-et-droit-positif/
    Le droit naturel procède donc des lois de la nature, des rapports de puissance réels entre les individus. Le droit naturel de chacun, en tant qu’il est un élément de la substance, s’étend jusqu’où s’étend sa puissance. Cf. La réponse de Spinoza à Jarig Jelles:  » Vous me demandez la différence qu’il y a entre Hobbes et moi quant à la politique. Je réponds en ce que cette différence consiste en ce que je maintiens toujours le droit naturel et que je n ‘accorde dans une cité quelconque de droit au souverain que dans la mesure où par la puissance il l’emporte sur eux: c’est la continuation de l’état de nature ».
    Bien à vous.

  68. Halfresh dit :

    Bonjour,

    me renseignant quant aux pensées de Spinoza, j’en viens à me poser cette question: si l’homme est déterminé en tous points par toutes les/ses actions préalablement vécues, sa compréhension de ces causes est elle-même déterminée ! En ce sens, comment pouvons nous agir volontairement (ce qui implique un choix, donc une liberté) selon notre nécessité et non sous la « contrainte » ?

    D’avance merci et bravo pour cet article des plus intéressants !

  69. Simone MANON dit :

    Bonjour
    La vie affective n’est pas condamnée à être passionnelle et par conséquent nous ne sommes pas condamnés à produire des idées confuses. Voyez ma réponse à Dominique du 4 février 2017 dans le cours: le désir comme puissance d’être.
    Bien à vous.

  70. Pique dit :

    Bonjour et merci de nous faire partager votre travail.

    Puisqu’il est possible de vous laisser des commentaires, je me permets de vous poser les questions suivantes :

    Imaginons que je désire fumer une cigarette, et que je la fume. Cet acte est bien le fruit de mon désir qui est lui-même le produit de la « nécessité de fumer ».

    Imaginons maintenant que je désire toujours fumer une cigarette, mais que je désire aussi arrêter de fumer. Au désir de fumer une cigarette vient s’opposer le désir de ne pas fumer la cigarette. Aussi, y a t-il un désir et une contrainte ou deux désirs ? Comment savoir ?

    Et imaginons que dans un premier temps que la force du désir de « ne pas fumer de cigarette » est supérieure à celle du désir de « fumer la cigarette », puis que, finalement, j’allume et fume une cigarette. Que dire de mon désir. A-t-il changé, ou est-ce la nécessité qui a changé modifiant par la même occasion l’objet de mon désir ? Aussi, est-ce le désir qui change ou la nécessité ? Ou, ai-je céder ? Auquel cas la contrainte/passion a pris le dessus sur mon désir. Par ailleurs, il peut s’avérer que, malgré tout, je regrette d’avoir fumer une cigarette. Quelle serait alors la nature de ce regret : désir ou contrainte ?

    Ne peut-on pas être à la fois habité par la joie d’avoir joui d’une action et habité par la tristesse de l’avoir réalisée, comme c’est le cas avec le fait de fumer une cigarette quand on souhaite arrêter de fumer ?

    Qu’en pensez-vous ?
    Bien cordialement.
    Pique

  71. Simone MANON dit :

    Bonjour
    Votre première affirmation est confuse. Le désir est déterminé soit par la nécessité d’une cause extérieure, (= désir passif, nécessité passionnelle), soit par la nécessité de sa propre nature, (=désir actif, nécessité rationnelle). Il n’y a pas de sens à parler d’une « nécessité de fumer » en soi.
    Lorsque le sujet hésite entre deux désirs, cela signifie que ceux-ci sont de force égale et dans votre cas de figure, cette expérience atteste que le sujet n’a pas la connaissance claire que son utile propre consiste à ne pas fumer. Il n’en a qu’une compréhension confuse.
    Si la force du désir de ne pas fumer est supérieure à celle de fumer, votre hypothèse est nulle et non avenue.
    L’homme vivant sous l’empire des passions est exposé à des déceptions. Le sujet éprouve de la joie lorsqu’il est actif, c’est-à-dire lorsqu’il comprend rationnellement son utile propre et agit en conséquence (= lorsqu’il vit sous la conduite de la raison). Il n’y a pas de sens à prétendre qu’on puisse être triste d’être actif. Ici, céder au désir de fumer n’est pas une action, c’est une passion. La prise de conscience de sa propre servitude rend effectivement triste.
    Bien à vous.

  72. Pique dit :

    Bonjour et merci pour votre réponse.
    Une dernière question :
    In fine, existe t-il autre chose que la servitude passionnelle ? (puisque aucune idée ou action, même si adéquate, ne peut être revendiquée comme entièrement sienne)
    Car si je peux prendre conscience des raisons qui doivent me faire arrêter de fumer, (par exemple la santé), ces mêmes raisons ne sont-elles pas le produit d’une conception spécifique de la santé, socialement et historiquement construites ?
    Bien cordialement
    Pique

  73. Simone MANON dit :

    Bonjour
    Non, il n’y a pas que de la servitude. Spinoza nous apprend à être libre, grâce à la connaissance rationnelle.
    Vos deux affirmations n’ont rien de spinozistes. Il vous faut lire l’éthique pour le comprendre.
    Voyez ma réponse du 4 février 2017 ici: https://www.philolog.fr/le-desir-comme-puissance-detre-spinoza/
    Bien à vous.

  74. Wild Marie dit :

    Bonjour, Après une longue compréhension de votre article j’essaye de comprendre la thèse principale de Spinoza et comment se justifie t’elle ?
    Parceque Il y’a trop de confusion pour moi .
    Merci à vous de bien vouloir Me répondre

  75. Simone MANON dit :

    Bonjour
    Désolée, je ne pourrais que répéter les explications énoncées dans l’article.
    L’idée générale qu’il faut comprendre est la suivante:
    Spinoza critique de manière radicale l’idée de liberté définie comme libre arbitre.
    Il n’en est pas moins un philosophe de la liberté. Mais celle-ci doit être comprise comme le fait d’agir selon la nécessité de sa propre nature. (Ce qui s’oppose au fait d’agir selon la nécessité d’une cause extérieure à sa nature= le propre des passions)
    Bien à vous.

  76. Driss dit :

    Bonjour.
    Merci pour la clarté de votre synthèse. J’ai l’impression tout de même que la thèse porte une contradiction : puisqu’on agit nécessairement par effet de causes extérieures, l’action même de comprendre nos déterminations est elle même déterminée. Même cette prise de conscience rationnelle, par laquelle on acquiert la possibilité d’agir selon sa propre nature, reste en fait une contrainte contingente (le chemin qui nous mène à la pensée, et à l’intérieur d’elle, n’est pas de notre fait), à moins de supposer que la pensée seule est le lieu de la liberté, d’un libre arbitre acquis par la pensée seule. A ce moment là, la pensée serait « un empire dans l’empire » de la nécessité :/

  77. Simone MANON dit :

    Bonjour
    Non, il n’y a pas de contradiction. La liberté consiste à agir selon la nécessité de sa nature et la nécessité propre à la raison est de comprendre rationnellement l’ordre des choses. Les causes incitant à comprendre rationnellement peuvent être des causes extérieures (la manière dont je suis affecté, autrement dit une passion triste ou gaie), mais l’acte de comprendre obéit à la seule nécessité propre à la raison dès lors que je ne me contente plus d’imaginer mais que je comprends rationnellement. Il n’y a pas de place pour le libre arbitre dans la philosophie spinoziste. C’est de part en part une philosophie de la nécessité.
    Bien à vous.

  78. BeauvG dit :

    Bonjour, merci pour ce blog très instructif.
    Je voulais signaler pour certains commentateurs qu’à propos de Spinoza, il reste légitime de se poser la question d’une contradiction entre l’impossibilité du libre-arbitre (induisant un « déterminisme total » comme le dit Misrahi) et la possibilité même de « rechercher » la sagesse telle qu’elle est décrite dans l’Ethique. Luc Ferry en fait la démonstration brillante dans « La sagesse des anciens » dans le chapitre sur Spinoza (« Un spinoziste cohérent devrait s’en tenir simplement et définitivement à l’idée que certains hommes, très rares, sont sages et d’autres ne le sont pas » Luc Ferry)
    Bien cordialement

  79. Marc Chirade dit :

    Bonjour Madame
    Grand merci tout d’abord pour ce que vous offrez de votre immense travail aux amateurs de philosophie.
    Je suis, à 77 ans, un modeste disciple de Spinoza et votre blog m’aide beaucoup à comprendre ce maitre.
    Ma question concerne la proposition 87 de l’Éthique :
    « L’homme libre ne pense à rien moins qu’à la mort, et sa sagesse est une méditation non de la mort , mais de la vie.
    Les spécialistes de qui j’ai lu sur ce point l’interprètent comme une évacuation de la mort dans les pensées de l’homme libre, à laquelle ils songent le moins possible.
    Il me semble qu’au Spinoza ne pense à rien [qui soit susceptible d’être pensé] moins qu’à la mort [il ne pense donc qu’à la mort, ou tout au moins très souvent, plus souvent qu’à tout autre chose] et [justement] sa sagesse est une méditation [pas un songe ou une pensée évanescente] non de la mort [dont l’idée fugace lui vient plus qu’à toute autre chose] mais [à contrario] de la vie sur laquelle il porte toute son attention.
    Mon interprétation est-elle logique à votre avis ?
    Merci pour votre réponse.

  80. Simone MANON dit :

    Bonjour Monsieur
    Je ne suis pas sûre de bien comprendre votre propos.
    Le spinozisme est une philosophie de la positivité et de la joie. L’important pour le sage est d’affirmer sa vie, d’augmenter son être, ce qui n’est pas compatible avec des pensées inadéquates et des pensées tristes. Or la pensée de la mort est nécessairement inadéquate (pas de représentation possible du non-être) et une manière d’empoisonner la vie avec la crainte, l’angoisse, toute passion triste. Contrairement à toute une tradition philosophique Spinoza fait donc de la sagesse, au sens propre, une méditation de la vie,(de la positivité,de l’affirmation et de l’expansion de l’existence), non de la mort. Il ne faut donc pas dire qu’il ne pense qu’à la mort. Cette affirmation est un contresens.
    Bien à vous.

  81. Marc Chirade dit :

    Bonjour Madame,

    Vous m’annoncez :
    « Je ne suis pas sûre de bien comprendre votre propos »
    J’en avais un peu le pressentiment et je ne voudrais pas trop abuser en insistant.
    Il me semble, cependant, qu’il y a une nette différence entre penser et méditer.
    Une pensée, il me semble, est le fruit de la nature propre de l’être pensant, elle s’impose à lui, malgré lui et peut devenir obsessionnelle. Une méditation est le résultat d’une volonté, d’un désir, celui d’approfondir un sujet, une question.
    Ensuite, interviennent l’émotion face à la pensée puis, éventuellement, la raison au cours de la méditation, si elle a lieu.
    Focalisé sur mon cas personnel – que je suppose assez fréquent chez les seniors – je constate que l’idée de la mort est très fréquente sans pour cela m’affecter de la moindre inquiétude et sans engendrer de méditation particulière à son sujet, faisant mienne la parole d’Épicure dans sa lettre à Ménécée. Par contre, ces pensées fugaces me sont autant de points d’appuis pour jouir de la vie, comme elle se présente et dans toutes ses composantes, justement parce que l’idée de la mort me fait prendre conscience du caractère éphémère de la vie.
    Là où je peine à être en accord avec l’assertion que l’idée de la mort est inadéquate c’est qu’elle fait partie des lois de la nature au même titre que la loi de la gravité, qu’il s’agit d’un fait incontournable qui, de plus, est insensible et ne peut être perçu en tant que tel.
    Dans la proposition 67 (et non 87 indiqué par erreur), ce qui m’interpelle c’est le « à rien moins qu’à la mort »
    Si j’énonce le contraire : « à tout plus qu’à la mort », cela ne signifie-t-il pas que la pensée de la mort arrive au dernier rang de ce qui lui parvient à l’esprit. Donc, « penser à rien moins qu’à la mort » indiquerait que cette présence dans l’esprit est quasiment constante, ce qui ne saurait surprendre quand on connaît les conditions de vie de Spinoza, comme de ses contemporains d’ailleurs.
    Et pour conclure, la raison volontaire permettrait bien de dissoudre la crainte ou la tristesse de la mort annoncée et certaine, si l’on ne se place pas dans une perspective eschatologique.

    PS : je viens d’acquérir votre « Platon » que je souhaite offrir à mon petit-fils, en Master 1 de philosophie et qui a pour sujet de mémoire « la mimésis dans la République de Platon »
    Le lui offrir dédicacé par vous serait une grande joie. Comment pourrais-je procéder, si vous y consentez ?. il m’est possible de me rendre au lycée Vaugelas car j’habite Annonay.

    Avec tous mes remerciements pour votre action.

  82. Simone MANON dit :

    Bonjour Monsieur
    Permettez que je ne discute pas votre message. La compréhension du propos d’un auteur exige d’être fidèle à sa pensée, ce qui implique une connaissance approfondie de celle-ci. Connaissance difficile en ce qui concerne Spinoza dans la mesure où sa philosophie est un système d’une grande rigueur interne. Certaines de vos affirmations sont pleines de bon sens mais elles n’ont rien de spinoziste. Voyez ce site pour éclairer votre lanterne: https://spinoza.fr/lecture-des-propositions-lxvii-a-lxxiii-du-de-servitute/#:~:text=67%20%3A%20L'homme%20libre%20ne,mort%2C%20mais%20de%20la%20vie.&text=La%20%C2%AB%20sagesse%20%C2%BB%20(sapientia),plut%C3%B4t%20que%20sur%20la%20mort.
    Pour ce qui est de la dédicace, je dois vous dire qu’il y a de nombreuses années que j’ai pris ma retraite. Ce ne sera donc pas possible.
    Pour le thème qui occupe votre petit-fils:https://www.philolog.fr/art-et-apparence-hegel/
    Bien à vous.

  83. Marc Chirade dit :

    Bonsoir Madame
    Votre commentaire accentue la conscience que j’ai de mes carences spinozistes et je vous sais grée de les souligner avec tact. Une égratignure d’amour propre est souvent source d’enseignement. 🙂
    Merci pour les adresses que vous avez bien voulu m’indiquer, je vais chercher à en faire bon usage.
    Ce sera néanmoins avec beaucoup d’intérêt que je persisterai dans la lecture de vos articles et leurs commentaires, même si, en partie, ils me passent au dessus de la tête.
    Bien cordialement.

  84. Diana dit :

    Bonjour Madame Manon,
    Je suis entrain de faire un travail de recherche bibliographique en vu de l’écriture d’un article sur la notion de plaisir dans le cadre d’une maladie chronique. Il s’agit d’un article que j’écris en tant que psychologue mais ce sujet me mène naturellement vers des concepts plus philosophiques. J’ai lu avec intérêt vos articles sur Spinoza et cela m’a donné l’idée d’articuler la notion de plaisir à celle de la liberté. Qu’en pensez vous? Dans un premier temps une maladie chronique peut être vécue comme une perte de liberté car très contraignante mais peut on affirmer avec l’aide de la pensée de Spinoza que l’intériorisation des contraintes (qui est peut aussi la vision stoïcienne) peut permettre de (re)conquérir sa liberté et par la même renouer ou nouer avec le plaisir d’être acteur et pas uniquement passif (subir sa maladie)?
    Bien à vous,
    Diana

  85. Simone MANON dit :

    Bonjour Madame
    Il est très judicieux d’articuler les notions de plaisir et de liberté. Ce que Spinoza fait avec brio. Voyez ce texte et son commentaire dans la chapitre XXV consacré à la notion de plaisir.
    https://www.philolog.fr/eloge-du-plaisir-spinoza/
    Bien à vous.

  86. Clément dit :

    Bonjour Madame,
    Merci beaucoup pour votre travail que je découvre seulement aujourd’hui en 2023.
    J’apprécie la clarté de votre propos qui rend accessible à des non philosophes des concepts mais de façon exigeante.
    J’ignore si votre blog est encore actif et si je peux espérer une réponse à ma question.
    Elle concerne Spinoza.
    Grâce aux idées adéquates il nous serait possible de devenir « actif » et ainsi d’augmenter notre puissance non plus au hasard des affections mais de manière constructive.
    Mais, la définition de l’idée adéquate et donc de l’action adéquate qui nous est donnée dans le livre 2 est, il me semble, presque hors de portée puisque c’est l’idée de la chose «en dieu » c’est à dire dans tout sa causalité, causalité qui ne nous est que partiellement accessible puisqu’elle dépend au mieux de nos connaissances ( connaissances fragiles comme bien montrées dans le même livre2) voire de nos intuitions.
    Ces idées adéquates sont-elles seulement possibles ?
    De plus le désir est l’essence de l’homme.
    Il dépend donc de notre nature singulière de notre potentialité à être affecté.
    Nul liberté donc de pouvoir échapper à notre désir.
    Ainsi, si les idées adéquates sont d’élaboration si difficile qu’elles sont fort rares et si le désir ne peut que nécessairement s’exprimer alors ma vie entière ne dépendra finalement que de mon essence singulière et du hasard des rencontres.
    Ce qui ressemble à ce que vous appelez l’expression de la nécessité interne qui s’oppose à la contrainte externe.
    Toutefois Spinoza semble assez confiant dans le fait que l’on puisse grâce aux idées du deuxième voire (si on en est capable) du troisième genre, avoir une influence sur le cours de notre vie.
    D’où mon interrogation.
    Merci beaucoup de me lire et peut-être de me répondre si vous en avez le temps
    Merci quoiqu’il en soit pour ce blog ô combien précieux.
    Bien cordialement
    Bernard Clément

  87. Simone MANON dit :

    Bonjour
    Merci pour l’appréciation positive que vous faites de mon blog.
    Découragée par la profondeur de la régression qui affecte notre civilisation, (en particulier par sa trahison de l’idéal des Lumières tant au niveau pédagogique que politique), j’ai en effet cessé de fournir mon blog. Mais il est tellement fréquenté que je le laisse en ligne et je réponds aux questions qui me semblent pertinentes.
    Vous posez une vraie question. Le salut par la connaissance est si difficile et donc si rare pour Spinoza qu’il admet le principe d’une régulation possible des passions par les croyances religieuses. Certaines obtiennent des hommes les conduites utiles par un autre moyen que l’exercice de la raison.
    Comme l’écrit Jean Lacroix:
    « Il y a selon Spinoza deux voies du salut : la voie par la philosophie qu’expose l’Ethique, la voie par la religion qu’expose le Traité théologico-politique ».

    Pour approfondir cette question voyez ce cours https://www.philolog.fr/ni-rire-ni-pleurer-mais-comprendre-spinoza/ et l’échange avec Laure.
    Bien à vous

  88. Clément dit :

    Bonsoir Madame
    Je vous suis très reconnaissant d’avoir pris le temps de me répondre alors même que vous avez clôt blog.
    Quel dommage d’ailleurs pour vos nombreux lecteurs, mais hélas je comprends votre pessimisme et je le partage (ce qui n’est pas très spinoziste)
    J’ai lu attentivement le cours «ni rire ni pleurer mais comprendre » ainsi que vos longues réponses très argumentées aux questions posées (particulièrement à celles de Laure).
    Il faut donc nous efforcer de comprendre, même en vain, puisque la béatitude est le chemin non le but.
    Tout étant nécessaire, la volonté n’existant pas, peut être aurons nous quelques idées adéquates pour vivre plus joyeusement et en bonne intelligence.
    Je suis toutefois assez surpris en Lisant l’éthique après avoir lu et écouté monsieur Deleuze, par la difficulté du chemin.
    Monsieur Deleuze me paraissait très optimiste quand à la faculté qu’avait la philosophie spinoziste de modifier nos vie.
    Les idées du deuxième genre, à sa lecture ne semblaient pas si inaccessibles.
    Peut-être l’ai-je mal compris .
    En tout cas encore une fois merci
    Le choix du géographe de Wermeer est de très bon goût. Il cherchait certainement a comprendre!
    Bien cordialement
    Bernard Clément

  89. Simone MANON dit :

    Bonjour
    Je partage absolument l’optimisme de Gilles Deleuze quant à la capacité de la philosophie spinoziste de transformer positivement nos vies. il y a un affect de joie lié à la compréhension rationnelle suffisant pour nous affranchir de nombreuses passions tristes. Voyez bien que la difficulté du salut par la connaissance ne se situe pas au niveau de la connaissance du deuxième genre mais à celui du troisième genre.
    Bien à vous.

  90. Clément dit :

    Bonjour madame
    Merci pour votre réponse.
    Elle est en accord avec mon expérience personnelle.
    Je considérais les notions communes de manière trop absolue.
    Il ne faut pas oublier que, bien que fréquemment singulières et imparfaites, elles permettent néanmoins d’échapper aux contraintes des pensées du premier genre.
    Quand au troisième genre je le connaîtrai peut-être mais à 66 ans je ne l’ai encore jamais rencontré.
    Il est vrai que ne lis Spinoza que depuis peu.
    Je vais méditer tout cela.
    Merci encore pour tout votre travail.
    J’explore votre blog au grès de mes pensées et je m’en régale !
    Bien cordialement
    Bernard Clément

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