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Philippe Muray.

 

 
   Son verbe s'est éteint, il y a deux ans (2 mars 2006) et il nous manque, surtout en période de festivité olympique et d'apparition des échassiers urbains destinés, n'en doutons pas, à faire les délices de ceux qui se voient proposer désormais de « planer ». On avait la glisse (les rollers), maintenant on va avoir les joies de l'apesanteur. Je me plais à imaginer les pages que Muray donnerait à lire sur ces nouveaux non-événements dans lesquels s'est abolie, à l'ère postmoderne, l'Histoire. Style inimitable de cet homme de grande culture. Il restera pour moi l'emblème de la résistance de l'esprit à l'air du temps et à son insupportable fatuité. Est-ce la raison pour laquelle il parlait si peu sur la scène médiatique? Les quelques émissions où j'ai pu l'entendre m'ont révélé un homme plutôt silencieux, en décalage avec la logorrhée ruisselante du bavardage ambiant, comme si plus qu'à toutes les autres époques Péguy avait bien vu: « Ceux qui se taisent, les seuls dont la parole compte »(Notre jeunesse). Muray est de ceux-là. Il n'a pas habité son temps par l'écho d'une parole mais par le silence assourdissant de son absence médiatique. Sans doute le fallait-il pour échapper à ce qu'il fustige comme « un idéal néoscolaire de lavage de cerveau ».

  S'il n'a pas été une parole, il fut une écriture et quelle écriture ! Avec lui la littérature peut s'honorer de n'avoir pas démérité de son authentique puissance subversive, ce qui n'est pas un moindre mérite dans un monde où pullulent les « iconoclastes en charentaises » !

 
   Lorsque dans la distance, le silence, et la solitude, il se met à écrire, la parole fuse comme l'exorcisme d'un esprit supplicié par les énormités constituant le quotidien d'une Europe festive ayant, semble-t-il, supplanté la ringarde et non branchée Europe culturelle.
 
Ses vertus majeures, signes de sa réjouissante intelligence :
  • la créativité conceptuelle et l'art de la formule. Ex : Homo festivus, Festivus festivus, Mutins de Panurge, Matons de Panurge, rébellion de confort, touristosphère, festivopolis, despotisme festif, épuration éthique, tout-à-l'ego, carnaval posthistorique, envie du pénal, flicage culturel, normalisation anti-normative.
  •  la description scrupuleuse de ce qui nous tient lieu de réalité. Ex : Ses pages jubilatoires sur la réaction au 21 avril 2002, sur le Mondial de football en 1998, sur l'art contemporain, sur les hordes de rollers déferlant sur les trottoirs, sur la fête de la musique, les raves ou « ce bon nihilisme de teufeurs qui consiste à patauger dans la boue en convoquant le monstre chtonien », « en redécouvrant les transes d'un état sauvage de l'humain ou les turbulences d'un nouveau stade infantile de l'espèce » etc.
 
   S'il faut écrire : « ce qui nous tient lieu de réalité », c'est que le propre du monde hypermoderne est de faire disparaître le réel sous l'enflure d'un discours médiatique exhibant sans scrupule la bonne conscience de sa certitude et de son innocence. Lecteur attentif du journal Le Monde, Libération, des revues d'art branché, observateur infatigable des nouvelles mœurs confondant dans une indifférenciation généralisée ce que l'exercice de la raison a toujours distingué : le réel et le fantasme, le temps de la fête et celui du travail, le monde des enfants et celui des adultes, les ennemis réels et les ennemis imaginaires etc. Philippe Muray excelle dans le talent de nous confronter à la plus grande entreprise de déni du réel qui n'ait jamais été, entreprise dont nos contemporains sont les acteurs enthousiastes à défaut d'en être les témoins ahuris. Le réel ayant disparu, le grand art est donc de dévoiler ce qui en tient lieu désormais, de le laisser se dire en utilisant les guillemets pour faire apparaître son extravagance et son comique.« Ce qu'elle (notre époque) a de pire ne peut littéralement pas s'inventer : il faut la laisser en parler, lui ouvrir sans cesse des guillemets. Mettre l'époque entre guillemets dans l'espoir qu'elle voie ce qu'elle dit et qu'elle entende ce qu'elle fait est bien plus qu'une activité critique ; c'est, à mes yeux, un projet esthétique. » Propos recueillis par Frédéric Saegen et Frédéric Dufoing en janvier 2004.  
 
   L'œuvre est importante depuis son premier roman ; Chant pluriel (1973) , ses études remarquées sur Céline (1981), et le XIX° siècle à travers les âges (1984) jusqu'aux derniers textes : Exorcismes spirituels IV(2005), Le portatif (2006) en passant par l'Empire du bien (1991-1998) ; Après l'Histoire I (1999), Après l'Histoire II, 2000, et les tomes I, II, III  des Exorcismes spirituels respectivement publiés en 1997, 1998 et 2002.
 
   Il n'est pas question ici d'en faire une présentation d'ensemble. J'ai mobilisé cet auteur dans le cadre d'une réflexion sur l'Europe conçue comme civilisation ayant donné la mesure de ce que l'esprit peut, lorsqu'il sait faire la distinction entre le fait et la valeur, la nature et la culture, l'animalité et l'humanité, le principe du plaisir et le principe de réalité etc. Et ce qui m'intéresse, c'est d'une part de donner à lire des textes de Muray, d'autre part de savoir si nous sommes encore travaillés par la tension entre une barbarie menaçante et un idéal civilisationnel à conquérir. Il se trouve que sur ce point, l'analyse de ce penseur est sans ambiguïté.
 
  « L'Occident s'achève en bermuda » écrit-il avec son génie de la formule percutante et lumineuse. « Craignez le courroux de l'homme en bermuda ! dit-il aux Djihadistes. Craignez la colère du consommateur, du voyageur, du touriste, du vacancier descendant de son camping-car ! Vous nous imaginez vautrés dans des plaisirs et des loisirs qui nous ont ramollis. Eh bien nous lutterons comme des lions pour protéger notre ramollissement » Chers djihadistes, 2002.
 
  Ramollissement, relâchement, disais-je dans l'article précédent. Muray lui donne son véritable nom et ce n'est rien moins que d'une « régression anthropologique » qu'il s'agit.
 
  Notre philosophe, car c'est bien le nom qui lui convient, la décode comme disparition de l'individu rationnel et maître de lui, « la dévastation de l'ancienne raison » étant devenue « une commande sociale ». « Ce travail, qui aurait semé l'épouvante dans l'humanité des temps héroïques, est accueilli désormais avec des cris de joie » (Ibid.)
 
  Car au fond quel est le programme de l'Occidental tel qu'il se manifeste dans le vacarme des mots et des conduites? Il semble qu'il consiste à s'identifier à toutes les tendances régressives de la modernité : substituer au désir d'être enseigné celui d'être reconnu, supprimer la frontière entre le principe du plaisir (l'enfance) et le principe de réalité (l'âge adulte), entre l'animal et l'homme, entre la nature et l'histoire, absorber la culture, l'art, le sport, la religion, l'école, la politique dans « le cercle enchanté de la communion festive ». Rien ne doit échapper à l'hyperfestivisation et à la surenchère permanente sur les ruines de la Loi et du Réel.
  S'adressant toujours aux Djihadistes, Muray prononce un terrible réquisitoire, en faisant parler celui que Nietzsche appelait « le dernier homme » : «L'Occident, dont vous avez transformé le cœur du cœur en champ de ruines, n'est plus l'Occident depuis longtemps puisqu'il ne survit que de s'être débarrassé de tout ce sur quoi il avait reposé durant des siècles, à commencer par ces qualités regardées par nous comme éminemment malsaines que sont l'esprit critique, la conflictualité, la capacité d'intégrer le Mal et le démoniaque et de les comprendre pour les combattre.
  Il s'est également débarrassé de l'Histoire, cette interminable tapisserie d'erreurs (car se tromper est un luxe que nous ne pouvons plus nous payer ; nous n'avons plus les moyens de nous offrir que l'innocence » (Ibid).
 
   Le phénomène central conditionnant tout le reste est l'émergence d'un néo-homme que Muray dénomme : « Homo festivus », sa mutation ultime étant Festivus festivus, l'homme pour qui faire s'épuise à faire la fête et, comme sapiens sapiens était l'homme qui sait qu'il sait, s'est métamorphosé en homme qui fête la fête.
  « Faire la fête, c'est aussi une manière de militer » ratiocine ainsi un de ces multiples « organisateurs d'événements », festifs, comme il se doit. Muray commente : « J'allais justement le dire. C'est même sans doute la seule et dernière manière de faire tout court, et quoi qu'on fasse, c'est-à-dire de fabriquer encore quelque chose ».
   D'où le slogan de la nouvelle religion énoncée par un de ses affiliés : « C'est détente et fête. Surtout fête » qui donne lieu à ce commentaire: «  Ils ne font pas rien puisqu'ils font la fête. Et, de cette manière, la notion d'action négatrice du donné connaît une nouvelle existence parodique qui remplace avantageusement l'ancienne notion d'action disparue depuis longtemps » Après l'Histoire I.
 
  Aussi Homo festivus s'est-il installé dans le temps immobile et néo-cyclique de l'ère hyperfestive ou « du dimanche de la vie démocratique et du droit de l'hommiste ».
 
  Il convient donc de comprendre ce que signifie cette idée que Homo festivus est sorti de l'Histoire et, comme tel, a liquidé le projet des Lumières. Idée insupportable à entendre pour son acteur et pourtant réalité d'un monde marqué par la disparition de la dialectique réelle c'est-à-dire d'une conflictualité mettant les rebelles en rapport avec autre chose que des menaces en carton-pâte et inscrivant l'aventure humaine sous le signe du tragique plutôt que celui d'une comédie dont l'horreur suprême est précisément de prétendre échapper à « la juridiction de la comédie ».
   Muray cite Kojève pour décrire la substance de l'ère posthistorique : « L'Histoire s'arrête, quand l'homme n'agit plus au sens fort du terme, c'est-à-dire ne nie plus, ne transforme plus le donné naturel et social par une Lutte sanglante et un Travail créateur. Et l'Homme ne le fait plus quand le réel donné lui donne pleinement satisfaction, en réalisant pleinement son Désir (qui est chez l'Homme un Désir de reconnaissance universelle de sa personnalité unique au monde). Si l'homme est vraiment et pleinement satisfait par ce qui est, il ne désire plus rien de réel et ne change donc plus la réalité, en cessant de se changer réellement lui-même ». Après l'Histoire I.
 
    Evidemment l'idée ne va pas de soi et chacun peut imaginer la réaction de tous les petits Festivus fabriqués par l'Ecole : « Fin de l'Histoire ? Vous plaisantez ! Ne passons-nous pas une grande partie de notre temps à exercer notre esprit critique et à défiler dans les rues avec nos parents et nos professeurs, continuant ainsi le travail de la négativité ? »
  Sans doute, reconnaît Muray, le monde est plein de rebelles, plein de minoritaires en luttes mais ces minoritaires ont ceci de particulier qu'ils sont « extrêmement nombreux et assermentés » et que ce qui se croit une rébellion est en réalité la forme que prend aujourd'hui la domination.
 
  Muray y revient sans cesse. Ceux qui occupent les fonctions d'autorité dans tous les domaines (au sein de l'Etat, de l'Education nationale, du monde de la Culture etc.) et sont les architectes de cette catastrophe satisfaite d'elle-même, exercent leur travail de sape des idéaux de la modernité sous le drapeau de cette même modernité. Ils en singent la fonction critique et négatrice mais l'ordre ancien ayant disparu la confrontation s'effectue à l'intérieur du moderne, dans un monde sans altérité tout occupé à se dire oui à l'infini.
  «  L'ère hyperfestive est aussi un Club planétaire des Amis du Oui. Mais le souvenir de la critique lui-même est conservé, à titre de bouffonnerie magique et touristique [...] Il s'agit de faire l'éloge du « non » avec d'autant plus d'énergie que l'exercice concret et actuel en a été sciemment rendu impossible, et qu'il est même aujourd'hui pratiquement interdit ; et en même temps encouragé avec d'autant plus d'intensité à titre de contrefaçon : c'est ainsi que l'on peut maintenant voir sur les trottoirs, comme cela m'est arrivé il y a quelques jours, des passantes agrémentées de tous les signes extérieurs de la servitude moderne (walkman, rollers, téléphone portable, petit sac à dos, quelquefois tout en même temps), et vêtues de tee-shirts sur lesquels on déchiffre, en grosses lettes noires, à hauteur des seins : « CATEGORIQUEMENT CONTRE ». 
 « L'univers de ceux qui disent « oui » jour et nuit doit être systématiquement raconté, par les troubadours salariés du temps, comme une éclatante épopée de révolte, une saga de la Liberté » Après l'Histoire II.
 
  On peut illustrer cette institutionnalisation de la subversion si peu subversive et si dominatrice par ce qui se passe dans le monde de la Culture et en particulier de l'art. Il faut lire les pages concernant l'art contemporain dans Après l'Histoire I :   « Le magma de la Culture absorbe l'art et les artistes comme il a tout absorbé, dans un système de consommation mutuelle, d'interactivité, de communication, de créativité et de spontanéité où les dernières significations disparaissent. Tout se dissout dans l'effervescence de la fête, c'est-à-dire dans l'étalage d'une « fierté » unanime d'où les individualités sont euphoriquement abolies ».
   Il s'ensuit que prendre au sérieux ce qui avait été annoncé, au temps où il y avait encore des penseurs et des artistes soucieux d'autre chose que d'expressivité de leur cher moi, ne peut être que le signe d'une mentalité réactionnaire, celle du « vieux con »,  revenant grincheux de l'Ancien Monde où l'on se préoccupait encore du sens.
  « La disparition de l'art est un événement qui attend son sens, mais on peut douter qu'il le trouve jamais. Evoquer cette fin comme une éventualité sérieuse ne signifie pas qu'aucun individu, dorénavant, ne se dira plus artiste; ni même qu'il n'y aura pas encore dans l'avenir de grands artistes. L'hypothèse de la fin de l'art ne concerne que l'hypothèse de la fin de l'histoire de l'art, c'est-à-dire le moment où les dernières possibilités de l'art ont été épuisées, et l'ont été par les artistes eux-mêmes (Picasso, Duchamp); et où ne se pose donc plus, du point de vue des artistes, que la redoutable question de la désirabilité de l'art en tant que survivance, inscrite désormais dans une tout autre histoire encore inconsciente.
  Si cette fin est vraie, vouloir que l'art continue, et le vouloir à coups d'anathèmes contre ceux qui mettent en doute sa nécessité aujourd'hui en les traitant de conservateurs ou de réactionnaires, est la plus efficace manière de se priver d'une ultime possibilité: celle de penser cette fin, donc d'avoir encore un contact, par la méditation, avec le secret de cette histoire. Avec Picasso comme avec Duchamp, mais aussi avec tous ceux qui, bien avant les détracteurs actuels de l'art, avaient calmement signé son acte de décès: je pense à Baudelaire parlant à Manet de la « décrépitude » de la peinture; à Hegel concluant que l'art est « une chose du passé » (quelque chose qui ne peut plus affirmer aucune «nécessité effective»); aux situationnistes qui avaient repéré très tôt la malfaisante existence du «dadaïsme d'Etat »; à Debord qui constatait en 1985 que « depuis 1954 on n'a jamais plus vu paraître, où que ce soit, un seul artiste auquel on aurait pu reconnaître un véritable intérêt ». Mais je repense surtout à Nietzsche et à sa féroce prophétie d'Aurore: « L'art des artistes doit un jour disparaître, entièrement absorbé dans le besoin de fête des hommes: l'artiste retiré à l'écart et exposant ses oeuvres aura disparu. » La civilisation du festif sans rivages est précisément l'époque de la dissolution de l'art et des artistes, irradiés par l'impératif d'épanouissement généralisé. L'hyperfestif est le moment du dépassement fatal et absolu de l'art. Tout le monde doit s'éclater. Tout le monde doit être artiste. Tout le monde doit être tout le monde. La fête est ce qui donne congé au concret, et chacun se doit d'être à même, comme le décrétait, dès 1981, l'ex-ministre Jack Lang, postillonneur numérique, tout frémissant d'inanité souriante, de développer sans relâche ses « capacités d'inventer et de créer » Après l'Histoire I.  Ainsi « l'iconoclasme en charentaise », « la rébellion encouragée » impose sa domination dans la bonne conscience de son apparente négativité. Et comme il  faut, néanmoins,  nourrir l'illusion du combat, Homo festivus n'a pas d'autres solutions, dans ce temps où, la persécution ayant disparu, rien ne fait obstacle à son expansion, de s' inventer des ennemis. Telle est la fonction de ce qu'il appelle « le réactionnaire » ou « le fasciste », fascistes d'opérette évidemment mais si indispensables pour se camper dans la posture héroïque de la victime!  C'est cette imposture que Muray pense sous l'expression :  les mutins de Panurge.
 « J'ai appelé depuis longtemps rebelles de confort ou mutins de Panurge ces insoumis qui pullulent dans le parc d'abstractions de la modernité ».
  Ce qui le conduit à faire une lecture hilarante de l'antilepénisme comme emblème de ce qu'il appelle « la rébellion-bidon ». Lisons-le :
 
   « L'antilepéniste est un théologien du lepénisme, et il combat ce dernier avec lyrisme, mais aussi conserve-t-il avec lui des modes de raisonner communs et s'expose-t-il à des chocs en retour (celui du 21 avril par exemple). L'a-lepéniste, à l'opposé, considère le lepénisme comme vide de sens. C'est mon cas. Il n'entretient donc pas, même par l'exécration, cette ornière. L'anti-lepéniste, lui, dès le soir du premier tour, se précipite pour y déverser dans cette ornière, toutes ses protestations. Et la suite s'enchaîne. Pendant quinze jours, du haut de leurs rollers antifascistes, les jeunes au bord des larmes de crocodiles accusent « la connerie des adultes », lesquels ne sont pourtant guère plus que des jeunes un peu vieillis. La presse s'extasie de tous ces défilés et décrit, dans l'inimitable style de bergerie néo-stalinienne qui est le sien, ces merveilleuses coulées de foules, ces « débats ambulants nourris par des fanfares », ces « veillées citoyennes », ce « mouvement quasi festif qui déroule son cortège dans les rues de Paris », entre les cris de « No pasaran » et de « Nous sommes tous des enfants d'immigrés ». On hurle aussi : « Le Pen crapaud, le peuple aura ta peau » ou encore : «  Le Pen au zoo, libérez les animaux ». (Slogan qui nous ramène à la monstruosité dont je parlais et qui mériterait de longues gloses fort instructives...). Les jeunes, qui ont toujours dit oui à tout, toujours tout approuvé, apprennent à dire NON, en grosses lettres, en capitales, pour la première fois de leur vie et sans doute aussi pour la dernière. La rave-party devient la résistance continuée par les moyens de la sono. Un battage de coulpe frénétique mais toujours « festif, créatif et imaginatif » (« Beaucoup de lycéens, confie un responsable de la Fédération lycéenne, nous appellent pour nous demander comment structurer leur action, comment rendre leur mouvement festif »), parcourt les rues de son frisson sacré. Avec, de temps en temps, une lueur d'intelligence : « Il faut qu'il y ait une suite sinon ça n'a pas de sens, charabiate ainsi un manifestant. Que les jeunes se bougent, qu'on organise une marche silencieuse sur l'Elysée pour plus d'impact. Le côté festif de ce soir c'est un peu bizarre parce qu'après, on ne sait plus pourquoi on est là ». Des landaus surgissent dans tous les cortèges («  La Poussette, nous voici ! »). Une génération se baptise passionnément et dévotement dans l'antilepénisme. Puis, la grande peur passée tous ces Pokémons pieux se demandent (d'après Le Monde) « comment transformer l'émotion en action ; faisant ainsi l'économie rentable du stade intermédiaire : celui où ils se seraient demandé où est le sens de tout cela. Mais, déjà, le durcissement en mythe de leur niaiserie bruyante est en cours. Et il ne faudra que quinze jours pour qu'ils se persuadent qu'ils ont vécu une épopée. Et qu'ils ont fait quelque chose, dans les rues, alors que personne ne leur demandait rien (à part les médias, c'est-à-dire personne au sens propre). Et qu'ils ressemblent, dès lors, à la souris de la vieille histoire drôle qui, courant à côté de l'éléphant, lui dit : « Qu'est-ce qu'on soulève comme poussière !... » Festivus festivus.
 
  Ce texte parmi tant d'autres donne la mesure des effets comiques du style alerte de Philippe Muray. Sa lecture est un bonheur par sa façon de faire rire de ce qui devrait faire pleurer. Mais aucune tristesse dans son rapport au monde ; seulement la joie d'échapper à un ridicule si communément partagé.
  Car la régression anthropologique s'accomplit sans états d'âme et l'important n'est pas de s'en attrister, c'est d'en prendre conscience et de la penser. De quoi s'agit-il exactement ?
 
 De la dévastation des données anthropologiques ayant structuré l'humanité dans ce qui fut son aventure historique, en particulier la différenciation des sexes et des ordres (masculin # féminin; ciel # terre, travail # fête ; principe du plaisir # principe de réalité ; Loi # nature; privé # public etc.) ou dans l'ordre symbolique la distinction du Même et de l'Autre avec son corollaire : l'opposition, la confrontation, la lutte par laquelle l'humanité s'arrache à l'indistinction naturelle (maternelle) pour se lancer à l'assaut du ciel. Cela signifie que l'existence humaine ne peut pas être un conte de fée proposant comme horizon la jouissance de l'être dans l'accord avec soi et avec l'autre. Elle s'accomplit dans la conscience du mal comme une dimension constitutive de l'humaine condition, comme ce qui nous expulse de l'Empire du Bien au nom duquel Homo festivus commet ses méfaits dans la bonne conscience d'un rapport imaginaire à lui-même. Car l'humanité commence avec l'expulsion du paradis. Elle est expatriée de la plénitude de la jouissance, de l'état d'innocence, elle advient comme inquiétude, culpabilité, déchirement entre des postulations contradictoires, essais et erreurs, désir, bref comme travail du négatif, exercice critique.
   Aux antipodes de la dure loi du réel, Homo festivus prétend, au contraire, vivre d'une existence réconciliée. Il entend jouir d'un bien-être physique, moral, social complet et malheur à qui vient le déranger dans sa certitude d'incarner les valeurs suprêmes de l'aventure historique. Le maternage social, la normalisation de tout ce qui conteste la norme, l'assomption du Désir dans son expression infantile, la sacralisation de l'enfant, cet être sans histoire dans lequel Homo festivus se contemple ne se discutent pas. Haro sur l'esprit critique! L'épuration de tout ce qui n'est pas politiquement correct doit s'effectuer et l'on sait qu'elle s'effectue, hélas, sans répit.
  Car les mutins de panurge sont aussi des matons de Panurge.   "L'âge du fier " ayant supplanté l'âge de fer, le désir de reconnaissance ne peut tolérer la capacité discriminatrice de l'esprit et son droit à faire de la résistance. La liberté érigée en totem narcissique se dresse contre la liberté de pensée et Homo festivus, pris d'une fièvre législatrice, fait la chasse à tout ce qui ne consent pas, joyeux, à l'univers non conflictuel, indifférencié, « tolérant » qu'il croit incarner. Tolérance entre guillemets, bien sûr, car Homo festivus tolère tout sauf ce qui met en question l'hypocrisie d'une tolérance où le Même n'est plus en rapport qu'avec le Même. Il n'y a plus d'altérité dans l'univers d'Homo festivus, plus de féminin et de masculin, plus de frontières nationales, plus de différences culturelles, plus d'être individualisés, seulement un métissage planétaire, une résorption de l'individualité dans l'indistinction d'un « tout à l'ego » infantile.
  Son angélisme ne lui coûte donc pas cher mais il sévit sous forme liberticide. « L'envie du pénal » va de pair avec la disparition de l'esprit critique. Que des individus puissent refuser d'externaliser leur vie privée, de sacrifier les exigences rationnelles de lucidité et de maturité, qu'ils puissent revendiquer le droit de juger et d'agir selon leur conscience, voilà qui est insupportable, si cette conscience n'est pas celle de Monsieur tout le monde. Il faut épurer la scène de cette survivance d'un autre âge : «  En même temps que le bipède de l'ère hyperfestive affiche dans les rues, et derrière des camions sound system, son inanité la plus sonore, il est devenu de plus en plus chatouilleux. [...] Délirant de sa propre importance, mais ne parvenant plus à accéder au moindre plaisir individuel de la vie d'autrefois, Homo festivus s'enrage et multiplie les officines de chantage qu'il appelle groupes de pression. Ceux-ci n'ont d'autre raison d'être que de demander des lois et des persécutions. Chaque humain, désormais, est, à lui seul ou presque une association de boycott en permanente surchauffe. Procéduromaniaque, légalophile ou plus exactement maniaco-législatif, Homo festivus est un frénétique amateur de droit. La plainte, les procédures, l'organisation de la répression des infractions et l'amplification des peines sont son érotisme de substitution. La demande de réparation des préjudices est le commencement de la preuve de son existence et de son importance. La lutte pour la victime est sa libido ».Après l'Histoire I.   Il s'ensuit que les délits pleuvent : délit de harcèlement moral, de harcèlement sexuel, d'homophobie, de lèse-majesté mémorielle, de tabagisme etc. Les délices du parc d'attraction mondialisé ne font que commencer. Tocqueville l'avait anticipé. Nous y sommes. Et s'il faut parler de despotisme, il convient de connoter le mot : "despotisme festif."  L'auteur reconnaît le caractère totalitaire du phénomène mais il va de soi que la notion de totalitarisme est totalement inadéquate à la vérité de l'époque.   Car ce qui la distinguera  de toutes les autres, c'est qu'il n'y a plus de sens à parler d'aliénation. Et c'est cela qui est proprement terrifiant. Homo festivus en a fini avec l'aliénation. Il ne subit pas. Il est l'artisan permanent et enthousiaste de sa condition régressive.
  « Du pain, de la fête » et l'épuration éthique zélée de la nouvelle police des moeurs... Laissez-nous donc nous éclater en vacarme et chantez, dansez avec nous le nouvel hymne de " l'Europe divine" : "Vive la condition postmoderne"!                                  
 Conclusion.   Faut-il conclure que les conquêtes de l'esprit européen s'achèvent à Festivopolis? Comique de la  farce ... Il reste la liberté d'en rire et, comme les fêtes ne se terminent pas toujours bien, attendons de voir ce que l'imprévisible Histoire qui continue, au nez et à la barbe d' Homo festivus, nous réserve. 

 

 

 

 

 

 

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33 Réponses à “"La régression anthropologique". Philippe Muray.”

  1. Pierre dit :

    Philippe Muray est un auteur qui fait mal. Peut-être que c’est le signe qu’il donne à penser, mais je trouve qu’un certain nombre de personnes qui le mobilisent dans l’espace médiatique, le font à bon compte, parce que ses analyses n’ont aucune espèce de conséquence pour leur vie.
    Je le trouve injuste sur beaucoup de points, et pour avoir lu certains de ses textes qui me touchent aussi personnellement, j’ai l’impression qu’une grande part de son travail est fondée sur le mépris. Mais est-ce qu’on peut prétendre donner une clé de lecture d’une époque quand on la méprise totalement ? Il présente l’analyse d’un événement, d’un type de personnes, d’un phénomène qu’il déteste, et il ne laisse aucune place à la nuance. Ses textes peuvent paraître drôles, en tout cas pour ceux qui ne sont pas concernés par ses critiques, mais en même temps, il occulte tout ce qui pourrait donner des éléments de compréhension différents. Je pense à la gay-pride. En apparence, c’est un événement d’exhibition, de fête idiote. Pourtant, si on y regarde vraiment de plus près, on s’aperçoit que ce qui s’y joue est beaucoup plus complexe. D’abord, ceux qui s’exhibent en slip y sont une minorité, et surtout, un certain nombre de participants qui n’ont pas l’honneur des journaux télévisés, sans doute en raison de leur trop grande banalité, y trouve un espace de libération, de prise de parole qui n’est pas possible pour eux durant les autres jours de l’année. Homo festivus ne me semble pas dans ce cas offrir une clé de lecture utile de cet événement, en tout cas elle est beaucoup trop réductrice. C’est juste un exemple, mais il y en a d’autres. C’est comme si Philippe Muray n’utilisait son sens de la nuance, sa culture et son érudition que pour parler du monde ancien qu’il semble regretter. Pour le reste, c’est le mépris et la moquerie féroce.

    En tout cas il y a quelque chose d’ironique dans la façon dont il est utilisé par certains « journalistes » et penseurs médiatiques conservateurs. « L’iconoclasme en charentaise » et la « rébellion encouragée » qui imposent leur « domination dans la bonne conscience de leur apparente négativité », cela a fini par concerner aussi ses amis, comme Elisabeth Levy, ou ceux qui reprennent ses concepts sans le citer, comme Eric Zemmour. Même Alain Finkielkraut a fini par considérer le débat démocratique ou philosophique comme un spectacle télévisuel où seules comptent l’apparence et la fausse controverse. En fait on peut réutiliser Philippe Muray à l’encontre de ceux qui en ont fait leur maître à penser, ça c’est plutôt drôle !

  2. Simone MANON dit :

    Un auteur n’est pas responsable de l’instrumentalisation de son oeuvre et que cette oeuvre là dérange (ou fasse mal, comme vous écrivez) ceux qu’elle épingle, rien de plus naturel. C’est une loi du genre et sans doute le signe d’un véritable travail réflexif.
    La vocation de l’effort de penser a toujours été de permettre un recul critique à l’égard de soi-même et de son monde afin de faire grandir une authentique liberté spirituelle et morale.
    A l’ère post-moderne ce n’est pas une mince affaire!

  3. Jérome dit :

    Bonsoir,
    Phillipe Murray est une grande découverte pour moi.
    Cela m’émeut de lire ces mots qui étaient pour moi informes et comme cachés à milles lieux sous terre.
    « Il reste la liberté d’en rire », en effet, encore faut-il supporter d’en rire seul bien souvent.
    J’ai souvent peur de ne plus être pris au corps par le langage.
    Cette page est un bonheur et comme un électrochoc.
    Un grand merci donc, encore une fois, pour ces réflexes de liberté que vous mettez à disposition.
    Bien à vous.

  4. Simone MANON dit :

    Bonjour Jérôme
    Il faut lire ce texte comme une invitation à se plonger dans la lecture de l’oeuvre de l’auteur. Lecture jubilatoire s’il en est…
    De quoi rendre la solitude féconde. On n’est jamais tout à fait seul lorsqu’on fréquente les maîtres de sagesse, même s’il est vrai qu’il leur manque la chair de l’existence concrète.
    Cordialement.

  5. Simon dit :

    Comme critique du monde moderne, Philippe Murray est impeccable. Ce n’est certes pas Nietzsche mais au moins c’est dans le lignage, celui d’une pensée féroce et profondément anti-moderne (donc réactionnaire – ce mot dans ma bouche n’est pas péjoratif). Par contre, pour le style, je serais plus réservé. Ces concepts sont drôlatiques mais un peu ridicules. Quant au style, je ne saurais pas formuler ça exactement mais il y a quelque chose qui me gêne, ça manque d’épaisseur, je trouve.

  6. Simone MANON dit :

    Je ne vous suis pas du tout lorsque vous qualifiez les concepts créés par Muray de « ridicules ». Ce qui l’est en revanche, ce sont les situations qu’ils épinglent. Risibles, ce à quoi ils renvoient mais, à mes yeux, certainement pas les concepts eux-mêmes.
    Quant au style, il est vrai qu’il excelle dans la pertinence critique mais on aimerait parfois que l’auteur déploie les présupposés qui étayent cette dernière. C’est peut-être ce que vous voulez signifier en parlant de « manque d’épaisseur ».
    Cordialement.

  7. François dit :

    Il est dommageable que la pertinence de la posture de mécontemporain de Muray soit rendue suspecte par ses amalgames. Comme tout auteur grandiloquent (je pèse mes mots), il ne convainc pas, il emporte l’adhésion aux forceps. Il y a comme une trop grande facilité d’écriture chez lui, on sent qu’il prend plaisir à lâcher la bride. Nous ne sommes pas ici en présence d’un orfèvre, d’un ascète de la parole. Il pense bien, mais il parle sans doute trop. Je suppose que cela peut détendre de l’aridité des Annapurna philosophiques. Malgré le ton critique de mon message, je ne suis pas opposé à ce type de prose. Etudiant en philosophie, j’aimerais pouvoir lire sans fatigue Spinoza ou Hegel. Malheureusement, je n’y arrive pas, et je me replie sur des auteurs plus farceurs. Je préfère Cioran à Muray, mais il est vrai qu’on trouve une certaine détente dans les deux.

  8. Simone MANON dit :

    Je ne sais pas de quels amalgames vous parlez et je ne suis pas sûre que le propre d’un penseur soit de procurer une détente. C’est parfaitement antinomique avec le travail du concept dont la fonction est de produire de l’intelligibilité. Or l’impertinence de Muray concourt à cette fin en nous affranchissant des ridicules de l’époque qu’il sait pointer dans une prose qui, pour ne pas avoir l’aridité de l’austère spéculation en a souvent les vertus éclairantes.
    Bien à vous.

  9. Raphaël A. dit :

    Bonjour Madame,
    Je vous avais déjà laissé un message sur l’article https://www.philolog.fr/liberte-et-necessite-spinoza/ pour vous remercier pour votre travail, je me permets de vous recontacter cette fois-ci pour une question. J’ai ouvert Désaccord parfait qui attendait chez moi sur une étagère depuis longtemps. Je l’ai dévoré avec un plaisir rare parsemé de vrais éclats de rire provoquées par la pertinence de certaines formules vitriolées (et sous les regards étonnés, parfois inquiets, des passagers du métro …).

    J’ai lu dans la foulée la moitié d’Après l’histoire et suis en plein Festivus festivus. Quel pouvoir de dévoilement ! Sur un plan intellectuel, son analyse est confondante. D’un point de vue personnel en revanche, elle est beaucoup plus difficile à vivre.
    Comment appréhender le changement de civilisation quasi-inéluctable que nous sommes en train de vivre ? C’est comme si je venais de prendre conscience que nous plongions dans le non-sens. Il m’est désormais impossible de regarder une publicité, le moindre article de journal, et les trois quarts des signes que nous renvoie la modernité environnante, sans constater la pertinence de ses analyses. Muray, peut-être à l’inverse d’un penseur comme Cioran, se défendait de la désespérance par son rire, mais peut-être aussi car il savait avoir encore un petit peu vécu dans la « période historique ». Comment, si on suit son propos, et qu’on a une vingtaine d’années, peut-on vivre aujourd’hui en ayant conscience de la déliquescence de sa civilisation ? Se sentir happé par un mouvement inéluctable tout en ayant conscience de sa vacuité.
    J’en viens à ma question. Auriez-vous des idées de lectures qui pourraient s’inscrire en complément de l’analyse de Muray sur la modernité et permettent de l’appréhender par-delà un horizon qui chez Muray est fatalement bouché ? J’ai bien conscience de l’ironie de ma demande qui prouve là encore à quel point le négatif est devenu insupportable et le soma nécessaire… Mais je me dis qu’il doit bien avoir des pistes pour penser le monde contemporain de manière problématisée et sans nécessairement désespérer … ! J’ai en outre une deuxième question que je m’en vais poser sur la page appropriée.
    Merci beaucoup,
    Bien à vous,

  10. Simone MANON dit :

    Bonjour Raphaël
    Oui la lecture de Philippe Muray est jubilatoire et ce n’est pas le moindre des mérites de cet auteur.
    Il ne faut pas parler de désespérance le concernant puisque toute école de liberté repose sur un optimisme foncier indexé sur les capacités de résistance de l’esprit humain. Là est le creuset où se préparent les nouvelles mutations historiques.
    Il s’ensuit que le rapport critique à son monde ne ferme pas l’horizon, il l’ouvre même si les prises de conscience demandent du temps.
    J’ai de la peine à penser à un auteur en particulier car tous ceux que je lis ne sont guère complaisants avec l’époque.
    Voyez Marcel Gauchet, Pierre Manent, Castoriadis.
    Voyez ma présentation de la culture-monde de Lipovestky et Serroy.
    Bon courage.

  11. Roubaudi dit :

    C’est à soixante ans que j’ai découvert Philippe Muray.
    J’ai commencé par « Le XIXème à travers les âges » et j’ai dévoré ensuite toutes ses publications avec jubilation.
    J’apprécie ses analyses, peut-être parce que j’appartiens à la génération précédant l’Homo Festivus et ai connu une autre société Peut-être parce que j’ai vu s’étaler sous mes yeux, au fil des années, ce qu’il dénonce: indifférenciation, déréalisation, régression, fête obligatoire, enfant roi…
    Muray touche juste, avec brio et humour.
    Je ne pense pas que sa philosophie soit désespérée. Muray, même s’il ne s’apesantit pas beaucoup sur le sujet, était un être religieux (voir, notamment son article critique à propos de Flannery O’Connor, dans « Les mutins de Panurge, exorcismes spirituels II et sa posture par rapport aux ésotérismes dans « Le XIXè à travers les âges »). Limiter Muray à la seule critique de la société moderne sans prendre en compte cet dimension spirituelle me semble regrettable et réducteur.

  12. Simone MANON dit :

    Vous avez raison, les analyses de Muray ne sont pas désespérées. Elles ne seraient pas jubilatoires si ce n’était pas le cas. Mais ce n’est pas parce que son ironie mordante est celle d’un homme pour lequel le catholicisme implique une métaphysique autrement plus sensible au mystère de l’existence humaine et à la porosité de l’âme humaine à la fascination du mal que ne le sont les simplifications d’une modernité vidée de sa substance, qu’il n’est pas fondamentalement un anthropologue sagace de la post-modernité.
    Par ailleurs voyez bien que cet article n’a pas pour objet de présenter la pensée de Muray mais de clore une réflexion sur l’Europe.
    Merci de vos remarques qui peuvent utilement inviter les lecteurs à approfondir leur connaissance de l’auteur.
    Bien à vous.

  13. Raphaël A. dit :

    Merci beaucoup pour vos réponses. Il faut que je continue à lire l’œuvre de Muray.
    Merci plus particulier pour votre réponse Mme Manon sur l « optimisme foncier indexé sur les capacités de résistance de l’esprit humain », c’est cette phrase qui va me permettre de le relire sous un autre angle. Cette confiance en l’humain, plus que le catholicisme qui ne vaut que tant qu’on a la foi, ce qui n’est mon cas.
    J’avais déjà lu votre article sur Lipovetzki et Serroy, je vais explorer les auteurs que vous m’indiquez, merci.
    Cordialement

  14. […] » "La régression anthropologique". Philippe Muray […]

  15. RAGEMAG dit :

    […] font valoir leur subjectivité débridée et leur narcissisme en guise d’œuvre et de création. Philippe Muray parle justement à ce propos de «  mutins de Panurge […]

  16. François dit :

    J’ai lu les œuvres intégrales de Muray (enfin non, pas son roman On ferme) et je reviens sur ma critique négative de l’année dernière. J’ai adoré, car c’est une lecture totalement émancipatrice : parce que toute parole publique semble de nos jours vouée au politiquement correct, le devoir d’irrespect que met en pratique Muray est une vrai bouée de sauvetage. J’ai particulièrement apprécié les citations du journal Libé qui sont disséminées dans ses essais et qui sont souvent complètement surréalistes, bien que tristement réelles…

    Je suis plus ou moins athée, mais Muray me rend la spiritualité chrétienne sympathique en décrivant l’absurdité de nos modèles actuels (en ce sens, n’est-il pas un nouveau Pascal? En le lisant, on se dit : en effet, misère de l’homme sans dieu…). Ce qui est fascinant, c’est qu’il rend compte d’un paradoxe au cœur de notre société actuelle : comment la sanctification du loisir (l’hyperfestivisation) n’est, sous couvert d’être la libération finale, qu’une nouvelle servitude, et peut-être la pire de toute, car elle est le rejet du sacré, c’est-à-dire cette dimension obscure qui constitue pour nous un « ailleurs » indispensable.

    Je ne vais pas me lancer dans un commentaire de Muray, car il y a tellement de choses à dire, il brosse vraiment un portrait d’ensemble de nos tares et c’est effrayant et drôle à la fois. Finalement, ne peut-on pas dire de Muray ce que Mme de Staël disait (dans De l’Allemagne) du Méphistophélès de Goethe : « Vous riez parce qu’il humilie tous les amours propres satisfaits, vous pleurez parce que la nature humaine, ainsi vue des profondeurs de l’enfer, inspire une pitié douloureuse »?

    NB : je me permets de suggérer Baudrillard comme lecture complémentaire de Muray. De l’aveu même de l’auteur, c’est celui qui, avec Houellebecq, décrit le mieux les dérives de nos sociétés occidentales depuis les Trente Glorieuses. J’ai lu Lipovetsky et je trouve ça tout de même en deçà de Houellebecq, Muray et Baudrillard, parce que justement pas assez irrespectueux, pas assez sardonique, pas assez « méchant »…

  17. Simone MANON dit :

    Bonjour
    Je me réjouis de constater que vous rendez justice à Muray en soulignant la dimension jubilatoire de la lecture de son œuvre.
    Le jugement de Mme de Staël est particulièrement bienvenu, et je vous remercie de combler un oubli de ma part. Bien sûr que Baudrillard devait être conseillé à Raphaël.
    Bien à vous.

  18. Pierre Ygrié dit :

    Philippe Muray est pour moi une découverte . Dur dur de tout assimiler mais, en lecture rapide, cet article me rappelle un livre de ma jeunesse : « Civilisation en sursis » 1955 ! Alexandre Marc, l’auteur, y parlait déjà de « notre civilisation qui se décompose et qui ne fait que se survivre » ou encore « le mot de crise n’est que trop employé ; à force d’être répété à tort et à travers il est en passe de devenir quelque chose comme l’opium d’une civilisation frappée à mort . Qu’on me permette d’affirmer ici que la légitimité de l’emploi de ce terme de crise est subordonné à la reconnaissance de son caractère TOTAL » Intéressant et à méditer quand on pense que ce constat a été fait il y a près de 60 ans . Manifestement en 60 ans l’opium a eu le temps de faire insidieusement son œuvre de « régression anthropologique ».

  19. Simone MANON dit :

    Bonjour
    N’ayant pas lu « civilisation en sursis », je ne sais pas s’il y a lieu de rapprocher cet ouvrage de l’œuvre de Muray.
    Celui-ci ne dépeint pas un monde « en crise » mais un monde satisfait de lui-même dans ses rebellions en charentaises, son tout-à-l’ego, sa normalisation anti-normative, son exaltation d’Homo festivus, etc.
    C’est un anthropologue impertinent de la postmodernité, épinglée dans ses tendances lourdes dont il propose de rire, dans une posture infiniment plus subversive que celle des prophètes de l’apocalypse.
    Bien à vous.

  20. Patrick Saint-Guilhem dit :

    Je ne connais pas cet auteur. J’ai quelques bribes de philosophie et de littérature. Ce qui est écrit sur cette page exprime tant de choses que je ressens chaque jour! Par quoi commencer? Auriez-vous un parcours de lecture à conseiller?La dimension spirituelle m’intéresse particulièrement. Merci d’avance!

  21. Simone MANON dit :

    Bonjour
    Si c’est l’oeuvre de Philippe Muray que vous souhaitez approcher, vous pouvez commencer par les ouvrages indiqués dans la rubrique bibliographie de ce blog.
    Si votre requête est plus générale, le mieux est de choisir des livres en rapport avec vos intérêts et vos questionnements du moment.
    Bien à vous.

  22. Dionysiac dit :

    Bonjour, je partage de nombreuses analyses de Muray, notamment en ce qui concerne la question de l’homosexualité et du mariage pour tous, dont on peut apprécier la pertinence rétrospective, puisque toutes les réflexions ironiques et désillusionnées, qui concernaient à l’époque de la Gauche plurielle le PACS (fin des années 90), montrent leur capacité d’anticipation à l’ère du mariage pour tous. Or précisément ces analyses, qui me semblent beaucoup plus polémiques, n’apparaissent dans le tour d’horizon que vous proposez de la pensée de Muray. N’est-ce pas dans le but de préserver l’aura bénéfique de cette dernière ?
    Par ailleurs, la lecture suivie des articles d’Après l’Histoire donne parfois l’impression d’un acharnement injuste et insistant à l’égard de revues ou médias plutôt sympathiques (quoique parfois naïfs) tels que Nova Mag, Les Inrocks, etc… On peut ainsi parfois avoir le sentiment (c’est mon cas) d’une certaine forme de radotage, qui apparente par moment l’auteur à la figure du « vieux con » évoquée plus haut dans votre article.

  23. Simone MANON dit :

    Bonjour
    Cet article ne fait pas mystère de la critique que Muray fait de la dévastation généralisée des données anthropologiques. L’indifférenciation sexuelle est explicitement nommée.
    Quant à votre jugement sur les articles de l’auteur dans Après l’histoire, sans doute n’avons-nous pas lu le même livre.
    Bien à vous.

  24. Rosa dit :

    Bonsoir,
    http://www.causeur.fr/sartre-debord-muray-23131.html
    Ne trouvez vous pas que le parallèle fait par l’auteur de cet article entre Debord et Muray est pertinent ?
    Comment jugez vous la pensée de Debord ?
    Je n’ai pas grand monde autour de moi à qui poser de telles questions donc je me permets de passer par vous.
    Mes remerciements,
    RB

  25. Simone MANON dit :

    Bonjour
    Merci pour le lien.
    Malgré tous les présupposés idéologiques qui les séparent, Debord et Muray se rejoignent dans l’idée-force selon laquelle le réel s’est pour nous volatilisé. Ce qui en tient lieu, ce sont les discours, les images, les mises en scène dont nous étions les spectateurs passifs pour Debord, dont nous sommes aujourd’hui les acteurs frénétiques pour Muray.
    Voyez cet article qui me parait intéressant. http://lea.u-paris10.fr/IMG/pdf/10._la_societe_du_spectacle_et_la_civilisation_festive_version_def_.pdf
    PS: Debord est pour moi une lecture de jeunesse. Lointaine donc. Il faudrait que je le relise pour vous dire ce que serait aujourd’hui mon jugement.
    Bien à vous.

  26. Rosa dit :

    Merci pour votre réponse et merci pour l’article que j’ai lu avec beaucoup d’intérêt.
    Les pensées de Debord et de Muray me troublent.
    Je pense que leur diagnostic est le bon : spectacle permanent, pathologies démocratiques, culture du divertissement, misologie… Mais ce qu’il y a de terrible, c’est de penser que tout cela est indépassable, qu’aucun espoir politique n’est plus permis. La personne esseulée est finalement peu de chose et si elle ne peut plus croire en une aventure spirituelle de la société dans laquelle elle vit, que fera-t-elle ? Muray répond : il faut faire de l’art à partir de ce désastre, voilà tout, et cet art sera forcément un art de l’ironie. Cependant, autour de moi, je vois une certaine jeunesse qui se sert de ce type de pensée pour justifier une attitude de dégagement, de pose, de refus de tout engagement politique, bref, une sorte d’esthétisme qui me déprime profondément.
    La vie ne nous a jamais promis le bonheur et je ne vais pas ma révolter en disant que ce genre d’attitude est inadmissible etc car « il se peut que la vérité soit triste » mais dans ce cas pourrions-nous dire que l’histoire de l’Occident a eu ce mérite terrible : apprendre à l’homme ce qu’il est vraiment, un être plein de misère pour lequel l’espérance ne peut plus rien signifier ?
    Je clos ces réflexions qui m’attristent et me pèsent vraiment par une question simple, à vous qui semblez puiser en vous la force de penser et de défendre dans l’homme quelque chose comme une dignité de la pensée (j’ai l’impression qu’en cela vous suivez la leçon de Pascal : « apprendre à bien penser… ») : pensez-vous qu’un renouveau est possible ou avons-nous définitivement sombré collectivement ?

  27. Simone MANON dit :

    Bonjour Rosa
    Votre message reflète un découragement qui m’émeut.
    Il est vrai que notre époque est décevante pour qui sent vivre en lui les exigences du cœur et de l’esprit. Mais celles-ci ne sont-elles pas d’essence aristocratique de telle sorte que, quelles que soient les époques, elles ne peuvent qu’être trahies par leur vulgarisation ou leur inscription dans le corps social?
    Il en est des idéaux des Lumières ce qu’il devait en être des idéaux du christianisme à un autre moment de l’histoire politique.
    Nous vivons à l’âge démocratique et médiatique avec son esbroufe parfois insupportable, sa logorrhée insignifiante, sa perte du sens des hiérarchies, la fatuité de sa bien-pensance, son hypocrisie etc.
    Cela dit nous avons la chance de vivre dans un monde prospère (il n’y a que les Occidentaux qui semblent ignorer cette chance inestimable) et libre dont le meilleur garant me semble être la personne humaine bien consciente de sa solitude foncière, de sa responsabilité et du sens de sa dignité.
    Qu’il y ait une difficulté d’être pour l’individu délié des attachements communautaires, privé de l’enthousiasme des hystéries collectives, confronté à l’angoisse de sa liberté, je n’en doute pas. Mais n’est-ce pas ce qui lui confère sa dignité?
    Vous voyez juste lorsque vous relevez ma profonde conviction humaniste fondée sur l’exigence de l’autonomie intellectuelle et morale de la personne humaine.
    Au nom de cette conviction, je fais une critique sans réserve de l’effondrement de l’école car le salut me semble passer par une pédagogie soucieuse d’armer spirituellement et moralement les individus pour assumer leur responsabilité.
    Je crois aux vertus de l’individu, non à celles d’une collectivité. Il s’ensuit que l’espoir est toujours ouvert, en théorie, pour un sursaut collectif. Mais l’expérience montre que ce sursaut, en pratique, n’est pas à imputer, lorsqu’il se produit, à une prise de conscience des individus. Il est l’effet en eux d’une expérience collective malheureuse (guerre, paupérisation, terrorisme etc.)
    Kant dirait qu’il est « extorqué pathologiquement », il n’est jamais initié librement.
    Cela ne doit pas nous détourner de rester lucides et de puiser en nous le courage et la joie de monter jusqu’au soir. Souvenez-vous de Camus, à la fin du mythe de Sisyphe: « il faut imaginer Sisyphe heureux »
    Avec toute ma sympathie.

  28. Rosa dit :

    Bonjour Madame,

    Vous avez raison de rappeler ce que nous oublions la plupart du temps car cela est devenu une habitude et comme un dû : la misère matérielle est presque réduite à néant dans nos sociétés (on n’y meurt pas de faim) et l’espérance de vie y a considérablement augmenté. Le prix de cette éradication a-t-il été la ruine spirituelle de notre civilisation et, en définitive, sa ruine tout court (suicide écologique à plus ou moins long terme) ? C’est une énorme question que je n’aurai pas la prétention de trancher biens que de grands penseurs (Illich, Ellul, Gorz par exemple) fondent leurs oeuvres sur une réponse radicale et sans concession à cette question, dénonçant les aberrations du progrès et critiquant la foi en une technique orpheline de finalités respectueuses du bien commun. Pour ma part, il me semble que l’alarmisme écologique est aujourd’hui nécessaire (cf. l’excellent philosophe Jean-Pierre Dupuy, Pour un catastrophisme éclairé) bien qu’il est un moindre mal non dénué de failles et d’effets pervers et qu’il ne doit pas conduire à fermer les yeux sur la misère sociale subie par des centaines de millions d’individus dans le monde entier.

    Je comprends votre point de vue de philosophe qui comptez sur l’appel intérieur entendu par la personne libre de penser et de se montrer digne de son humanité. Néanmoins, je pense que la grandeur de notre histoire, c’est aussi d’avoir mis en place des démocraties dont la condition d’existence est la capacité des citoyens à débattre et à prendre des décisions collectives qui les projettent dans le long terme. Or aujourd’hui la politique est méprisée, mise sur le côté, tournée en dérision. Dès lors, c’est le cercle vicieux : les hommes souffrent et se plaignent de plus en plus du « système » mais cela les conduit à s’épargner une existence placé sous le signe de l’engagement. Avidité du changement couplée à la conviction que le changement est impossible et que nous sommes confinés dans l’impuissance et condamnés à subir : voici, à mes yeux, le paradoxe central de notre époque. On le voit à l’état brut chez une grande majorité de personnes. Il crée un désespoir, une angoisse et un ressentiment extraordinaires chez toutes celles qui sont normalement sensibles et intelligentes.

    « Il faut imaginer Sisyphe heureux. » Oui. Mais de mon côté, j’ai l’impression de ne plus pouvoir soulever le rocher. J’ai l’impression qu’on me propose deux alternatives tout aussi absurdes l’une que l’autre : rester devant le rocher sans pouvoir le soulever et puis tomber dans le désespoir ; ou m’enfuir loin du rocher, dans les verdoyantes vallées qu’il nous reste ici ou là, en me mentant à moi-même et en feintant un bonheur aujourd’hui impossible. Devant un tel « ou bien…ou bien », j’ai souvent l’impression que l’ironie et le rire cynique menacent de me posséder toute entière et c’est la passion de peur qui m’envahit.

    Merci pour cet échange. Dans La voie lactée de Bunuel, les personnages parlent de philosophie entre eux comme s’il s’agissait de conversations tout à fait banales. Je trouve cela magnifique. Comme notre vie en sortirait grandie si nous placions la discussion philosophique en son coeur quotidien.
    Bien à vous,

    Rosa

  29. Simone MANON dit :

    Bonjour Rosa
    Je crois que la réflexion rationnelle nous demande d’éviter les discours apocalyptiques.
    Ils sont récurrents dans l’histoire humaine et pourtant à bien considérer les choses, il est possible d’y discerner un progrès tant sur le plan des conditions matérielles d’existence que sur celui des institutions politiques et juridiques pour des peuples de plus en plus nombreux.
    Vous semblez voir une opposition entre le statut de responsabilité de l’individu dont je fais un rempart contre les folies collectives et la vitalité démocratique, or l’un et l’autre sont étroitement liés.
    La personne responsable est sans doute la plus à même de débattre en ayant bien conscience qu’elle n’est pas souveraine ( le sentiment d’impuissance ne procède-t-il pas en grande partie d’un rapport hubrique à ce que l’on pense et ce que l’on est comme si le corps social devait se plier à sa propre loi?), que l’idée de changement n’est souvent qu’un slogan faisant fi des contraintes du réel et des limites de la volonté humaine, qu’on n’est pas tout-puissant mais qu’on peut avec prudence réformer sa conduite et le monde dans lequel on vit.
    La sagesse nous invite à cette modestie.
    Quant à la question du bonheur, ses conditions me semblent bien davantage internes à la personne que l’état induit en elle par des conditions sociales. Il me semble que la sagesse nous incite ici à l’auto-analyse afin de ne pas imputer à une cause un malaise qui relève d’une autre. https://www.philolog.fr/les-paradoxes-du-bonheur/
    La lucidité n’exclut pas la difficulté d’être mais elle nous prémunit contre certaines illusions et nous exhorte, en dépit de tout ce qui légitime le découragement, à hisser un rocher dont on sait bien, en définitive, que nous ne triompherons jamais absolument de sa pesanteur.
    Avec toute ma sympathie.

  30. Olivier dit :

    Bonjour,

    Me permettrez-vous de vous exprimer ma gratitude pour ce travail que vous mettez à disposition de qui veut bien s’y arrêter ? Savoir que des gens continuent de faire montre de générosité est l’une des joies qu’il nous reste. Merci, donc.

    Votre blog ressemblant à un puits de science, je m’en vais y plonger doucement. Et ce, malgré mon entrée ici, par le biais d’un article qui m’inciterait à en fermer la page, votre enthousiasme pour la plume (et le point de vue, peut-être) d’un auteur des plus fâcheux, facteur de calembours porté aux nues par les plus aigris réactionnaires radio-télévisés, procureur rigolard et méchant des sanhédrins de ce temps, mais qui me semble flatter les plus bas instincts, étant un peu décevant. Je crois qu’il y a heureusement mille autre choses à lire ici.

    Tous mes voeux.

  31. Simone MANON dit :

    Bonsoir
    Merci pour ce sympathique message même si vous n’êtes pas sensible à l’intelligence de Muray et à ce qu’a de jubilatoire la lecture de ses textes.
    Bien à vous.

  32. daniel sachet dit :

    grand merci.
    cordialement.

  33. […] lui-même, ni sur le système dont il est issu (“L’homo festivus” parfait dans sa régression anthropologique que dénonçait avec force Philippe Muray). Comme le disait  George Orwell dans son livre 1984,  ” L’ignorance du peuple […]

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