Technique vient du grec tekhnê (art ou technique) : fabriquer, construire, causer au sens de faire être, amener à l'existence d'une manière appropriée et efficace. Une technique est un faire mais tout faire n'est pas technique.
On peut opposer la production naturelle à la production technicienne : L'une a son principe d'existence en soi. Ex : l'arbre se développe selon un processus immanent à la matière. L'autre a son principe d'existence hors de soi, dans l'esprit et la main de l'homme. Ex : le stylo est conçu et produit par un technicien.
On peut aussi opposer la production instinctive à la production technicienne : Dans l'une les opérations ont un caractère stéréotypé et automatique. Elles n'ont ni la souplesse, ni la perfectibilité des opérations mises au point par une intelligence. L'instinct est bien un savoir faire mais ce savoir n'est pas conscient et volontaire. Dans la technique les opérations sont définies, transmises, apprises.
Mais il ne suffit pas de connaître les règles pour en maîtriser l'usage. Voilà pourquoi le terme désigne ce qui a rapport à l'exercice d'un métier et plus précisément l'habileté apprise au cours d'un apprentissage. Elle suppose la capacité d'adapter et d'ajuster les règles en fonction de la fin visée. L'habileté introduit un certain jeu dans ce qu'implique de mécanique les contraintes propres à tout art. Plus les contraintes sont maîtrisées plus la liberté est capable de jouer avec elles. En ce sens, la technique doit être distinguée de la science ou d'une simple application mécanique de règles préalablement définies. Le savoir-faire technique est irréductible au simple savoir. "L'art, en tant qu'habileté de l'être humain, se distingue aussi de la science (comme le pouvoir du savoir), à la manière dont le pouvoir pratique se distingue du pouvoir théorique, ou la technique de la théorie (comme l'arpentage se distingue de la géométrie). Et dans cette mesure, on ne désigne pas non plus comme constituant de l'art ce qu'on a le pouvoir de faire dès lors que l'on sait simplement ce qui doit être fait, et que l'on se borne donc simplement à connaître l'effet recherché. Seul ce que l'on n'a pas aussitôt l'habileté de faire du simple fait qu'on le connaît de la manière la plus parfaite relève de l'art" Kant Critique de la faculté de juger.
Une technique est une manière de procéder, un moyen destiné à produire des résultats jugés utiles. Ce procédé implique la définition de ses opérations. C'est parce qu'elle est définie qu'elle est transmissible. D'où le caractère d'existence sociale d'une technique. « L'invention même non éphémère d'un individu, si elle n'est pas effectivement acquise et transmise par le milieu social n'est pas technique. » Ducassé Histoire des Techniques. 1945.
Ex : la technique du pilotis ; la technique de la charpente.
La technique renvoie à deux sens :
Ensemble des outils, machines, procédés, mis au point par l'homme dans le but d'accomplir ses fins.
Mode de rapport des sociétés modernes à la nature et à elles mêmes, reposant sur la connaissance scientifique. La technique est la pratique fondée sur le savoir scientifique.On parle en ce sens de techno-science.
Problèmes:
La technique a-t-elle toujours dans la culture la dignité qu'elle mérite?
Comment concevoir les rapports de la technique et de la science?
La technique est-elle un facteur d'asservissement ou de libération?
La technique est-elle une activité neutre?
L'essence de la technique est-elle technique ou métaphysique?
Partager :
Share on Facebook | Pin It! | Share on Twitter | Share on LinkedIn |
Que signifie « science sans conscience n’est que ruine de l’âme s’il vous plaît ? Je comprennds que la science est le propre de l’homme et qu’elle peut entre les mains d’homme « sans conscience » devenir un péril pour notre societé, mais comment étendre cette perspective ? Merci
Vous avez à réfléchir par vous-même, non à attendre d’un professeur une réponse toute faite.
Bonjour
A la lecture de l’ouvrage Le rationalisme appliqué de Bachelard, je voudrais savoir ce qu’il entend par:
L’arrivée de l’ampoule électrique est un exemple de passage au 4ème état. Ainsi il y a une rupture avec la conception substantialiste de la combustion?
Pouvez vous s’il vous plaît m’éclairer sur ce sujet?
Je suis désolée. Pour vous répondre avec précision, il faudrait me replonger dans Bachelard et je n’en ai pas le temps.
Je vous remercie d’avoir pris le temps de me répondre.
Je continue ma réflexion sur le sujet.
Bonne soirée.
Bonjour, je voudrais tout d’abord vous remercier pour cette page, très éclairante.
J’ai toutefois une question à vous poser sur vos deux définitions de la technique.
Alors que vous distinguez deux sens différents à ce mot, Heidegger lui, dans « Langue de tradition et langue de technique » en distingue trois que je cite « La technique peut signifier l’ensemble des machines et des appareils qui se présentent, pris seulement comme objets disponibles, ou alors en fonctionnement. La technique peut vouloir dire la production de ces objets, production que précède un projet et un calcul. La technique peut aussi indiquer la coappartenance en un ensemble des produits et des hommes ou groupes humains qui travaillent à l’installation, l’entretien et la surveillance des machines et appareils »
Comment expliquez vous cette différence ?
En vous remerciant d’avance, Romano
Je n’ai pas le texte de cette conférence sous les yeux, seulement quelques notes concernant la question de la langue. Je n’aime pas répondre dans ces conditions tant il est vrai qu’un propos d’auteur s’éclaire par les développements qui lui confèrent sa substance.
Il me semble qu’avec le troisième sens, Heidegger veut dire que la technique définit un monde dans lequel l’homme n’est pas distinct du dispositif instrumental. Lui aussi est un moyen dans le processus de l’arraisonnement de la nature. CF. « coappartenance en un ensemble ».
Vérifiez la pertinence de ma suggestion.
Bien à vous.
Bonjour,
Tout d’abord, félicitations pour la qualité de vos cours qui manifestent un grand travail de précision et par conséquent une haute exigence dans l’effort intellectuel. Je voudrais simplement revenir sur votre définition de ce qu’est une technique (« une technique est une manière de procéder […] existence sociale d’une technique »). Je comprends qu’il était nécessaire d’intégrer aux différentes distinctions qui précédaient la dimension sociale et historique (disons culturelle) de la technique. Ce qui me trouble un peu c’est l’idée selon laquelle une technique suppose nécessairement la définition de ses opérations. En fait, c’est le terme de « définition » sur lequel je m’arrête un peu : s’agit-il d’un énoncé symbolique qui permet de transmettre sous forme de règles une action à faire pour obtenir un but déterminé, ou bien cela peut-il être simplement un ensemble de « gestes » qui sont reproduits par imitation et expérience ordinaire ? Un geste n’est-il technique que lorsqu’il a été reconnu et appris sous la forme d’un savoir transmissible distinct de la simple imitation parfois non discursive ? Il me semblait simplement que l’imitation sans règles bien définies pouvait être une forme d’apprentissage d’une technique (mais peut-être la technique doit-elle toujours supposer plus qu’une simple imitation ? c’est peut-être ce qui la distingue alors de l’expérience au sens où par exemple Aristote distingue empeira et technè en Métaphysique A,1 ?) En outre, ne peut-on imaginer le cas d’un nouveau procédé qui aurait été inventé et ne se serait pas transmis et qui était pourtant efficace ? Je pinaille, mais mon esprit avait un peu de mal à céder à l’évidence de cette proposition. Merci encore pour ces « belles choses » que vous nous offrez.
Bonjour
La formule de Ducassé me semble répondre à votre question.
Oui ce que l’on appelle technique implique la définition de ses opérations et la transmission sociale. Un artisan habile ayant mis au point un procédé qu’il ne définit pas et ne transmet pas n’a pas donné naissance à une technique. Sa manière de faire disparaîtra avec lui. Il aura privé l’humanité des résultats de son talent.
Bien à vous.
Bonjour,
Mon commentaire n’a rien à voir avec cet article en particulier seulement je ne savais pas où le placer. Je tenais, en tant qu’étudiante en philosophie, à vous féliciter et à vous remercier très sincèrement pour avoir ouvert ce blog. Je trouve votre démarche admirable et je tiens à saluer votre générosité de mettre ainsi à disposition votre savoir dont on bénéficie avec délectation.
Bien à vous.
Merci pour ce sympathique message.
Bien à vous.
Bonjour madame
La phrase » une technique est un faire mais tout faire n’est pas technique » pouvez vous m le redire en d’autres termes SVP?
Bonjour
L’enfant qui construit un château de sable en procédant n’importe comment fait quelque chose mais son « faire n’est pas technique ».
Idem pour l’artiste lorsqu’il ne peut définir les opérations lui ayant permis d’obtenir l’effet recherché.
Bien à vous.
Merci pour tous vos sujets. Je note que vous abordez la Technique sans l’idolâtrer. Dans un autre texte, vous citez même Ellul. Je voudrais vous signaler des assises qu’organise l’association Technologos sur le numérique à l’école (tablettes, …) , la numérisation de l’école (APB, Pronote, et leur gestion en flux tendu des jeunes adultes), et dans l’éducation. Plus de détails sur http://technologos.fr/assises_nationales.php
Bonjour
Merci pour l’information.
Bien à vous
Bonjour,
Je reviens de temps à autre sur votre site ( depuis une dizaine d’années) et c’est toujours un plaisirs de le parcourir. Je viens y piocher quelques idées sur les différents thèmes qui sont très bien organisés. Je ne sais pas si vous regardez encore les commentaires, néanmoins je tenais à vous remercier pour ce jolie travail.
Maxime
Bonjour
Merci pour ce sympathique message.
Bien à vous