La conscience est un pouvoir de représentation. « Avoir conscience qu'il y a une personne dans la pièce » ; « être conscient de ma joie » signifie que j'ai la connaissance d'une présence dans l'espace ou de mon état moral. Je m'en aperçois ; je me les représente. La conscience est une expérience de présence à soi, aux autres et aux choses enveloppant une connaissance d'elle-même. L'étymologie en témoigne. Le mot est formé de science et de cum (avec). La conscience est un savoir accompagnant ma pensée, mes actions, mon être au monde.
Etrange pouvoir que ce pouvoir de représentation. Car qu'est-ce qui le rend possible ? Prenons avec Alain, l'exemple du dormeur. Il est en situation d'inconscience. Il n'a plus conscience qu'il y a un monde et qu'il y est présent. Il fait partie d'un ensemble dont il ne se distingue pas. Sa condition se caractérise par l'absence de toute forme d'écart entre lui et le monde, entre lui et lui-même. Aussi est-il immergé dans le monde à la manière des choses, sous une forme massive et opaque. Maintenant efforçons-nous de saisir le moment du retour à la conscience. Le dormeur se réveille, il rompt la totalité dans laquelle il était englué, il se sépare de lui-même et du monde, et cette opération de division, de séparation lui permet de se donner la représentation de sa chambre, de son lit, de son corps allongé dans son lit, de son désir de dormir encore un peu.
« Dans le sommeil, je suis tout mais je n'en sais rien. La conscience suppose réflexion et division. La conscience n'est pas immédiate. Je pense et puis je pense que je pense, par quoi je distingue Sujet et Objet, Moi et le monde, Moi et ma sensation, Moi et mon sentiment, Moi et mon idée » Alain. Manuscrits inédits 1928.
La conscience est ce par quoi il peut y avoir un sujet qui se représente et un objet représenté. Par elle s'opère la scission Sujet/ Objet. Le sujet doué de conscience se pose comme un sujet, un Je, en face d'objets. Il n'est pas dans le monde (chose parmi les choses) il fait face au monde et tout ce qui constitue ce monde : moi, autrui, les choses se met à exister comme un objet de représentation.
Il s'ensuit que :
- l'immédiat échappe à l'expérience humaine. Dès lors que s'opère la scission sujet-objet, la chose est à distance et médiatisée par une représentation. Elle est visée par la conscience qui essaie de se l'approprier symboliquement à travers des signes. La faculté symbolique est substantiellement liée au fait de conscience.
- la temporalisation est une dimension fondamentale de notre expérience. A chaque instant présent j'ai conscience de moi-même mais la division que la conscience introduit en moi fait retomber au passé tout ce que je ne suis déjà plus et projette dans l'avenir ce que je ne suis pas encore. La conscience est mémoire et projet.
- le monde est jugé. Se représenter ne consiste jamais à se donner de manière neutre le spectacle de quoi que ce soit. Avec la conscience il y a toujours une reprise critique de ce qui est. Le monde est dévoilé en fonction de valeurs esthétiques, morales, intellectuelles etc. J'ai conscience de ce que j'écris et je juge que c'est vrai ou c'est faux, j'ai conscience de ta présence en face de moi, et je me dis que tu es beau aujourd'hui, j'ai conscience de la décision qui vient d'être prise politiquement et je juge que c'est juste ou injuste. « La conscience est toujours implicitement morale. Et l'immoralité consiste toujours à ne point vouloir penser qu'on pense et à ajourner le jugement intérieur » Alain Définitions.
Avouons qu'il y a dans le fait de conscience un mystère. Comment ce morceau de matière que je suis peut-il sortir de lui, se tenir à distance d'une réalité qu'il est aussi, pour se mettre à exister dans le double statut de sujet de la représentation et d'objet représenté ?
Méditer le fait de conscience revient ainsi à méditer notre expérience la plus familière et pourtant la plus étonnante.
Les questions que je vais affronter dans ce chapitre sont les suivantes :
- De toute évidence, la conscience confère à l'existence humaine des caractéristiques spécifiques. Lesquelles ?
- Comment rendre intelligible le fait de conscience ? La conscience est-elle un être, une substance comme l'analyse Descartes ou bien est-elle un acte, une intentionnalité comme la décrivent les phénoménologues ? (Husserl, Merleau-Ponty)
- Comment penser l'expérience humaine du corps ? Faut-il dire que j'ai un corps ou que je suis mon corps, que le corps est un corps sujet ou un corps objet ? Est-il possible de sortir de l'ambiguïté qui fait que je suis mon corps tout en l'ayant ?
- La conscience est-elle transparente à elle-même comme l'analyse Descartes ou bien faut-il avec Freud soupçonner qu'il y a dans notre expérience psychique, une part d'ombre récusant le projet moral d'une souveraineté exigible de la conscience ?
- Dire Je, Moi, revient à présupposer une unité et une identité personnelle. Qu'en est-il de cette prétention ? Qu'est-ce que l'identité ? Une donnée ou une construction ? Une réalité ou une fiction ? Un être ou un devoir-être ?
BIBLIOGRAPHIE:
Descartes: Discours de la méthode.
Méditations métaphysiques.
Nietzsche: Le gai savoir.
Bergson: L'énergie spirituelle.
Freud: Essais de psychanalyse.
Nouvelles conférences de psychanalyse.
Métapsychologie.
Alain: Eléments de philosophie.
Sartre: L'Etre et le Néant.
Merleau-Ponty: Sens et non-sens.
L'oeil et l'esprit
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Merci Simone pour cette première leçon de philo, j’en avais grand besoin et ai lu ce billet avec attention… Je vais tous les jours en lire un petit peu… Je reconnais en toi la clarté et la magie du verbe… La pensée aussi et la démarche toute philosophique et tellement intéressante… Je te donne mon blog d’histoire géo avec seulement conseils, devoirs et propositions de correction… histgeotriomphe.canalblog.com Je mets aussi un lien sur mes blogs vers le tien !! bises Agnès
Bonjour,
J’ai depuis quelques jours un problème que je n’arrive pas à résoudre.
Observant mon chat dormir pendant je travaillais, cette interrogation s’est imposée à moi :
puisque l’animal est sur le mode de la chose, qu’il n’a pas de pouvoir de représentation, est ce que cela veut dire qu’il ne differencie pas l’instant où il est éveillé de celui où il dort ? Si j’ai bien compris, l’homme endormi n’a pas conscience de dormir pourtant il sait qu’il a dormi au moment du reveil. Mais alors, qu’en est il de l’animal ? N’y a t-il vraiment aucune difference pour lui entre l’état éveillé de celui d’endormi ? Je serai ravie de comprendre…
Merci et bonnes vacances !
Claire
Claire, il faut être plus rigoureuse dans l’usage des concepts. Le chat est sur le mode de l’en soi. (opposable au pour soi). La chose s’oppose à la personne. Etre sur le mode de l’en soi ne signifie pas absence de capacité de représentation. Pensez-vous que la souris, l’oiseau ou votre présence à côté de votre chat n’ont aucune existence pour lui? Ce qui lui manque c’est la conscience de soi, la conscience réflexive, (ou conscience au second degré puisque c’est la conscience de la conscience). Celle-ci requiert la capacité de se séparer d’avec soi-même et d’avec le monde pour être comme un spectateur de soi-même et du monde. En ce sens, le chat ne peut pas avoir la conscience du temps. Sa conscience est une conscience engluée dans l’immédiat. Il est au présent, un présent étroitement limité en avant et en arrière.
Bonnes vacances à vous aussi.
Bonjour Madame,
Elève en terminale S à Orléans, je découvre avec plaisir votre blog que je trouve très clair et particulièrement aidant.
Je souhaiterais avoir une précision, concernant la distinction conceptuelle que l’on peut faire entre la conscience (en tant que conscience réfléchie) et la pensée. Qu’est ce qui différencie ces deux termes ?
Merci de vos précisions et bonne continuation!
Merci pour votre aimable appréciation. J’espère qu’en complément de votre cours ce blog vous aidera à passer le bac dans de bonnes conditions.
La conscience (ou l’esprit) est une faculté humaine. On distingue la conscience spontanée et la conscience réfléchie. L’une est conscience immédiate de quelque chose, l’autre est conscience de la conscience, retour de la conscience sur elle-même pour prendre conscience de ses contenus, de la nature de ses opérations, pour se clarifier et se juger. La conscience réfléchie est donc la pensée qui se pense elle-même. Mais la pensée qui est toujours réflexion peut s’appliquer à d’autres objets. Penser le désir, la technique, l’art etc. c’est penser autre chose que sa propre conscience. Reste qu’il y faut toujours un retour de l’esprit sur lui-même car concernant les objets en question, on a des idées toutes faites, ce qu’on appelle des opinions et il convient de les réfléchir pour examiner leur sens, leur valeur et leur fondement.
Oui, je pense que ce blog et vos articles pertinents me seront très utiles, en complément de mon cours bien sûr!
Merci encore pour votre démarche, c’est toujours avec curiosité et désir que je m’intéresse à la philosophie, 3 toutes petites heures d’ouverture d’esprit par semaine dans ma série scientifique !
@ bientôt!
Je trouve que l’on comprend mieux la conscience en la comparant à la vision. La vision est une faculté, mais elle ne doit pas être confondue avec les objets vus sous prétexte que voir, c’est voir quelque chose.
Le sommeil, c’est un peu comme de fermer les yeux. La faculté de voir n’a pas disparu. On voit quand même du noir. Dans le sommeil profond , en effet, plus de sujet et d’objet, plus de connaissanceS. Mais le sommeil est-il équivalent à un néant ? Il reste, il me semble, une sensation diffuse, sourde, non objectivable, mais bien réelle, au point qu’au réveil, nous n’avons pas l’impression d’un abîme, d’un rien entre hier et maintenant.
Par conscience, tout le monde entend « connaissance de ». S’il y a connaissance, il y a de la pensée (ou concepts). On peut aussi s’apercevoir que bien des choses peuvent être perçus par les sens, « enregistrés » si je puis dire, sans en avoir « connaissance ». Ne serait-ce, par exemple, que ce qui n’est pas regardé, mais qui est dans notre champ de vision et peut revenir en mémoire.
La conscience se caractérise par son intentionnalité, soit. Mais celle-ci n’est pas épuisée par le rapport théorique ou conceptuel au monde voire par le rapport conscient. En témoigne l’analyse des petites perceptions par Leibniz; Le bruit de la vague que nous percevons est constitué de celui de chaque gouttelette d’eau que nous n’identifions pas consciemment
Par ailleurs personne n’a jamais dit qu’il faut confondre l’acte de voir avec la chose vue.
Bonjour madamme Manon. je suis Camerounaise en classe de terminale litteraire. Je suis très émue consernant votre cours la conscience et l’inconscient . Ma préocupation est au niveau de l’incompréhension des termes: » etrange pouvoir que ce pouvoir de representation ». « je pense et puis je pense que je pense ». je vous souhaite beaucoup de courage dans votre talent de professeur . que Dieu vous benisse
L’expression signifie qu’il n’est pas facile de comprendre comment ce petit morceau de matière que nous sommes dispose de la possibilité de se mettre à distance de lui-même pour se représenter. Certes cette distanciation est rendue possible par le langage qui intercale entre le monde et nous, entre nous et nous-même le signe, reste que la capacité symbolique est aussi mystérieuse que la conscience qui en est l’effet et le principe.
Bon courage pour vos études.
bonjour, merci pour ce site comme les autres le disent votre site est particulierement bien tout est bien expliqué , en tout cas je comprends mieux avec votre site qu’avec mon professeur je suis en terminal ES et votre site ma donner goût à la philosophie .
merci .
Bonjour madame,
Je suis actuellement en terminale L et mon professeur m’a donné ce sujet :
La conscience de soi peut-elle couvrir un manque d’être ?
Et je ne vois pas de quelle manière aborder ce sujet, un plan oui non mais, certes, mais, un manque d’être, qu’est ce qu’un manque d’être ? Au sein d’une société ? un trouble intérieur profond ?
Vos cours sont géniaux, merci de les rendre si accessible
Ce sujet vous invite à réfléchir sur ce que l’on entend par « soi », autrement dit il engage une réflexion sur le « pour soi ». Thème hégelien, thème sartrien de la conscience comme néant, décompression de l’être autrement dit comme travail du négatif. Voyez le cours sur l’ambiguïté de la condition humaine et celui sur l’identité. Bon courage.
Merci d’avoir répondu aussi rapidement, mais je vous avouerai que je nage complètement dans cette notion de conscience comme néant et travail du négatif je ne vois pas les liens avec le manque d’être et leur apport positif ou négatif à celui ci.
C’est mon ancien professeur qui m’avait parlé de ce site, je ne regrette vraiment pas d’y avoir passé mon après midi à scruter chacun de vos articles sur le sujet qui m’ont apportés une précieuse aide.
Merci à vous.
Ce thème sartrien est en effet difficile. Avez-vous lu le commentaire du texte de Hegel dans « ambiguïté de la condition humaine »? Il vous permet de vous approprier les concepts de pour soi et d’en soi et de comprendre que par la conscience l’homme ne cesse de nier ce qu’il est sur le mode du donné pour se faire exister comme il se projette. La conscience est néantisante. Elle est un mouvement, un acte, non un être. C’est en ce sens qu’on peut dire que le pour soi n’a pas la plénitude d’être de l’en soi, que la conscience est ce par quoi le néant peut venir au monde. Ce qui est une autre manière de dire que le pour soi est une liberté s’efforçant de s’inventer et aspirant à être en soi ce qu’elle est pour soi. Rêve impossible bien sûr…
Merci de cette explication, j’avais bien lu le cours à plusieurs reprise mais je suis maintenant éclairé, merci de votre aide si précieuse, bonne fin de week end à vous.
Bonjour,
votre blog est très instructif, mais pourquoi n’a t-on aucune information sur la conscience morale ? J’ai une dissertation à faire qui a comme sujet ‘la conscience morale n’est-elle que le résultat de l’éducation? », mais je ne trouve rien nul part. Pouvez-vous m’éclairer un peu s’il-vous-plaît ? Je vous remercie d’avance et vous souhaite une bonne continuation.
Si, il y a de nombreux cours sur la moralité sur ce blog. Commencez par la notion d’obligation dans le chapitre bonheur et moralité. Les choses commenceront à s’éclairer pour vous.
Bon courage.
Je suis heureux d’assister à la réouverture de ce blog.
E
Bonjour Madame, votre blog est intéressant et plus facile à comprendre qu’un cours de philosophie . Vos explications sont toutes fois claires et précises, elles ne sont pas floues. J’ai un léger problème , je m’appelle Emmanuelle, je suis actuellement en classe de Terminale ES, étant bonne élève en général, j’éprouve des difficultés à comprendre mes cours de philo c’est peut-être à cause du prof ou autre je ne sais pas mais je ne comprends rien. Cela ne m’aide pas vraiment à comprendre le sujet de la dissertation quand j’en ai à faire à la maison . J’ai du mal à utiliser mon cours , à chercher dans mon cours, à quoi mettre dans ma copie . Je cherche de l’aide d’un professeur ou d’un autre élève pouvant m’aider à progresser, à savoir comprendre mes sujets de dissertation et autre . Le bac étant maintenant pour la philosophie dans environ 2 mois :S
Merci
cordialement
Quelle est votre question?
Vous pouvez consulter les méthodes, les cours sur ce blog si vous avez l’impression de mieux comprendre. Cela devrait vous permettre de vous approprier les exigences de la discipline.
Bon courage.
merci mais j’aimerais des conseils pour comprendre mon cours . Pour les révisions du bac je compte me faire des fiches de révisions mais je ne sais pas comment m’y prendre , pouvez vous me donner quelques conseils s’il vous plait ?
Cordialement
La compréhension est un acte personnel. Nul ne peut de l’extérieur se substituer à l’effort individuel. Vous devez assimiler les définitions des notions. Il suffit de connaître la langue pour s’approprier une signification. Ensuite il convient de saisir les problèmes que telle ou telle notion pose. Le cours les explicite d’ordinaire en mobilisant les grandes analyses d’auteur.
Sur vos fiches vous devez faire figurer les définitions, les termes du débat suscité par telle notion et les éléments d’élucidation que les grands auteurs en ont proposés.
Ainsi serez-vous armée pour réfléchir par vous-même sur une question donnée.
Merci pour ces conseils très utiles
Cordialement
Bonjour,
Je suis actuellement en révisions pour mon baccalauréat, section ES. Je revois le doute carthésien et je me demande si ma pensée est exacte : ce que Descartes semble attendre, selon moi, ce sont des preuves à chaque certitude qu’il remet en questions. Cependant, je me demande si le simple fait de remettre ses certitudes en questions n’amènerait pas une élévation de l’esprit de celui qui entreprend d’appliquer cette méthode.
Merci pour votre aide !
Vous avez un cours sur le cogito cartésien. Il suffit de vous y reporter.
Bon courage.
donc peut-on dire que l’inconscient se trouve dans la conscience. Soyez plus précise dans votre explicitation. j’attends votre réponse avec impatience.
Je me suis permise de corriger vos fautes tant votre expression est incorrecte. Il faudrait faire un effort pour en soigner la qualité.
Vous vous êtes contenté de lire la présentation du chapitre Conscience-inconscient-sujet. Une présentation de la problématique d’ensemble n’explicite rien. Il faut vous reporter à chacun des cours que cette présentation introduit. Il suffit de cliquer dans la colonne de droite sur le chapitre concerné et vous verrez défiler le titre de chacun des cours. (ou bien allez dans la table des matière).
Il y a un cours sur ce que Freud théorise sous le nom d’inconscient. Prenez la peine de l’assimiler et vous comprendrez qu’il n’y a aucun sens à dire que l’inconscient se trouve dans la conscience.
Bonjour,
J’ai lu en classe le paragraphe 8 de La Conscience et la Vie de Bergson et je n’ai pas vraiment compris la thèse qu’il dévellope. J’ai donc quelque question à vous poser :
– Quelle est la différence entre spontanné et automatique : dans le dictionnaire ces deux mots sont synonymes et j’ai pourtant essayé de trouvé un détail les différanciant je ne vois pas.
– Lorsque l’on fait un geste ne sommes nous pas toujours conscient de l’avoir fait ? Même si c’est un réflexe je sais que je l’ai fait, alors pourquoi dit-il que notre consience s’enfuit au fur et à mesure de notre expérience. Cela veut-il dire que plus l’on refait quelque chose nous sommes de moins en moins conscient de ce que l’on fait ?
– Je ne comprend pas non plus ce que re présente une crise intérieure pour Bergson : est-ce un traumatisme ou une prise de conscience ?
– Pourquoi Bergson associe-t’il le choix à une création ? (Fin du paragraphe)
– Pour Bergson ne sommes nous conscient que lorsque nous devons effectué des choix ?
Je sais que je pose de nombreuses question mais je suis curieuse de nature et comprendre la philosophie est un vrai défi ! Je vous remercie donc par avance de répondre à toutes ces question.
Bravo pour votre site qui est très constructif à mon goût !
Non, spontané n’est pas synonyme d’automatique. Le mot peut parfois être employé dans le sens d’irréfléchi mais dans son sens propre il signifie: « ce qui se produit par l’initiative propre de l’agent » (sponte sua). C’est donc ce qui n’est pas déterminé par une cause extérieure à l’action de l’agent, ce qui relève de sa liberté. Dans le texte bergsonien, l’action automatique est opposée à l’action spontanée. Cf. « Qu’arrive-t-il quand une de nos actions cesse d’être spontanée pour devenir automatique? La conscience s’en retire » écrit l’auteur.
La conscience est coextensive à la vie pour autant que celle-ci n’est pas engluée dans le déterminisme de la matière, et elle se déploie dans le temps. La conscience est donc mémoire et anticipation de l’avenir selon les définitions de Bergson. Mais dans l’habitude, dans les automatismes, l’action s’opère en nous, sans l’intervention de la conscience parce qu’elle est devenue mécanique.
Observez le phénomène sur vous-même comme le propose Bergson. Lorsque vous écrivez un mot, vous ne pensez plus à la manière dont il faut vous y prendre pour tracer chacune des lettres. Le mouvement de votre main est automatique, ce qu’il n’était pas au moment où vous avez appris à écrire. En revanche, vous devez réfléchir au sens du propos de l’auteur, vous représenter plusieurs sens possibles et vous décidez pour l’un à l’exclusion des autres. Vous hésitez, vous êtes confrontée à un choix. A ce moment votre conscience est à son plus haut degré d’intensité.
Voilà pourquoi il faut distinguer la conscience endormie et la conscience éveillée. La conscience n’est jamais aussi vive, aussi présente à l’activité, que lorsque l’action n’est pas automatique, qu’il faut prendre une décision, choisir telle possibilité plutôt que telle autre. Ce que connote l’idée de crise, d’hésitation, de choix dans le texte. Mais qui dit initiative d’un agent, hésitation, choix, dit liberté. Notre conscience est d’autant plus intense que nous exerçons davantage cette liberté. En ce sens l’acte conscient est l’acte vraiment spontané et celui-ci est l’acte proprement créateur ou l’acte libre. Comme tel, il est imprévisible.
Bergson lie donc les notions de conscience, de spontanéité, de liberté, d’imprévisibilité et de création. Il disait que: « nous sommes libres quand nos actes émanent de notre personnalité entière, quand ils l’expriment, quand ils ont avec elle cette indéfinissable ressemblance qu’on trouve parfois entre l’œuvre et l’artiste »
Merci beaucoup pour votre réponse !
En prévision d’un futur contrôle je voudrais vous demander ce qu’il faut mettre dans la partie critique (es-ce notre avis ou plutôt ce que les autres philosophes ont en pensé ?) d’un commentaire de texte. De plus je me demandais si dans la partien analyse on doit faire un plan avec des parties et des sous-parties dans cette partie. Dans ce texte resortent deux grandes idées :
– action spontannée (avec conscience)/action automatique (sans conscience)
– choix —> conscience
Si on devait faire des parties dans la partie analyse elles seraient sur ces thèmes. Qu’en pensez-vous ?
La thèse d’un auteur est-elle la question que celui se pose ou le développement que celui-fait pour répondre à cette question ?
Merci d’avance pour votre réponse.
PS : Pensez qu’une analyse linéaire est plus indiquée pour ce texte qu’une analyse par thème ou le contraire ?
Pour la méthode de l’explication de texte, voyez le cours de méthode sur ce blog. Vous avez dans le colonne de droite une rubrique: méthodologie.
Vous devez toujours dégager le thème, les questions que l’auteur s’est posé à propos de ce thème et sa thèse, c’est-à-dire la manière dont il élucide sa problématique.
Une explication linéaire est bien adaptée à ce texte.
L’important est d’abord de comprendre avec précision et profondeur ce que dit l’auteur. L’explicitation du sens doit être l’essentiel de votre travail. Il se peut que vous ayez une objection à lui faire, étayée ou pas par une thèse philosophique, mais tous les textes ne se prêtent pas aisément à la discussion. Remarquez combien Bergson évite tout dogmatisme dans ce texte. Sa perspective est descriptive et ses interprétations sont prudentes. D’où l’usage de questions pour amener les idées, l’emploi du verbe sembler, le recours au « si … « alors » ».
Merci
Excusez moi de vous déranger encore un fois mais je n’ai aucune idée de quoi mettre dans la partie critique de mon commentaire sur ce texte. Je sais comment je dois faire (j’ai lu la méthode) Mais je ne trouve pas d’argument ou d’auteurs ou de thèse à lui opposé.
Merci de votre répondre.
Si vous avez étudié Freud, vous pouvez l’utiliser pour discuter l’assimilation bergsonienne de la conscience et de la liberté. Mais si vous ignorez les analyses freudiennes dispensez-vous de la partie critique.
Je ne peux pas me passé de partie critique étant donné que le prof veut qu’on en fasse une ; son plan est :
-patie analyse
-partie critique
Si vous pouviez me donner des pistes vous me seriez d’une grande aide n’ayant jamais étudié Freud.
Je suis désolée Morgane, je ne donne pas de cours particulier.
Vous avez des cours sur Freud et sur la liberté sur ce blog. Il suffit de vous y reporter.
Merci pour votre aide
Est-il erroné d’assimiler le « je » à l’âme et le « moi » au corps?
Oui, il est absolument erroné de faire cette assimilation. Pour vous éclairer, voyez le cours sur l’identité: le problème métaphysique sur ce blog et le texte de Kant dans le cours intitulé: ambiguité de la condition humaine.
Bonjour! merci une fois de plus pour votre générosité et votre disponibilité permanente de nous aider à penser. j’ai la préoccupation de savoir si nous pouvons considérer que l’animal est inconscient? si oui peut-on rapprocher l’inconscience de l’animal à celle de l’homme?
Il ne faut pas confondre inconscient et inconscience. Le cours sur Freud le précise.
Il y a bien une conscience animale, simplement elle diffère profondément de celle de l’homme dans la mesure où elle est déterminée par le besoin et a donc une amplitude limitée. S’il y a un inconscient animal, c’est la même chose.
Bonjour chère Simone,
A l’occasion des trente ans de la mort de J. Lacan, je me suis penché avec un vif intérêt sur la lecture des articles de ce chapitre et je dois une nouvelle fois saluer la saveur inaltérable de vos publications.
Merci mille fois,
Pierre
Bonjour Pierre
Vous êtes vraiment trop généreux mais puisqu’aujourd’hui est pour moi un jour de fête, je reçois votre message avec un grand plaisir.
Bien à vous.
Merci Simone pour cette intro qui clarifie tellement de choses!
Grâce à cela le cours dense mais nébuleux de mon professeur paraît soudainement plus clair…
Merci beaucoup!
[…] https://www.philolog.fr/la-conscience/ […]
Bonjour, je suis en Terminale S, et en ce début d’année, nous avons abordé la question de l’essence et de l’apparence. Notre professeur nous a présenté ces deux notions grâce à des exemples très simples:
– « Cette maison est jaune, et celle là est bleue » : Dans cette expression, nous désignons l’apparence des objets, c’est à dire les façons dont les objets se présentent à moi (la vue, le sensible). Nous avons recours à la description (et à la comparaison) pour définir l’objet, ceci est donc une forme de connaissance.
-« La maison est verte »: l’article défini « la » désigne « la maison en général ». Dès lors, le sujet prend un autre sens. On ne peut plus dire que la maison est verte car toutes les maisons ne sont pas vertes. La couleur verte n’est donc pas une propriété essentielle pour définir ce qu’est une maison.
Pour définir l’idée de maison, je dois utiliser sa définition, car celle-ci s’intéresse à la fonction : « une maison est un espace fermé est indispensable à l’homme. Il définit son chez soi, en opposition à l’espace naturel.
Donc, ces exemples sont peut-être faciles, voire enfantins, mais lorsque nous abordons la question de l’essence chez l’Homme (l’Être), je suis perdue. Pourriez-vous m’expliquer la véritable différence entre l’essence et l’apparence, chez l’être humain ? Tout ceci, en rapport avec les notions de « conscience » et de « sujet » ?
Je vous remercie d’avance,
cordialement.
Il me semble, Clémence, qu’il est plus fécond de vous approprier les définitions des notions plutôt que d’être obnubilée par des exemples censés vous faciliter la tâche.
L’essence est, au sens métaphysique, ce qui constitue la nature d’un être, ce qui assure sa permanence. Le mot, proche ici de substance, s’oppose à accident.
Au sens logique, l’essence d’un être est l’ensemble des propriétés qui font qu’il est ce qu’il est. L’enjeu de la définition est de formuler ces propriétés.
L’apparence est ce qui se présente de la chose immédiatement aux sens et à l’esprit.
Or ce que sont les choses dans ce qui définit leur essence n’apparaît pas nécessairement sous forme sensible et immédiate. Voilà pourquoi la notion d’apparence est connotée péjorativement. Les apparences sont accusées d’être trompeuses (Cf. Platon et le procès de la connaissance sensible)
Il me semble que votre exercice consiste à réfléchir sur l’essence de l’homme. Ce qui n’est pas une mince affaire car tout un mouvement de la pensée contemporaine (par exemple l’existentialisme) consiste à dire que l’homme n’a pas d’essence, qu’il est une liberté, une existence c’est-à-dire « un être qui n’est d’abord rien et qui ne sera que ce qu’il se sera fait ».
En tout cas, quelle que soit la nature de votre exercice, il va de soi que si vous définissez l’homme par la conscience, ou par sa capacité à se poser comme un sujet, ou comme une liberté, il est clair que ces caractéristiques ne s’offrent pas à une approche purement sensible. Elles ne peuvent être saisies que par une opération de l’esprit.
Voyez les cours: ambiguïté de la condition humaine. https://www.philolog.fr/ambiguite-de-la-condition-humaine/
L’essence de l’homme c’est l’existence.https://www.philolog.fr/lessence-de-lhomme-cest-lexistence-heidegger/
En espérant avoir clarifié les choses.