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Renoir. La femme au chat.1880. Sterling et Francine Clark art institute Williamstown 

 

« L'homme est le seul animal dont l'action soit mal assurée, qui hésite et tâtonne, qui forme des projets avec l'espoir de réussir et la crainte d'échouer. C'est le seul qui se sente sujet à la maladie, et le seul aussi qui sache qu'il doit mourir.

 Le reste de la nature s'épanouit dans une tranquillité parfaite. Plantes et animaux ont beau être livrés à tous les hasards, ils ne s'en reposent pas moins sur l'instant qui passe comme ils le feraient sur l'éternité. De cette inaltérable confiance nous aspirons à nous quelque chose dans une promenade à la campagne, d'où nous revenons apaisés. Mais ce n'est pas assez dire. De tous les êtres vivants en société, l'homme est le seul qui puisse dévier de la ligne sociale, en cédant à des préoccupations égoïstes quand le bien commun est en cause ; partout ailleurs, l'intérêt individuel est inévitablement coordonné ou subordonné à l'intérêt général. Cette double imperfection est la rançon de l'intelligence. L'homme ne peut pas exercer sa faculté de penser sans se représenter un avenir incertain, qui éveille sa crainte et son espérance. Il ne peut pas réfléchir à ce que la nature lui demande, en tant qu'elle a fait de lui un être sociable, sans se dire qu'il trouverait souvent son avantage à négliger les autres, à ne se soucier que de lui-même"

                      Henri Bergson : Les deux sources de la morale et de la religion, 1932.

 

Introduction :

 

  Tout bien se paie au prix fort. Telle est la thèse de Bergson dans ce texte où l'on apprend qu'  « une double imperfection est la rançon de l'intelligence ». Or l'intelligence (thème) est le propre de l'homme, ce qui le distingue des autres espèces vivantes dont l'adaptation à la nature est assurée par un autre moyen. L'animal, en effet dispose d'un instinct, d'outils annexés à son corps, les plantes sont équipées des dispositifs nécessaires à leur survie. La question est de savoir ce qui constitue la spécificité de ces solutions divergentes au problème de l'adaptation. Bergson l'analyse en comparant l'homme aux autres espèces. Deux grandes différences peuvent être observées. L'une concerne la nature même de l'agir, la modalité d'être des uns et des autres, l'autre concerne la vie en société et ce qui distingue une société humaine d'une société animale. Après avoir décrit les faits, Bergson en apporte la justification. Quels sont donc ces faits, en quoi procèdent-ils de l'intelligence et pourquoi peut-on parler d'imperfection ?

 

I)                   Première différence.

 

  Elle se décline de trois manières. Bergson oppose :

Le caractère hésitant de l'action humaine au caractère assuré de l'action animale.

La conscience que l'homme a de sa finitude à l'inconscience des plantes et à l'absence de conscience de soi de l'animal.

L'angoisse, le souci typiques de la modalité d'être humaine (le pour soi) à la tranquillité des autres espèces (qui sont sur le mode de l'en soi).

  Expliciter la première différence exige de répondre à la question suivante : Pourquoi l'action humaine est-elle hésitante ? Ce qui implique d'approfondir la distinction instinct, intelligence.

Cf. Répertoire pour les définitions.

 

  L'action humaine n'est déterminée par la nature ni dans ses fins ni dans ses moyens.

Comme l'animal, l'homme doit résoudre les problèmes liés à la satisfaction de ses besoins et de manière générale à sa survie dans un milieu dans lequel il n'est pas immédiatement « chez lui ». Il doit aménager ses conditions d'existence or les solutions à mettre en œuvre ne sont pas fixées par la nature. Il doit les trouver par son propre effort. Il ne dispose pas d'un savoir-faire inné, d'où les tâtonnements d'une action commençant souvent par être inefficace. L'homme met au point ses manières de faire en procédant par essais et par erreurs. Il tire les leçons de ses échecs et perfectionne peu à peu ses techniques. L'action humaine n'est donc pas immédiatement adaptée, elle n'a pas la perfection originaire des conduites instinctives. Ses réussites sont conquises peu à peu au cours d'une histoire où les acquis des générations antérieures constituent le socle à partir duquel de nouvelles conquêtes sont possibles. La perfectibilité de l'action humaine atteste ainsi que ce qui fait la faiblesse native de l'humanité fait aussi sa force. Il doit tout inventer, tout apprendre et ses hésitations se paient souvent d'échecs douloureux mais il a la capacité de progresser et surtout il a le mérite de tout tirer de lui-même. Il transforme son milieu et se transforme lui-même par son travail. Il produit son monde et il se produit lui-même par sa propre activité.

   Cette caractéristique détermine une certaine façon d'être au temps. Alors que les autres espèces sont au présent (on dit qu'elles sont ou qu'elles vivent) l'homme n'adhère pas au présent. Cela tient au fait que les fins de l'homme, (pas davantage que ses moyens) ne sont déterminées par la nature. C'est à lui de les fixer. Il ne cesse donc de se projeter hors de lui vers l'avenir, (on dit qu'il existe. Ek-sister : se tenir hors de soi). Il en est nécessairement ainsi puisque son action n'étant pas l'effet d'un mécanisme naturel, il doit d'abord se représenter les buts qu'il veut réaliser afin de mettre en œuvre les moyens appropriés à la réussite de son projet. Marx a souligné cette différence spécifiquement humaine : « Ce qui distingue l'architecte le plus maladroit de l'abeille la plus experte, c'est qu'il a construit la cellule dans sa tête avant de la construire dans la cire ».

   Il s'ensuit que, comme le déplorait Pascal, « l'homme ne tient pas au temps présent ». Le vecteur de son désir, de son travail n'est pas le temps qu'il lui est donné de vivre, mais celui qui n'est pas encore et vers lequel il s'échappe par le projet. D'où les sentiments inhérents à cette manière d'être. Car l'avenir c'est le possible (ce qui n'est pas mais peut être) or le possible c'est aussi bien la réussite du projet que l'échec, la santé que la maladie, la vie que la mort. Il est impossible d'être mis en situation de déployer les ressources de la pensée sans anticiper tout ce qu'un être pensant est capable de se représenter du fait qu'il tire les leçons de l'expérience et qu'il se sait en butte à de multiples obstacles. D'où les sentiments liés à cette capacité de représentation. La crainte, l'espérance, l'angoisse, le souci sont ce que Heidegger appelle des « existentiaux » c'est-à-dire des vécus structurellement liés à la manière d'être d'un existant. (Donner ici des définitions élémentaires de ces sentiments en pointant leur caractère inconfortable).

   L'homme est donc expatrié de cette « tranquillité parfaite » qui est le privilège des êtres faisant corps avec le présent. De la plante évidemment, dont les capacités de représentation sont nulles, de l'animal aussi, car sa conscience est étroitement limitée en avant et en arrière. Il ne fait pas de projets, il n'imagine pas, il ne se souvient pas du passé, si ce n'est sous la forme d'une mémoire habitude. Il accomplit les opérations de la vie, un peu comme s'accomplissent en nous les opérations biologiques, de manière inconsciente et involontaire. Tout se passe comme s'il était donné, à la plante et à l'animal, de déployer leur vie dans un éternel présent, dans la quiétude d'une vie hors du temps. On se représente en effet l'éternité, moins comme un temps ne finissant pas, que comme ce qui est étranger au temps. Le poète Rilke a dit dans la « huitième élégie de Duino » ce que Bergson essaie de faire comprendre ici : « La bête libre a toujours sa fin derrière - et Dieu devant ; lorsqu'elle marche- elle va d'un pas éternel, comme s'écoulent les fontaines.- Nous, nous n'avons jamais, pas même un jour devant nous,-ce clair espace où s'ouvrent sans fin les fleurs.... Qui donc nous a retournés de la sorte que,- quoique nous fassions,- nous avons toujours l'air de celui qui s'en va ? ».

   Le philosophe prétend qu'une promenade à la campagne nous restitue quelque chose de « cette inaltérable confiance » propre aux animaux et aux plantes. Faire confiance consiste à espérer fermement en quelque chose ou en quelqu'un. La confiance en la vie se traduit par le sentiment de la sécurité, l'absence de peur, de doute, par une solide assurance et une bienheureuse paix. Ce qui est inaltérable c'est ce que rien ne vient troubler. Il est clair que notre existence est étrangère à cette disposition dont jouissent au contraire les êtres ayant le privilège de l'inconscience.

Nous revenons, dit le philosophe, « apaisés » d'une promenade à la campagne. Faut-il comprendre que la promenade étant un moment arraché à la tension de l'action et la campagne un espace naturel opposable au monde œuvré des hommes, il nous est offert d'être paisiblement un vivant et non plus un existant ? (Avec l'angoisse inhérente à cette manière d'être).

 

 

II)                Deuxième différence.

 

   Elle pointe ce qui distingue une société humaine d'une société animale.

  Le texte précise que dans cette dernière : « L'intérêt individuel est inévitablement coordonné ou subordonné à l'intérêt général », que les individus « ne peuvent dévier de la ligne sociale ».

  Une société est un ensemble d'individus organisés de telle sorte qu'ils forment une totalité ayant une cohésion ou une unité. Là où il n'y a pas un minimum de cohésion, là où il n'y a pas un lien entre les individus tel que, chacun est uni à chacun par des règles garantissant l'existence du tout et l'harmonie de l'ensemble, on n'a pas une société mais une multiplicité chaotique d'éléments menacée en permanence d'explosion. Pour parler le langage de Rousseau, on a une multitude agrégée momentanément par une force extérieure à la volonté des uns et des autres, non une association d'individus  ayant une stabilité.

  La supériorité de la société animale sur la société humaine tient au fait que l'organisation de la société animale est fixée par la nature. Les éléments sont liés les uns aux autres (coordination) et hiérarchisés (subordination) par des lois dont l'institution ne procède pas de l'initiative des membres du groupe. Les lois de la société animale sont naturelles. Chaque élément a un rôle déterminé génétiquement et contribue à le cohérence de l'ensemble selon une nécessité stricte. Par exemple, dans une ruche les abeilles naissent ouvrières ou reine, chacune remplit sa fonction un peu à la manière dont, dans un organisme les organes sont solidaires les uns des autres, chacun étant à la fois moyen et fin du tout.  

  Il n'y a pas d'élection, pas de programme à discuter et à choisir dans une société animale. Nulle partie n'a la liberté de contester l'organisation d'ensemble et d'être un facteur de désordre. Les individus n'ont pas d'existence autonome ; ils sont si bien intégrés à l'ensemble qu'on a pu dire que l'individu c'est le tout (par exemple la ruche) et non les éléments, chacun pouvant être considéré comme un organe du corps social. Dans la société animale la métaphore biologique (le corps, l'organisme) est pertinente pour penser la société.

   Ce n'est pas le cas avec l'homme car dans la société humaine « la ligne sociale », entendons le plan d'organisation n'est pas déterminé par la nature. Il en est, dans ce domaine, ce qu'il en est des opérations permettant de s'adapter à la nature (en réalité d'adapter la nature aux exigences humaines). C'est aux hommes de définir la nature du rapport de l'homme avec l'homme. Comme dans le travail, les opérations sont conscientes et volontaires.

  D'où les risques inhérents à l'initiative des libertés individuelles. Ce qui est possible par liberté n'a pas la réussite et la stabilité de ce qui a une nécessité naturelle. Certes la nature a fait de nous des être sociables dit Bergson,  mais cette sociabilité va de pair avec une certaine insociabilité (Cf. l'oxymore kantien « l'insociable sociabilité humaine »). La sociabilité est le tendance poussant l'être humain à rechercher la compagnie de ses semblables et à ne se sentir exister humainement que dans la relation humaine. La sociabilité est donc un fondement naturel de la société humaine. Bergson reconduit ici l'analyse d'Aristote qui définit l'homme comme un animal politique. Mais la vertu politique implique de coordonner l'intérêt individuel à l'intérêt général. Or précisément il s'agit d'une vertu c'est-à-dire d'une conduite accomplissant notre sociabilité dans son excellence. Ce qui, on en conviendra, ne va pas de soi car les hommes ne vivent pas sous la conduite de la raison, ils agissent sous l'empire des affects (Cf. Spinoza). Ils ont donc tendance à privilégier leur cher moi, leur intérêt particulier au détriment de l'intérêt général.

  Bergson souligne qu'il peut y avoir une antinomie entre des  «  préoccupations égoïstes » et  « le bien commun ». Par exemple, lorsque la patrie est en danger, l'homme peut préférer se soucier de sa sécurité plutôt que du bien du groupe auquel il appartient. Il peut déserter pour ne pas aller à la guerre ou dans un autre situation devenir un collaborateur plutôt qu'un résistant. Pour ce qui concerne la répartition des richesses, il peut être tenté de vouloir trop pour lui sans se soucier du fait qu'une répartition manifestement injuste menace la cohésion nationale. Il lui suffirait de réfléchir pour comprendre que son intérêt particulier passe par l'intérêt général mais cela requiert un effort et surtout exige que les passions sociales n'aveuglent pas l'exercice de l'entendement. On sait ce qu'il en est dans la réalité.

   Voilà pourquoi avec l'homme, la possibilité des conflits sociaux, de déviance, dit le texte, est si souvent au rendez-vous de l'histoire. Dévier consiste à s'écarter de, se détourner de. L'égoïsme ou la propension à hypertrophier le intérêts du moi, l'emporte souvent sur l'altruisme, défini ici comme tendance à tenir compte des autres et à avoir le souci de leur bien autant que du nôtre. C'est le risque, là où les individus ne sont pas liés les uns aux autres par un déterminisme naturel mais par un processus mettant en jeu des capacités de représentation et des volontés.

 

 

III)             Justification de ces imperfections.

 

   On peut bien parler d'imperfections car :

  Une action assurée et bien adaptée vaut mieux qu'une action hésitante et exposée à l'échec.

La paix, la tranquillité valent mieux que le souci et l'angoisse.

 Une organisation bien réglée et stable vaut mieux que des ordres sociaux instables où le conflit, la grève, la guerre, la violence hypothèquent toujours la survie du groupe et les intérêts des parties.

   Mais c'est là, dit Bergson, « la rançon de l'intelligence ». Une rançon est le prix à payer pour bénéficier de quelque chose, c'est l'inconvénient que comporte un avantage. La nature nous a privés d'un instinct. Elle nous a dotés d'intelligence. Qui pourrait prétendre qu'il n'y a pas là un avantage c'est-à-dire une supériorité ? C'est elle qui confère à l'existence humaine sa dignité. L'animal n'a aucun mérite dans ses réussites puisqu'il n'est pas au principe de ses opérations. Il n'est pas une personne puisqu'il est privé de la faculté habilitée à l'arracher au monde des choses. Qui voudrait d'une existence engluée dans l'en soi, privée de liberté, de responsabilité et d'une dignité exigeant le respect ? Sans doute paye-t-on cher ce privilège en tracasseries de tous ordres, en souffrances, en humiliations mais c'est l'intelligence qui confère à notre existence sa dimension morale et fait de l'homme un être à part dans la nature. Un être tellement à part qu'il est en charge de lui-même et que les maux pointés comme la contrepartie de sa supériorité ne sont pas entièrement une fatalité (= un sort auquel on ne peut échapper).

  Il lui appartient encore, en apprenant à devenir sage de résoudre les problèmes inhérents à l'intelligence. S'il cultive la philosophie et c'est peut-être l'exercice faisant resplendir le plus éloquemment les vertus de l'intelligence, il peut se libérer de nombreux fardeaux. C'est pourquoi il ne suffit pas à l'homme d'être un bon technicien, un grand savant, ou un acteur politique habile. Il lui faut aussi être un philosophe afin de tenir en respect la crainte et l'angoisse, de  modérer l'espérance, de faire servir  son pouvoir technique aux fins supérieures de l'existence humaine et de déployer la vertu politique que Rousseau définissait comme effort pour subordonner l'intérêt individuel à l'intérêt général. Ainsi seulement l'intelligence peut-elle révéler tout ce qu'elle peut et être la médecine de la maladie qu'elle implique.

 

 Conclusion : 

Misère et grandeur de l'intelligence. Ne méconnaissons jamais la grandeur car elle est le principe de la dignité humaine. Quant à la misère travaillons à lutter contre elle en ayant présent à l'esprit ce constat :   

  «  En un mot tous les animaux sont achevés et parfaits, l'homme est seulement indiqué, esquissé... Tout animal est ce qu'il est, l'homme seul originairement n'est rien. Il doit devenir tout ce qu'il doit être et puisqu'il est un être pour soi, il doit le devenir par lui-même. La nature a achevé toutes ses œuvres mais elle a abandonné l'homme et l'a remis à lui-même ». Fichte. Fondements du droit naturel, 1796.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

  

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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6 Réponses à “La double imperfection:rançon de l'intelligence. Bergson.”

  1. samantha dit :

    ce cours m’a énormément aidé, bien explicité ce texte me parait plus facile à présent. merci beaucoup

  2. Stan dit :

    C’est intéressant dans l’histoire des idées, mais comme les sciences, la philosophie devrait évoluer avec les nouvelles connaissances scientifiques. Or ici, Bergson méconnait parfaitement le principe d’évolution (on perçoit nettement la croyance à la thèse créationiste), et prend pour exemple de société animale des cas particulier (Apis mellifera), sans prendre en compte l’existence d’autres sociétés animales ou la lutte pour le pouvoir existe bel et bien.
    Juste un exemple : chez d’autres hyménoptères primitifs, les Ropalidia, chaque nouvelle femelle qui vient d’éclore voit se présenter plusieurs options : elle peut quitter son nid d’origine et tenter une fondation solitaire ou par pléométrose ; elle peut rester dans son nid d’origine et y exercer des fonctions d’ouvrière ; enfin elle peut aussi rester dans son nid de naissance et y travailler un certain temps en qualité d’ouvrière, avant d’en chasser la reine et de prendre sa place après avoir été fécondée. Cette lutte pour le pouvoir se manifeste également lors des fondations par plémoétrose.

    L’homme n’est pas dénué d’instinct et l’animal n’est pas dénué d’intelligence

  3. Simone MANON dit :

    Je vous conseille de lire de toute urgence la grande oeuvre de Bergson: L’évolution créatrice.

  4. […] Bergson – Homme et nature […]

  5. Gladys dit :

    Bonjour
    C’est un peu agaçant cette manie tenace qui consiste à faire vivre les animaux « au présent ». Quand votre chien vous attend à la maison en hurlant à la mort, quand il frétille à l’approche de votre voiture, quand il vous regarde la queue basse au moment où, sur le point de repartir, vous enfilez votre manteau, vous pouvez bien refuser de dire qu’il éprouve des « sentiments », agréables et désagréables, vous êtes forcés d’admettre qu’il ne vit pas au présent. Il attend, il espère, il craint, et si ces verbes sont trop humains pour s’appliquer aux animaux, il faudra en inventer d’autres pour rendre compte de cette indéniable réalité : il y a une intranquillité certaine et une sensibilité au temps propres aux animaux.
    Merci

  6. Simone MANON dit :

    Bonjour
    Personne n’a jamais refusé la sensibilité aux animaux, même pas le théoricien de l’animal-machine. « Je passe, pour abréger, les autres raisons qui ôtent la pensée aux bêtes. Il faut pourtant remarquer que je parle de la pensée, non de la vie, ou du sentiment ; car je n’ôte la vie à aucun animal, ne la faisant consister que dans la seule chaleur de cœur. Je ne leur refuse pas même le sentiment autant qu’il dépend des organes du corps ». Descartes, Lettre à Morus, 5 février 1649 (extrait).
    Quant au rapport au temps, il ne faut pas confondre, comme l’a bien analysé Bergson, la mémoire-habitude et la mémoire-souvenir.
    Bien à vous.

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